La coïncidence a beau être fortuite, elle est intéressante : le jour où Le Monde révèle que l'Elysée planche sur une réforme de grande ampleur du financement de la protection sociale afin d'alléger les charges qui pèsent sur les entreprises, Laurence Parisot pousse un cri de colère.
La présidente du Medef dénonce le « racisme anti-entreprise » qui « mine l'économie française ». Elle affirme que « l'angoisse des dirigeants d'entreprise est aujourd'hui à son comble ». Elle reproche à Arnaud Montebourq, le ministre du redressement productif, de s'en être pris à la famille Peugeot après l'annonce de la fermeture de l'usine d'Aulnay.
« Chaque patron s'est senti attaqué comme s'il en était un membre », assure-t-elle dans l'entretien qu'elle a accordé à L'Expansion sur un ton délibérément dramatique.
Jeu de rôle classique ? Pas seulement : il y a entre le pouvoir et les entreprises un contentieux qui, s'il n'est pas rapidement levé, risque de coûter cher au quinquennat de François Hollande.
Car les données objectives ne jouent pas en faveur des gouvernants : l'Etat est désarmé, obligé de se serrer la ceinture comme jamais, sous peine de voir les taux d'intérêt flamber.
Il ne dispose plus du levier de l'investissement public pour soutenir la croissance. Si les entrepreneurs privés ne se sentent pas encouragés à prendre le relais, il n'y a aucune chance pour que la croissance reparte et que la courbe du chômage commence à s'inverser fin 2013 comme l'a promis le président de la République.
François Hollande le sait mais pendant quatre mois il a fait de la politique, c'est-à-dire qu'il a mis en œuvre ce qu'il avait jugé bon de dire pendant la campagne pour se faire élire : il a massivement levé l'impôt sur les entreprises et sur les riches au moment du collectif budgétaire de 2012 puis du projet de budget 2013 parce qu'il avait promis aux classes moyennes qu'elles seraient épargnées.
Il a délibérément minoré la question du coût du travail parce que son rival Nicolas Sarkozy en avait fait son cheval de bataille en brandissant la TVA sociale que la gauche, à peine élue, s'est empressée d'abroger.
Aujourd'hui, c'est un virage à 180 degrés qui s'amorce dans une sorte de sauve-qui-peut : pour tenter d'enrayer la désindustrialisation du pays, le président de la République est prêt à alléger les charges patronales sur les salaires compris entre 1,6 et 2,2 fois le smic à hauteur de 8 à 10 milliards d'euros pendant la durée du quinquennat.
Qui paiera ? Essentiellement les ménages via un alourdissement prévisible de la CSG. A tout prendre, il aurait mieux valu le dire pendant la campagne électorale !
http://fressoz.blog.lemonde.fr/2012/10/03/sauve-qui-peut-lentreprise/#xtor=RSS-3208
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4 commentaires:
Hypocrisie classique de nos chers socialistes français ...
Ou le reflet de la schizophrénie d'un parti qui prétend aller de la social-démocratie à la dictature du prolétariat avec réquisition des moyens de production !
L'article dit (à juste titre) que "l'Etat est désarmé, obligé de se serrer la ceinture comme jamais, sous peine de voir les taux d'intérêt flamber. Il ne dispose plus du levier de l'investissement public pour soutenir la croissance."
Mais il n'explique pas pourquoi !
Le problème vient de la trahison des gouvernements successifs et en particulier de celui de Pompidou-Giscard qui ont transféré le pouvoir régalien de création monétaire aux banques privées (Pompidou a été directeur de la banque Rothschild pendant 15 ans avant de se lancer en politique). Cette trahison a ensuite été écrite dans la loi de 1973 en France, dans le Traité de Maastricht en 1992 (article 104) puis dans le Traité de Lisbonne de 2008 (article 123).
Au lieu d'emprunter à des banques privées avec un taux d'intérêt (la fameuse "charge de la dette"), un État digne de ce nom devrait créer la monnaie dont il a besoin puis en détruire l'excédent, pour éviter l'inflation, en collectant l'impôt.
Le choix des expressions "coût du travail", au lieu de dire "salaire", et "charges patronales", au lieu de dire "cotisation sociale" ou mieux encore "salaire différé", est révélateur de l'idéologie que soutient l'auteur de cet article.
C'est un capitaliste pour lequel une entreprise est avant tout une source de profit pour les actionnaires. Les travailleurs employés de l'entreprise sont perçus comme des fardeaux. Si on pouvait les payer beaucoup moins (par exemple en faisant travailler des Chinois au lieu de Français) ou les remplacer par des machines, il ne s'en porterait que mieux.
Cette idéologie a des limites. Qui va acheter les produits des entreprises si les salaires chutent et avec eux la capacité d'achat des consommateurs ?
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