lundi 19 juin 2017

Modèle scandinave

Le modèle scandinave (ou capitalisme scandinave ou social-démocratie scandinave) fait référence au modèle économique et aux modèles sociaux des pays scandinaves (Danemark, Norvège et Suède) conjuguant économie de marché et état-providence.
Bien qu’il existe des différences significatives entre les pays scandinaves, ils ont tous des points communs. Ceux-ci incluent le soutien “universel” à l'état-providence (par rapport aux autres pays développés) qui vise spécifiquement l’amélioration de l’autonomie individuelle, la promotion de la mobilité sociale et l’application universelle des droits de l’homme, ainsi que la stabilisation de l’économie, tout en soutenant le Libre-échange. Le modèle scandinave se distingue des autres types d’états-providence en mettant l’accent sur le plein-emploi, la promotion de l’égalité des sexes, des allocations sociales importantes et égalitaristes, une large redistribution des recettes et une politique budgétaire libérale expansionniste.
Le modèle scandinave est décrit comme un système combinant un capitalisme concurrentiel avec un secteur public important (environ 30% de la population active). En 2013, The Economist décrivait ces pays comme “des libres-échangistes robustes résistant à la tentation d’intervenir, même pour protéger leurs entreprises emblématiques”, tout en cherchant des moyens d’atténuer les effets les plus durs du capitalisme, et déclara que les pays scandinaves “sont probablement les mieux gouvernés du monde.” La combinaison scandinave d’importantes subventions sociales publiques et d’une culture de l’individualisme a été décrite par Lars Trägårdh, du Ersta Sköndal University College, comme de “l’individualisme étatiste.” Certains économistes décrivent le modèle scandinave comme une forme de capitalisme “en peluche” ayant des bas niveaux d’inégalités, des états-providence généreux et une concentration réduite des hauts-revenus. Ce modèle contrastant avec le capitalisme plus “sauvage” des États-Unis, aux fortes inégalités et à la forte concentration des hauts revenus.
Pourtant, le modèle scandinave n’est pas un système de politiques et de lois identique dans tous les pays ; chaque pays nordique possède son propre modèle socio-économique, parfois très différent de celui de ses voisins. Bien que les réformes libérales de la Suède aient réduit le rôle du secteur public durant ces dernières décennies, entraînant ainsi l’augmentation des inégalités la plus rapide de toutes les pays de l’OCDE, les inégalités de revenus en Suède restent néanmoins plus basses que dans la plupart des autres pays. Et permettant de remettre le pays sur la voie de la croissance, du désendettement et du chômage faible.

Présentation

L’ouvrage "The Nordic Model - Embracing globalization and sharing risks"  donne les caractéristiques de ce système :
  • Un filet de protection sociale sophistiqué, conjugué à des services publics comme la gratuité scolaire et la couverture maladie universelle.
  • Des droits de propriété forts, des poursuites en cas de rupture de contrat et en général une facilitation à la création d’entreprises.
  • Un régime des retraites public.
  • Peu d’entraves au libre-échange. Cela est combiné au partage collectif des risques (programmes sociaux, institutions du marché du travail) qui a fourni une forme de protection contre les risques associés à l’ouverture économique.
  • Une faible régulation du marché des produits. Les pays scandinaves sont les plus permissifs d’après les classements de l’OCDE.
  • Des niveaux de corruption bas. Selon l’Indice de Perception de la Corruption 2014 de l’ONG Transparency International, les cinq pays scandinaves étaient parmi les 12 pays les moins corrompus des 176 pays évalués, et le Danemark, la Finlande, la Suède et la Norvège faisaient partie du top 5.
  • Un fort pourcentage de travailleurs appartenant à un syndicat professionnel. En 2010, la densité des syndicats professionnels était de 69,9% pour la Finlande, 68,3% pour la Suède et 54,8% pour la Norvège. En comparaison, la densité des syndicats professionnels était de 12,9% au Mexique et 11,3% aux États-Unis. La faible densité de syndicats professionnels en Norvège s’explique principalement par l’absence du système Ghent depuis 1938. En revanche, le Danemark, la Finlande et la Suède ont tous des caisses de chômage dirigées par les syndicats.
  • Un partenariat entre les employeurs, les syndicats et le gouvernement, où ces partenaires sociaux négocient les textes régissant les conditions de travail entre eux plutôt qu’ils soient imposés par la loi. La Suède a décentralisé la coordination salariale, tandis que la Finlande est classée la moins flexible dans ce domaine. Les changements économiques ont fait naître la peur parmi les salariés et l’opposition des syndicats aux réformes. En même temps, les réformes et un développement économique favorable semblent avoir réduit le chômage qui était habituellement plus élevé. Au Danemark, les Socio-Démocrates ont réussi à faire passer des réformes en 1994 et 1996 (voir Flexisécurité).
  • Le PIB a 56,6% de la Suède, celui du Danemark a 51,7%, et celui de la Finlande a 48,6% reflètent des dépenses publiques très élevées. La principale raison de ces dépenses est le nombre important d’employés du secteur public. Ces employés travaillent dans des secteurs divers incluant l’éducation, la santé et le gouvernement. Ils bénéficient souvent d’un emploi à vie et représentent environ un tiers de la population active (plus de 38% au Danemark). Les dépenses publiques en aides sociales telles que les allocations chômage et les programmes de retraites anticipées sont élevées. En 2001, les allocations chômage fondées sur les salaires représentaient 90% du salaire au Danemark et 80% en Suède, en comparaison de 75% aux Pays-Bas et 60% en Allemagne. Les chômeurs pouvaient également toucher leurs d’allocations pendant plusieurs années sans qu’elles diminuent, tandis qu’elles baissaient plus rapidement dans d’autres pays.
  • Les dépenses publiques pour la santé et l’éducation sont significativement plus hautes au Danemark, en Suède et en Norvège en comparaison des moyennes de l’OCDE.
  • Généralement, l’incidence fiscale (en pourcentage du PIB) est parmi les plus hautes au niveau mondial ; Suède (51,1%), Danemark (46% en 2011), et Finlande (43,3%) comparé aux pays non-nordiques comme l’Allemagne (34,7%), le Canada (33,5%) et l’Irlande (30,5%).
  • Le World Happiness Report 2013 des Nations unies montre que les nations les plus heureuses se concentrent en Europe du Nord, avec le Danemark en tête de liste. Les scandinaves ont les scores les plus élevés en matière de PIB réel par habitant, d’espérance de vie, d’avoir quelqu’un sur qui compter, de liberté de choix de vie, de générosité et d’affranchissement de la corruption.
  • Les pays scandinaves ont reçu les scores les plus élevés selon l’index mondial des droits 2014 édité par la Confédération Syndicale Internationale, le Danemark étant la seule nation ayant reçu un score parfait.

Le modèle social scandinave

Le modèle social scandinave fait référence aux politiques sociales des pays scandinaves, qui se rattachent à leurs politiques du marché du travail.
Bien qu’il existe des différences entre les pays scandinaves, ils ont tous en commun un engagement fort pour la cohésion sociale, une protection sociale à caractère universel préservant l’individualisme en fournissant une protection aux individus et aux groupes les plus vulnérables de la société, et le développement maximal de la participation du public aux processus de décision sociaux. Ces derniers étant ouverts à la flexibilité et à l’innovation de la protection sociale. Les systèmes sociaux scandinaves sont principalement financés par l’impôt.
En dépit de valeurs communes, les pays scandinaves ont des approches pratiques de l’état-providence différentes. Le Danemark a fortement privatisé les services publics et la protection sociale tout en ayant une politique d’assimilation de l’immigration. Le modèle social Islandais est basé sur le bien-être au travail (voir Workfare) tandis que l’état-providence Finlandais donne au secteur volontaire un rôle à jouer significatif dans la fourniture de soins aux personnes âgées. La Norvège se repose davantage sur une protection sociale publique.

Réduction de la pauvreté

Le modèle scandinave a significativement réduit la pauvreté. En 2011 les taux de pauvreté, avant la prise en compte de l’effet de l’impôt et des transferts, était de 24,7% pour le Danemark, 31,9% pour la Finlande, 21,6% pour l’Islande, 25,6% pour la Norvège et 26,5% pour la Suède. Après la prise en compte de l’effet de l’impôt et des transferts, les taux de pauvreté pour la même année étaient respectivement de 6%, 7%, 5,7%, 7,7% et 9,7%, pour une réduction moyenne de 18,7 points de pourcentage. Comparé aux États-Unis, qui ont un taux de pauvreté avant l’impôt de 28,3% et après l’impôt de 17,4% pour une réduction de 10,9 points de pourcentage, les effets de l’impôt et des transferts sur la pauvreté dans tous les pays scandinaves sont considérablement plus importants. Pourtant, en comparaison avec la France (réduction de 27 points de pourcentage) et l’Allemagne (réduction de 24,2 points de pourcentage), l’impôt et les transferts dans les pays scandinaves sont en moyenne moins élevés.

Perspectives étrangères

Jerry Mander assimile le modèle scandinave à une sorte d’économie “hybride” présentant un mélange de visions capitalistes et socialistes. Lane Kenworthy recommande aux États-Unis de passer progressivement à un système économique similaire à celui des pays scandinaves.
Le sénateur américain Bernie Sanders, qui se décrit comme socio-démocrate, est un adepte fervent du système scandinave. Le Prix Nobel d’économie Joseph Stieglitz a remarqué que l'ascenceur social fonctionne mieux dans les pays scandinaves qu’aux États-Unis et soutient que la Scandinavie est désormais la terre d’opportunité que les États-Unis furent auparavant.
Selon Naomi Klein, l’ancien dirigeant soviétique Mikhail Gorbachev chercha à conduire l’URSS dans la même direction que le système scandinave, en combinant le libre-échange à un filet de protection sociale, tout en maintenant publics les secteurs clés. Une recette qu’il croyait capable de transformer l’URSS en un “phare socialiste pour toute l’humanité.”

12 commentaires:

Je a dit…

Le modèle scandinave est décrit comme un système combinant un capitalisme concurrentiel avec un secteur public important (environ 30% de la population active).

Je a dit…

Certains économistes décrivent le modèle scandinave comme une forme de capitalisme “en peluche” ayant des bas niveaux d’inégalités, des états-providence généreux et une concentration réduite des hauts-revenus.

Je a dit…

Un filet de protection sociale sophistiqué, conjugué à des services publics comme la gratuité scolaire et la couverture maladie universelle.

Je a dit…

Un régime des retraites public.

Je a dit…

Peu d’entraves au libre-échange.

Une faible régulation du marché des produits. Les pays scandinaves sont les plus permissifs d’après les classements de l’OCDE.

Je a dit…

Des niveaux de corruption bas.

Ceci étant peut-être corrélé avec la décentralisation, comme remarqué par "Le Minarchiste" dans "Analyse du modèle Scandinave" (http://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2017/06/analyse-du-modele-scandinave.html) :

"C’est ce qu’on s’attendrait à observer dans une société où le gouvernement est décentralisé (donc pas de haut-fonctionnaires ayant trop de pouvoirs), où la sous-traitance est fortement utilisée, où les fonctionnaires sont imputables et où l’État intervient peu dans le monde des affaires et dans le commerce."

Je a dit…

Un partenariat entre les employeurs, les syndicats (représentant entre 54,8% et 69,9% des travailleurs selon les pays) et le gouvernement, où ces partenaires sociaux négocient les textes régissant les conditions de travail entre eux plutôt qu’ils soient imposés par la loi.

Il faut néanmoins souligner que les conflits entre employeurs et employés existent parce que ces deux groupes ont des intérêts divergents.

Si employeurs et employés étaient les mêmes personnes, comme dans des entreprises autogérées, des coopératives, des cabinets d'associés, etc., l'origine même du conflit serait éliminée.

Ne pourrait-on pas envisager une société débarrassée de ses "parasites sociaux" : les propriétaires qui ne travaillent pas ? Une entreprise ne devrait-elle pas être la propriété de ses membres ? Une copropriété avec obligation de travailler effectivement dans l'entreprise.

Bernard Friot appelle cette notion la "propriété d'usage" (que ce soit pour les outils de production de richesses mais aussi pour les logements, etc.) qu'il distingue de la notion de "propriété lucrative".

A creuser !

Je a dit…

La part du PIB reflétant les dépenses publiques s'élève à 56,6% de celui de la Suède, à 51,7% de celui du Danemark, et 48,6% de celui de la Finlande a 48,6%.

La principale raison de ces dépenses très élevées est le nombre important d’employés du secteur public. Ces employés travaillent dans des secteurs divers incluant :
- l’éducation,
- la santé
- et le gouvernement.
Ils bénéficient souvent d’un emploi à vie et représentent environ un tiers de la population active (plus de 38% au Danemark).
Les dépenses publiques en aides sociales telles que les allocations chômage et les programmes de retraites anticipées sont élevées.

Je a dit…

Au Danemark, les Socio-Démocrates ont réussi à faire passer des réformes en 1994 et 1996 (voir Flexisécurité : facilité pour une entreprise à licencier un employé mais en compensation, forte couverture chômage).

En 2001, les allocations chômage fondées sur les salaires représentaient 90% du salaire au Danemark et 80% en Suède.

Je a dit…

Les dépenses publiques pour la santé et l’éducation sont significativement plus hautes au Danemark, en Suède et en Norvège en comparaison des moyennes de l’OCDE.

Je a dit…

Généralement, l’incidence fiscale (en pourcentage du PIB) est parmi les plus hautes au niveau mondial ; Suède (51,1%), Danemark (46% en 2011), et Finlande (43,3%).

Logique : c'est pour financer les dépenses élevées pour, entre autres, l’éducation,
la santé et le gouvernement.

Je a dit…

Jerry Mander assimile le modèle scandinave à une sorte d’économie “hybride” présentant un mélange de visions capitalistes et socialistes.