Il y a tellement de négligences sur internet que l'écrit et ses codes semblent
être devenus obsolètes, ou n'appartenir désormais qu'à une élite. En tant
qu'enseignant (même si ce n'est que du premier degré), c'est difficile
d'accepter "la défaite", de renoncer. Mais j'avoue quand même que je fatigue
devant le manque de motivation de la quasi-totalité de mon
public.
Je me souviens qu'il y a quinze
ans, j'étais heureux de pouvoir lutter "à la base" contre la bêtise; la source
de tous les maux selon moi. Mais aujourd'hui, je déchante, et je pense beaucoup
à arrêter, à passer à autre chose. Je possède moins d'altruisme pour me
résumer.
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30 commentaires:
Je m'en suis un peu rendu compte le jour où ma sœur, qui enseigne en fac, a été obligée d'expliquer à ses élèves que non, le langage SMS n'était admissible dans leurs copies d'examen… et la plupart ne comprenaient pas pourquoi !
Bon courage !
J'ai moi-même participé à la correction de copies du concours d'entrée à l'IUFM (feu Institut Universitaire de Formation des Maîtres).
Et lu récemment un mémoire de Master 2 sur la lutte traditionnelle réunionnaise la croche.
AFFLIGEANT !
Non seulement l'orthographe n'est pas respectée mais en plus, certaines phrases sont des non-sens.
Quant au processus de démonstration de telle ou telle hypothèse dans le mémoire ... comment dire ... j'en aurais attendu mieux de la part d'un lycéen !
Je sens que leur adaptation au monde du travail va être douloureuse !
C'est là tout le problème : la coupure avec le monde du travail ! Certains n'y accèderont jamais et se contenteront de revenus sociaux (je parle de ceux qui sont en échec dès le début de leur scolarité et qui sont éjectés seulement à 16 ans), d'autres intègreront l'Education Nationale (un comble !) pour expliquer aux jeunes comment faire dans la vie active.
Qui plus est, l'idéologie gauchisante propre à l'Education Nationale considère largement le monde de l'entreprise négativement, les patrons étant bien évidemment des exploiteurs des masses laborieuses… et donc, que les principes enseignés aient pour but de favoriser l'accès au monde du travail ne saurait être que pure hérésie, la noblesse du savoir ne pouvoir résider que dans les connaissances pures et non dans leur application mercantile ! Moyennant quoi, ce fameux système "que tout le monde nous envie", comme chacun sait, contribue à un taux de chômage incompressible parmi les plus élevés au sein des pays comparables au nôtre…
L'image du "patron exploiteur" si ancrée dans l'idéologie de gauche est non seulement obsolète (en France) mais généralement fausse. Je veux dire par là que 95% des entreprises françaises sont de petites entreprises, de quelques individus ou dizaines d'employés tout au plus. Environ 90% des salariés travaillent au sein de ces toutes petites entreprises. Leurs patrons sont les vrais créateurs d'emploi. Je ne parle pas des 40 exceptions, du CAC 40, qui eux sont sur-diplômés, co-optés, et siégeant au sein de multiples conseils d'administration. Des gestionnaires financiers et non des créateurs d'entreprises et encore moins d'emplois.
J'en veux aux journalistes, qui possèdent les sources d'information neutres, de ne pas contrer ces idées reçues, de ne pas donner les vrais informations et de toujours privilégier le "scandale", la "polémique" au lieu de vraiment informer la population qui n'a pas forcément le temps de remonter à la source de l'information !
Il faut se souvenir que l'endoctrinement est déjà ancien ! Après la Seconde guerre, l'intelligentsia a été complètement phagocytée par les tenants du marxisme, avec en premier lieu Sartre, qui a réussi à étouffer toute éventuelle voix contraire (Raymond Aron est un des rares intellectuels de droite à avoir raisonnablement survécu à cette période)… l'URSS était alors présentée comme le paradis des travailleurs. Et quand les horreurs du stalinisme ont commencé à être un peu trop connues, c'est l'idéal maoïste qui a pris le relais au moment de mai 68… puis dans une certaine mesure le trotskisme, dénonçant les trajectoires de l'URSS et de la Chine comme des trahisons de l'idéal communiste, alors même qu'elles n'en étaient que la concrétisation : la "dictature du prolétariat" n'est pas une image mais un principe de base du marxisme ! 1981, la "rupture avec le capitalisme" était le fondement du programme commun ayant servi de support idéologique à la victoire de François Mitterrand !
Bref, on a dans la société française un matraquage idéologique remontant à plus de cinquante ans, assénant que la gauche représente la générosité et la possibilité de concrétiser une société plus juste, la droite l'égoïsme et l'exploitation des plus faibles…
http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/philippe-tesson/tesson-les-contradictions-de-madame-trierweiler-12-05-2012-1460877_543.php : cf. le dernier paragraphe ! On n'est pas près de s'en sortir !
Avec du retard (positivement, je dirais "du recul"), je viens de (re)lire notre conversation ci-dessus et j'ai enfin accédé au lien que tu me désignais. La totalité des élèves-journalistes a voté pour François Hollande ! C'est terrifiant ... Je n'ai pas d'autre mot.
J'assimile la pensée unique à la dictature, à l'intolérance.
Cf. plusieurs articles cette semaine pour évoquer la proposition de "la Droite forte" de promouvoir les journalistes de droite par souci d'équité au sein du service public. Et le ton, évidemment, de l'article de Rue 89 qui reprend cette info.
Le problème de l'idéologie en politique, comme du dogme en religion, c'est qu'il conduit à l'aveuglement.
Ainsi en est-il des journalistes qui, bien qu'au cœur de l'information, refusent de voir l'évidence : l'évolution de notre société française telle que décrite par les partis les plus à droite de l'échiquier politique tels que le Front National ou Debout la République .
Ainsi en est-il des enseignants qui refusent de modifier leurs comportements ; par exemple orienter les élèves en fonction des débouchés réels en termes d'emploi et non des vœux pieux des élèves, ou qui maintiennent des classes hétérogènes beaucoup plus difficiles à gérer au lieu de créer des classes homogènes qui permettraient d'être efficaces en termes d'enseignement ... tout ça par idéologie !
Ah, le collège unique et la réforme Haby… cela nous ramène à près de 40 ans en arrière, et aussi surprenant que cela puisse paraître, ce n'est pas un "acquis" de nos insupportables gauchistes mais un héritage du giscardisme ! Evidemment, aucun risque de compter sur la gauche au pouvoir pour soutenir une politique qui ne soit pas fondée sur un égalitarisme aveugle et castrateur… Par ailleurs, on a vu le résultat de toutes les tentatives de réforme un peu profonde de l'Education Nationale : fronde à tous les étages, et manifestations massives de défenseurs du statu quo, parents ou étudiants, embringués dans des actions de protestation qu'ils ne comprennent généralement pas par la seule magie du verbe de leurs enseignants préférés !
Egalitarisme aveugle et castrateur… sauf pour leurs enfants.
Mon petit garçon vient d'entrer en petite section de maternelle. Mon épouse et moi, nous l'avons inscrit dans une école privée proche de notre domicile. Et là : surprise ! Une proportion importante des élèves provient de ... parents enseignants !
Demi-surprise, j'espère : les mieux placés pour observer la déliquescence du système n'en sont-ils pas les observateurs internes ! Je soupçonne également que les enseignants sont certainement sur place parmi les populations aux revenus les plus favorables pour se permettre l'accès au système privé… La même chose est observée en métropole, avec en outre la capacité, au sein du public, à obtenir des dérogations massives à la fameuse carte scolaire qui impose en théorie l'affectation des enfants à un établissement selon l'adresse des parents… mais que les enseignants les plus égalitaristes contournent lorsqu'il s'agit de leur propre progéniture !
Je suis un grand naïf. Donc même à demi, surpris quand même.
Sept années ont passé depuis cette conversation ...
Depuis cette époque, j'ai beaucoup changé dans ma perception de la politique. Ma vision de la société s'est élargie et j'envisage une gamme beaucoup plus large des possibilités.
Pour en revenir à l'école, une question fondamentale : à quoi sert-elle ? Ou encore : à qui sert-elle ?
Le rôle de l'école est-il de préparer les élèves au monde du travail ?
Ou, comme l'affirme le Ministère de l’Éducation Nationale finlandais, son but est-il "le bonheur des enfants" ?
En France, dès les années 1830, François Guizot décrétait que l'école devait arracher les enfants à "l'influence néfaste de leurs familles".
Dans les années 1880, Jules Ferry enfonçait le clou en arrachant les élèves à l'influence de l’Église catholique; remplaçant massivement les enseignants religieux par des instituteurs et des institutrices laïques.
L'élève passait ainsi complètement sous la coupe de l’État.
Mais quelle était l'idéologie de l’État à cette époque ? Et aujourd'hui ?
Ernest Lavigne, dans "Questions d'enseignement national", en 1885 définissait ainsi la mission de l'école :
"Si l'écolier ne devient pas un citoyen pénétré du sentiment de ses devoirs et un soldat qui aime son fusil, l'instituteur aura perdu son temps."
Un citoyen et un travailleur obéissant, doublé d'un soldat prêt à tuer pour la patrie.
La IIIème République coloniale et industrielle affichait clairement ses intentions.
Est-ce que l'idéologie de l’État a réellement changé depuis le XIXème siècle ?
Mon interlocuteur de 2012 faisait référence au "collège unique et [à] la réforme Haby… cela nous ramène à près de 40 ans en arrière, et aussi surprenant que cela puisse paraître, ce n'est pas un "acquis" de nos insupportables gauchistes mais un héritage du giscardisme !"
Le nivellement par le bas, sous prétexte d'égalitarisme, ne serait donc pas une volonté de la soit-disant "gauche" et du Parti Socialiste ? Mais au contraire une volonté de Valéry Giscard d'Estaing, l'aristocrate, le complice des banques, l'auteur de la loi de 1973 Pompidou-Giscard dite "Rothschild", le rédacteur-en-chef du Traité Constitutionnel pour l'Union Européenne de 2005 devenu Traité de Lisbonne en 2008 ...
Je n'ai pas assez réagi à cette information à l'époque.
La réforme HABY de 1975
Le collège unique
Article 4 : "Tous les enfants reçoivent dans les collèges une formation secondaire. Celle-ci succède sans discontinuité à la formation primaire en vue de donner aux élèves une culture accordée à la société de leur temps. Elle repose sur un équilibre des disciplines intellectuelles, artistiques, manuelles, physiques et sportives et permet de révéler les aptitudes et les goûts".
Article 7 : "Des aménagements particuliers et des actions de soutien sont prévues au profit des élèves qui éprouvent des difficultés"
La loi HABY du 11 Juillet 1975 met fin à la ventilation des élèves à la sortie de l'école primaire entre les premiers cycles des lycées, les collèges, les collèges d'enseignement (CEG) et prévoie que tous les élèves issus du cours moyen seconde année (CM2) doivent entrer en sixième dans un collège unique et dans des classes hétérogènes destinées à éviter les effets de ségrégation, souvent sociale. Une démocratisation s'opère au plan qualitatif.
Elle s'inscrit dans le prolongement des réformes qui affectent la durée de la scolarité obligatoire et l'unification des enseignements post-primaire . La prolongation de la scolarité obligatoire jusqu'à 16 ans, une des grandes orientations de la réforme Berthoin (59), ne devient effective qu'en 1967; supprimant l'examen d'entrée en sixième, elle est à l'origine de la démocratisation de l'accès à l'enseignement secondaire. La réforme Fouchet (1963) organise l'orientation dans les collèges d'enseignement secondaire (CES) par la mise en place des classes de quatrième et troisième pratiques, qui constituent avec les classes de sixième et de cinquième de transition une filière de ségrégation scolaire et sociale.
La réforme Haby se caractérise d'abord par la suppression des filières de relégation : "les nouveaux collèges, qui se substituent aux classes de premier cycle des lycées, aux collèges d'enseignement secondaire et aux collèges d'enseignement général, sont désormais investis d'un double mission : donner à tous les jeunes français une même culture de base et préparer leur orientation".
L'orientation se fera désormais par le jeu des options choisies en quatrième, options d'enseignement général ou à caractère pré-professionnel. une évolution plus égalitaire dans sa forme que dans dans sa mise en œuvre concrète : supprimant les filières de l'intérieur, elle souligne les disparités entre collèges.
Après avoir rassemblé tous les élèves dans un même établissement (loi Haby de 1975), est venu le tour de la suppression des options et des disciplines "élitistes" à l'intérieur de ce même établissement (décret Vallaud-Belkacem de 2015); toujours sous des prétextes a priori positifs mais encore pour un nivellement par le bas.
Présentation de Wikipédia :
"La réforme de l'enseignement au collège de 2015 en France, couramment appelée « réforme du collège », est un projet porté par la ministre de l'Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem.
Le projet s'inscrit dans la poursuite de la refondation de l'École, un des axes du quinquennat de François Hollande, déjà engagée pour l'école primaire par la loi du 8 juillet 2013. Sans remettre en cause la notion de collège unique, la réforme vise à mieux assurer l'enseignement des savoirs fondamentaux en combinant les apprentissages théoriques et pratiques, en favorisant les projets interdisciplinaires, et en donnant une plus grande liberté pédagogique aux enseignants. L'objectif est une mise en place à la rentrée 2016.
En dépit des critiques exprimées par le personnel politique (y compris au sein du Parti socialiste), par de nombreux intellectuels, syndicats et associations, et malgré une large opposition des enseignants, le gouvernement choisit d'instituer la réforme par décret afin de « ne plus perdre de temps », suscitant les protestations de l'opposition de droite devant un « passage en force » qui coupe court au débat parlementaire."
Cette uniformisation de l'enseignement s'inscrit dans une démarche plus générale d'uniformisation de la pensée. Ainsi, les médias de masse véhiculent la même idéologie dite de "pensée unique" (politique et économique), les lois se multiplient pour restreindre l'accès à des informations objectives (loi "secret des affaires", loi "fake news" ...) et la dernière en date est la loi Blanquer dite "l'école de la confiance" qui se caractérise par son article 1 exigeant de la part des personnels le respect des institutions, c'est-à-dire l'interdiction de formuler des critiques même constructives.
Après l’article L. 111-3 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 111-3-1 ainsi rédigé : « Art. L. 111-3-1 . – Par leur engagement et leur exemplarité, les personnels de la communauté éducative contribuent à l’établissement du lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l’éducation. Ce lien implique également le respect des élèves et de leur famille à l’égard de l’institution scolaire et de l’ensemble de ses personnels. »
De plus, l'école devient obligatoire dès l'âge de 3 ans; pour que l’État ait une emprise sur les individus dès le plus jeune âge.
Le premier alinéa de l’article L. 131-1 du code de l’éducation est remplacé par les dispositions suivantes : « L’instruction est obligatoire pour chaque enfant dès l’âge de trois ans et jusqu’à l’âge de seize ans. »
Si on décrypte bien le langage juridique "lissé", on devine que l'objectif est d'obtenir une masse endoctrinée qui ne réfléchit pas et qui obéit à une "élite" au pouvoir depuis des générations (élite qui a ses propres circuits d'éducation, de formation, notamment la célèbre ENA : école nationale d'administration.)
Quelques citations historiques ci-dessous vont illustrer plus clairement cette affirmation.
NB : L'École Nationale d'Administration a été créée au lendemain de la seconde guerre mondiale par ordonnance du Gouvernement provisoire de la République française alors présidé par le Général de Gaulle.
Préparée par la Mission provisoire de réforme de l’administration animée par Michel Debré, alors maître des requêtes au Conseil d'État, l’ordonnance du 9 octobre 1945 (265,9 kB, PDF) entendait "refondre la machine administrative française", principalement en démocratisant le recrutement des hauts fonctionnaires d'État, grâce à la mise en place d’un concours d’accès unique à la Fonction publique.
Depuis, l'ENA a continuellement fait évoluer ses structures et ses enseignements afin de rester fidèle aux principes de 1945.
"Je ne connais pas d'autre dépositaire sûr du pouvoir suprême dans une société que le peuple lui-même, et si nous ne le pensons pas suffisamment compétent pour exercer son contrôle librement, le remède ne consiste pas à le lui retirer, mais à l'instruire."
Thomas Jefferson, Lettre à William Jarvis, 1820
"Je crois que nous ne nous entendons pas sur l'article du peuple, que vous croyez digne d'être instruit. J'entends par peuple la populace, qui n'a que ses bras pour vivre. Je doute que cet ordre de citoyens ait jamais le temps ni la capacité de s'instruire; ils mourraient de faim avant de devenir philosophes. Il me paraît essentiel qu'il y ait des gueux ignorants. Si vous faisiez valoir comme moi une terre, et si vous aviez des charrues, vous seriez bien de mon avis. Ce n'est pas le manœuvre qu'il faut instruire, c'est le bon bourgeois, c'est l'habitant des villes; [...] Quand la populace se mêle de raisonner, tout est perdu."
Voltaire, Lettre à M. Damillaville, 1er avril 1766, dans Oeuvres de Voltaire, Paris, éd. Lefèvre, 1828, tome 69, p.131
"L'éducation de masse fut conçue pour transformer les fermiers indépendants en instruments de production dociles et passifs. C'était son premier objectif. Et ne pensez pas que les gens n'étaient pas au courant. Ils le savaient et l'ont combattu. Il y eut beaucoup de résistance à l'éducation de masse pour cette raison. C'était aussi compris par les élites. Emerson a dit une fois quelque chose sur la façon dont on les éduque pour leur empêcher de nous sauter à la gorge. Si vous ne les éduquez pas, ce qu'on appelle l'éducation, ils vont prendre le contrôle - ils, étant ce qu'Alexander Hamilton appelait "la Grande Bête", c'est-à-dire le peuple. La poussée antidémocratique de l'opinion dans ce qui est appelé les sociétés démocratiques est tout bonnement féroce."
Noam Chomsky
L'interprétation des textes, a priori bienveillants, en volonté politique malveillante (c'est-à-dire de domination du peuple par une élite oligarchique) aurait pu sembler fantaisiste sans l'accès aux discours et lettres de correspondances privées des pères fondateurs de nos républiques modernes (le philosophe Voltaire, les politiciens Madison aux Etats-Unis, Sieyès en France, etc.).
Au XVIIIème siècle, il importait beaucoup moins de se cacher car l'immense majorité des gens du peuple ne savait pas lire; et n'avait donc pas du tout accès aux informations.
Avec le temps, les gouvernants ont appris à ruser, à imposer leur volonté de manière plus subtile et progressive.
Ainsi, George Orwell expliquait que "le langage politique est conçu pour donner aux mensonges des airs de vérité, rendre le meurtre présentable, et faire passer pour solide ce qui n'est que du vent."
Quelles alternatives existe-t-il ?
Maria Montessori, Francisco Ferrer, Célestin Freinet ou plus récemment Céline Alvarez ont fait des propositions. J'en ai présenté plusieurs aspects dans ce blog (liste non exhaustive) :
- L'éducation à la démocratie selon Maria Montessori (voir : https://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2018/07/leducation-la-demmocratie-selon-maria.html)
- Pédagogie libertaire (voir : https://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2018/07/pedagogie-libertaire.html)
- Escuela moderna ou École moderne (voir : https://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2017/06/escuela-moderna.html)
- Célestin Freinet (voir : https://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2017/03/celestin-freinet.html)
- Avec cette instit les enfants savent lire et compter dès 4 ans. Mais l’Éducation Nationale ne veut pas entendre parler de ses méthodes ! (voir : https://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2018/08/avec-cette-instit-les-enfants-savent.html )
Moi-même, je m'y suis essayé individuellement puis collectivement ...
Dans la deuxième partie de cet article Après Epicure - ou - De l'éthique individuelle à la politique collective (3), publié à l'adresse suivante http://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2017/06/apres-epicure-ou-de-lethique_16.html , je détaille le contenu des enseignements successifs par tranche d'âge en citant les penseurs qui ont influencé cette progression.
Je commence ainsi : "Parce que l'éducation est le socle sur lequel repose une société, [parce que c'est] la base d'une nation éclairée qui peut participer à la rédaction des lois et au fonctionnement des institutions, je vais développer ci-dessous ce que pourrait être "l'éducation idéale" condition sine qua non de l'édification de la "société idéale".
Je précise néanmoins que :
A la question, "L'éducation doit-elle se limiter à l'instruction ou inclure une morale imposée ?", j'adhère complètement au point de vue de Condorcet :
"Aucun pouvoir public ne doit avoir l'autorité, ni même le crédit, d'empêcher le développement de vérités nouvelles, l'enseignement des théories contraires à sa politique particulière ou à ses intérêts momentanés."
L'éducation idéale fournie par L’État devra donc se limiter à de l'instruction.
Elle s'articulera sur quatre classes d'âge.[...]
Depuis le soulèvement des "gilets jaunes" (fin 2018 début 2019), alors que j'étais déjà "gentils virus de la démocratie", j'ai rejoint les "gilets jaunes". En assemblée régionale, nous avons réfléchi sur différents thèmes et l'éducation (fondamentale pour définir la société de demain) n'a bien entendu pas échappé à nos réflexions.
Voici le consensus rédigé (en deux temps) par le groupe « éducation » : Comment penser l'éducation, l'école, dans la spécificité réunionnaise pour bâtir une société plus juste ?
Proposition de consensus par Jérôme (greffier)
Les écoles actuelles sont concentrationnaires, avec des classes d'âge figées, des activités horaires décidées par la hiérarchie et un contenu trop théorique.
Il faudrait recenser ce qui existe d'alternatif, (de la méthode Freinet à l'école publique finlandaise -où le mot d'ordre est le bonheur des enfants- en passant par l'école démocratique) mais aussi dans les dispositifs de l’Éducation Nationale existants (parents délégués, café des parents …)
L'école doit être ouverte :
1- pour laisser entrer les parents qui viendront partager leurs compétences et, au passage, se revaloriser
2- mais aussi pour que les enfants puissent aller voir ce qui se passe en dehors, dans la nature et dans le monde professionnel, dès le plus jeune âge.
A l'intérieur, l'école doit laisser la liberté aux enfants de choisir leur rythme, les matières étudiées, les activités (y compris très pratiques comme le rangement, le ménage, la vaisselle …)
A la Réunion, il faut prendre en compte certaines spécificités :
- la langue créole qui est maternelle dans la plupart des familles
- les difficultés économiques et sociétales lourdes (100.000 illettrés, 43 % vivant sous le seuil de pauvreté, soit plus de 300.000 personnes …)
- mixité culturelle, héritage culturel réunionnais
Consensus collectif
Les écoles doivent être de petites structures, ouvertes aux parents (avec participation en co-éducation) et aux professionnels multiples.
Prise en compte de la langue créole, de la spécificité culturelle créole.
Enseignement par l'expérience ; le « tâtonnement expérimental » comme disait Freinet.
Intégralité des débats sur Compte rendu de la Rencontre Citoyenne #2 du dimanche 21 avril 2019 : https://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2019/05/compte-rendu-de-la-rencontre-citoyenne.html
Fait intéressant, porteur d'espoir, c'est que l'éducation ne s'arrête pas avec la jeunesse. On peut continuer à apprendre une fois adulte comme en témoignent les expériences de Jacques Testart relatées dans son livre "Humanitude" et en partie reprises dans "Notre cause commune - Instituer nous-mêmes la puissance politique qui nous manque" d'Etienne Chouard, pages 33-34 :
"L'élection est une pédagogie de la servitude, un apprentissage de la résignation, elle enferme les électeurs dans un rôle de dominés. En les infantilisant, l'élection déresponsabilise les électeurs.
Au contraire, le tirage au sort émancipe les citoyens, en les traitant en adultes responsables. Et en général, les gens essaient d'être dignes de la confiance qu'on leur fait, surtout si on leur confie une vraie responsabilité. Les expériences de convention citoyennes tirées au sort organisées par Jacques Testart montrent que le niveau monte vite quand on respecte et implique vraiment les gens.
Jacques Testart : "Ce qui est extraordinaire quand on s'intéresse aux conférences de citoyens (tirés au sort et chargés de donner un avis sur l'enjeu politique et social d'un sujet scientifique), c'est de voir à quel point les individus peuvent être modifiés au cours de la procédure. Vous prenez une boulangère, un instituteur, bon des gens qui ont leur métier et qui a priori sont innocents, naïfs par rapport au problème. Ce n'est pas tellement qu'ils deviennent compétents, cela est évident. C'est surtout qu'ils deviennent une autre qualité d'humain. C'est-à-dire qu'ils développent des idées et des points de vue, qu'ils vont défendre leur avis, qu'ils ne sont pas du tout là pour défendre leur famille, même pas leurs enfants mais la descendance de tout le monde ... On voit une espèce d'altruisme qui transparaît, qu'on ne voit pas d'habitude.
Et moi, ce que j'ai constaté en regardant ça, c'est à quel point il y a un gâchis de l'humanité. C'est-à-dire qu'on maintient les gens dans un état d'abêtissement, de suivisme, de conditionnement. Et je dois dire que je n'y croyais pas avant de voir ça. Je pensais que c'était triste mais que l'humanité n'était pas belle à voir. Mais elle n'est pas belle à voir parce qu'on la met dans cet état-là. Je suis maintenant convaincu qu'il y a des ressorts chez la plupart des individus, quelque chose que l'on n'exploite pas, qu'on n'utilise pas, qu'on ne met pas en valeur. Mais les humains valent beaucoup mieux que ce qu'on en fabrique."
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