mercredi 12 décembre 2018
Voila désormais près d'un mois que le Mouvement des Gilets Jaunes a
débuté en France. Malgré le froid, la pluie, les difficultés, les
relations parfois tendues avec la police, les blessés et les morts, rien
ne semble pouvoir altérer la détermination de cette partie du peuple
entrée en insurrection.
Le gouvernement, jamais avare d'un propos infantilisant ou d'une
communication pleine de fiel à l'égard du peuple, n'en reste pas moins
profondément inquiet par les événements. Car la situation est inédite
depuis 1968, voire 1934 si l'on se cherche une référence historique plus
adéquate. En 1968 en effet, ce fut d'abord la révolte des bobos, d'une
jeunesse qui ne supportait plus un certain nombre de conservatismes qui
sclérosaient quelque peu la Société. Néanmoins, les insurgés de l'époque
ne parvinrent pas à renverser le Général de Gaulle. Cependant, les
soixante-huitards gagnèrent autrement la bataille, avec une purge qui
s'opéra jusqu'au sein de la Maison de la Radio, à une époque où Radio
France restait le média le plus écouté des Français. Voila comment
l'idéologie libérale et anti-France s'est immiscée progressivement dans
le ron-ron médiatique ambiant.
En 1934, c'est une révolte autrement plus populaire qui bien que débutée
par les réseaux d'extrême droite de l'époque, a pourtant fait converger
à elle des millions d'ouvriers y compris dans les partis et syndicats
les plus à gauche, ce qui entraîna la chute du gouvernement Camille
Chautemps le 27 Janvier de la même année, et posera les fondations du
Front Populaire deux années plus tard.
Aujourd'hui à la veille de l'année 2019, l'insurrection en cours ne
nécessite pas de grandes analyses sociologiques et politiques. C'est en
premier lieu la France des provinces qui se mobilise. D'ailleurs,
certains observateurs malicieux ou cherchant à susciter la polémique,
remarquent que ce ne sont pas les banlieues qui se soulèvent, et que
décidément, il y a beaucoup trop de "blancs" parmi les Gilets
Jaunes. La réalité reste tout de même à nuancer, c'est d'avantage les
Français en paix avec leur unité nationale et leur citoyenneté qui se
révoltent. Cela indépendamment des origines et repères cultuels de
chacun. Certes il y a des électeurs du FN, mais il y a aussi des
électeurs de la France Insoumise, des syndiqués (beaucoup), des gens
émanant de l'extrême gauche comme de la droite conservatrice, et surtout
une très forte majorité de gens qui ne se reconnaissent aucun
attachement partisan particulier. Certains ânonnent que le mouvement est
apolitique (jusqu'à vouloir interdire les autres de discuter de
politique), mais c'est évidemment un mensonge. Le mouvement est
transpartisan, ce qui ne l'empêche pas d'être profondément politique.
En clair, ce sont les masses dépolitisées qui sont actuellement en train
d'occuper les ronds points et remonter par vague chaque Samedi dans les
grandes villes et en particulier sur la Capitale, dans l'espoir d'un
renversement politique complet à faire advenir. Et le peuple est lucide,
terriblement lucide, quand bien même il se trouvera toujours des
journalistes ou intellectuels pour laisser à entendre que les Gilets
Jaunes soient des idiots. En effet, dans tous les cortèges et
rassemblements sur l'intégralité du territoire français, quelle
revendication est la plus souvent scandée par le peuple ?
"Macron démission !"
Il faut comprendre ici tout ce que signifie une telle revendication.
D'abord, la charge symbolique. Si Macron devait être destitué ou poussé à
la démission, ce serait vécu comme une immense victoire par les
insurgés et la démonstration qu'ils ne se sont pas battus pour rien. Une
réelle fierté et fraternité nationale en découlerait assurément. Il
y aurait un peuple en liesse partout dans les rues. Je ne crains pas de
m'avancer sur une telle prévision.
Vient ensuite la réelle logique politique sous-jacente, et c'est en cela
que les Gilets Jaunes sont lucides. Ils ont en effet bien compris que
ce n'est pas M. Macron, ni son gouvernement qui opéreront tous les
changements que nous pourrions espérer. Que l'on envisage des progrès
substantiels sur la Démocratie comme la proposition d'introduire dans la
Constitution le référendum d'initiative citoyenne,
ou que l'on exige des mesures économiques et sociales qui soient
clairement favorables au peuple et réellement significatives dans leurs
effets. Non décidément, jamais Emmanuel Macron pas plus qu’Édouard
Philippe, tous deux inféodés à des intérêts prédateurs, ne se
soumettront aux revendications des Gilets Jaunes. Raison pour laquelle
ces derniers vont à la racine du problème : il faut impérativement
renverser ces gens, car aucun progrès ne pourra être envisagé avec de
tels félons au pouvoir.
Ce qu'en revanche, la majorité des Gilets Jaunes ignore, c'est qu'il y a aussi des raisons pénales
de renverser Emmanuel Macron et une partie de son gouvernement. Les
ayant déjà exposées dans un autre billet, je n'y reviendrai pas ici.
L'entrisme, la lâcheté, la servitude volontaire.
"Or ce tyran seul, il n'est pas besoin de le combattre, ni de l'abattre. Il est défait de lui-même pourvu que le pays ne consente point à sa servitude. Il ne s'agit pas de lui ôter quelque chose, mais de ne rien lui donner".
Discours de la Servitude Volontaire, Étienne de la Boétie.
Si les revendications sociales et celle portant sur la destitution
d'Emmanuel Macron restent les plus exposées par les Gilets Jaunes depuis
le 17 Novembre dernier, depuis peu, les militants qui travaillent à la
promotion du RIC en France, permettent à la fois une avancée dans le
débat intellectuel sur les revendications, autant qu'ils semblent
inconscients des reculs qu'ils peuvent susciter. En effet, ces derniers
ignorant superbement les revendications depuis le départ scandées par
les Gilets Jaunes, tentent de faire entendre à ces derniers qu'il
faudrait discuter avec le Gouvernement et Emmanuel Macron dans l'espoir
insensé qu'ils acceptent avec l'aval du parlement, d'introduire dans la
Constitution un texte qui serait extrêmement préjudiciable à
l'oligarchie. En clair, exit la revendication de destitution de Macron,
ce qui est une trahison ! Quand on tente de comprendre cette absence de
logique dans le déroulement du processus révolutionnaire, on se rend
compte que cette branche plus éduquée des Gilets Jaunes, est aussi
nettement plus lâche (et j'insiste lourdement sur ce terme) car
paniquée à l'idée de ne pas savoir ce qui adviendrait après le
renversement de Macron.
Les Gilets Jaunes qui manifestent et ne disposent pas nécessairement de
cette culture politique, notamment sur la Démocratie, n'ont pour leur
part aucunement peur. Ils savent que rien ne peut être pire qu'un
gouvernement félon, et qu'un succès révolutionnaire conduisant au
renversement d'Emmanuel Macron, aboutirait nécessairement à de grands
progrès politiques et sociaux au profit du peuple. A ce titre, les
espoirs des militants du RIC sont douchés par la réalité de terrain. On
continue sur les ronds points et dans la rue de gueuler "Macron Démission" et le RIC ne peut que s'ajouter aux revendications actuelles, et non les supplanter toutes. A bons entendeurs, salut !
L'inexpérience des animateurs de la Révolution.
Comme dans tout processus révolutionnaire, des têtes émergent notamment
par le prisme des réseaux sociaux, situation qui restait encore inédite
en France jusque là, mais qu'ont parfaitement connu les Tunisiens
quelques années plus tôt. Des blogueurs, youtubeurs et militants
inondent la toile de leurs publications adressant leurs commentaires et
conseils sur la situation. Malheureusement, aucune de ces notoriétés du
web ne jouit d'une éducation politique suffisamment consistante pour
comprendre ce qui se joue exactement à l'heure actuelle. Que ce soit sur
le plan de la stratégie opérationnelle ou l'organisation locale et
nationale du mouvement, les Gilets Jaunes accumulent des retards et des
erreurs dans leur façon de s'organiser et pressuriser le gouvernement.
Et c'est bien ce qui peut conduire au délitement du mouvement. Car nous
approchons les fêtes de Noël et de la St Sylvestre, et bien évidemment,
les Français lassés de ne rien obtenir et ayant à cœur de revenir vers
leurs familles, risqueront bien de ne plus ressortir dans les rues une
fois l'année 2019 démarrée. Emmanuel Macron le sait, les Gilets Jaunes
le savent, mais quand bien même avec quelques camarades, j'ai tenté de
faire entendre notre appel à occuper les grands médias parisiens et le
parlement, les meilleurs relais d'opinion se taisent pour le moment,
bien qu'ils soient informés de cette proposition. Ce qui signifie que
les Gilets Jaunes n'occupent toujours pas les institutions les plus
sensibles pour remporter la guerre de l'information et pousser le
parlement à voter la destitution d'Emmanuel Macron. Ainsi, Samedi 15
Décembre prochain sera sans doute le jour de vérité. Car si de nombreux
Français sont prêts à renouveler encore leurs efforts sur la capitale,
ces derniers devront nécessairement aboutir à un succès d'étape qui soit
suffisamment important pour remotiver les troupes.
La délicate question des porte-paroles.
Une autre fragilité est la dimension anarchique du mouvement. Si la
majorité des Gilets Jaunes comprend qu'il est nécessaire de disposer
d'un certain nombre d'interlocuteurs à présenter aux institutions,
personne ne peut revendiquer une quelconque légitimité ou un vote
démocratique pour ce faire. De fait, l'Armée et la Police Nationale,
comme les ambassades étrangères, ne savent pas avec qui parler. Ce qui
est une difficulté réelle sachant qu'une Révolution se termine toujours
(dans ses aspects les plus concrets) lorsque l'Armée prend fait et cause
pour le peuple, et ne reconnaît plus la légitimité du commandement à un
chef d’État contesté. Nous devons pouvoir adresser un message à l'Armée
et en sommes encore incapables. Bien que progressivement au niveau
local, les insurgés s'organisent pour se nommer des référents, beaucoup
oublient en premier lieu de rédiger et voter les mandats de ces
animateurs locaux afin d'éviter des renversements constants au gré de
mini putschs lors des Assemblées Générales. En outre, parmi les Gilets
Jaunes, certains sont totalement engoncés dans leurs abstractions. Ils
ne s'intéressent pas aux institutions, à la marche de l’État et sont
tellement frileux à l'idée que nous soyons représentés, qu'ils se
refusent (avec beaucoup de prosélytisme) à participer à une véritable
structuration du mouvement. A ce point dégoûtés (et à juste titre) par
nos "élites" politiques, ils jettent le bébé de la représentation
nationale ou locale, avec l'eau du bain. Ils oublient néanmoins que la
majorité des gens sont bienveillants et pas nécessairement corruptibles.
Ils éludent le fait que si Macron est destitué, c'est le président du
Sénat qui reprendra la main. Ils sont incapables d'imaginer qu'un
gouvernement provisoire, à l'égal de ce que fut le Conseil National de
la Résistance au sortir de la guerre 39-45, puisse tout à fait reprendre
la main pour organiser à la fois des élections présidentielles
anticipées, moult référendums attendus du peuple et de grandes réformes
sociales et économiques favorables à la nation, au moyen de
décrets-lois. Pour ces nihilistes rejetant violemment toute discussion
politique, les intellectuels, experts, lanceurs d'alerte, personnalités
politiques alternatives, etc, quand bien même ces gens défendent depuis
des années le bien commun de façon désintéressée et cela loin de toute
exposition médiatique, ces gens-là donc, sont nécessairement des salauds
et des traîtres en puissance. Et qu'importe qu'à l'observation froide,
il soit manifeste que nous disposions d'une intelligentsia politique
parfaitement intègre et visionnaire en France. Les Gilets Jaunes ne la
connaissent pas pour l'écrasante majorité d'entre eux, et c'est un
problème.
L'issue
En tant que révolutionnaire consistant et intègre, il va de soi pour ma
part, que nous ne parviendrons à changer totalement de cycle politique,
que dès lors que nous aurons renversé Emmanuel Macron et son
gouvernement. Si les médias (publics) et le parlement deviennent la
cible stratégique première des Gilets Jaunes au cours des prochains
jours ; que la banlieue se soulève à son tour (sans haine, sans armes et
sans violence) ; que les Assemblées Générales des Gilets Jaunes se
décident à inviter des intellectuels pour se faire expliquer la marche
de l’État ; que chaque groupe se structure dans les meilleures formes et
qu'enfin, nous commencions à discuter d'un gouvernement de transition à
former ; alors seulement, le peuple français gagnera sa bataille
contre l'oligarchie. Nous entrerons alors dans une nouvelle ère
politique qui sans nul doute conduira à la restauration de
l'indépendance nationale (sortie de l'U.E., de l'euro et l'OTAN),
l'institution de la Démocratie, mais aussi des mesures de planification
économique, industrielle et agricole permettant de revenir au plein
emploi et assurer le devoir social de l’État.
L'autre issue possible est malheureusement le délitement progressif, comme ce qu'il s'est passé avec l'expérience "Nuit Debout". Dans
ce cadre, Emmanuel Macron en profitera sans doute pour nous trahir
encore et toujours. Notamment sur la cession de la place de la France au
Conseil de Sécurité de l'ONU à l'Union européenne, ainsi que son idée
folle de constituer une "armée européenne" et ouvrir notre
dissuasion nucléaire à l'Allemagne. Bien évidemment, il continuera son œuvre de privatisation de toutes nos institutions et entreprises
publiques, de démolition de notre souveraineté nationale et de notre
pacte social, notamment en visant à abolir la Sécurité Sociale qui a le
mauvais goût pour les financiers, d'user d'un système par répartition
plutôt que par capitalisation.
Peut-être qu'un sursaut populaire en ressortira à nouveau avant la fin
de ce quinquennat usurpé, mais je reste très pessimiste à ce sujet.
A ce titre, je tiens ici à conclure ce billet par une mise en garde à
la fois aux Gilets Jaunes et aux forces régaliennes du pays :
Nous avons le devoir collectif de restaurer notre indépendance nationale
et faire cesser le dépeçage de la France sur l'autel de la finance et
des volontés d'affaiblissement de notre pays par des puissances
étrangères (notamment l'Allemagne, les USA, le Royaume-Uni et Israël).
Si les Gilets Jaunes se doivent désormais de se montrer plus stratèges
dans leur mobilisation, l'Armée pour sa part a une écrasante
responsabilité qui pèse sur ses épaules. Comment accepter que nos
généraux puissent tolérer les trahisons constantes d'Emmanuel Macron,
ainsi que ses violations répétées du Droit International, sans mot dire ?
Soldats, gendarmes et policiers, puisque votre haut commandement
collabore avec un gouvernement illégitime au service des intérêts les
plus hostiles à la France, vous avez le devoir de collaborer avec le
peuple insurgé. Cessez d'obéir à des ordres manifestement illégaux !
Faites-vous portez pale, n'usez de la force que contre les réels
provocateurs et appariteurs, mais PROTÉGEZ les manifestants résolument
pacifiques. C'est votre devoir, vous êtes payés par le peuple pour cela.
Quant à mes camarades qui luttent partout en France, ne lâchez rien,
restez fermes sur la destitution de Macron et dans votre démarche
pacifiste, et politisez vous réellement. Pas au sens des partis ou des
idéologues, mais au sens d'une réelle éducation sur la monnaie,
l'économie, le droit ou la géopolitique, qui sont des disciplines
essentielles aux sciences politiques.
Structurez-vous. Ne laissez pas les casseurs ou les esprits s'interdisant toute réflexion ou tentative d'organisation, polluer le Mouvement. Restez courageux, l'issue est peut-être bien plus proche que chacun ne pourrait l'imaginer.
Avec ma fraternité résistante,
Sylvain Baron
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