vendredi 6 juillet 2012

Polyandrie, patriarcat, famille nucléaire ...

Emmanuel Todd parle un peu de quelques pays d'Asie du Sud :

Par exemple, en observant aux deux extrémités de l'Inde de petites communautés attachées à la polyandrie (une femme mariée à plusieurs hommes), j'en déduis que ce système pour le moins atypique a été autrefois répandu sur une grande partie de l'Inde avant d'être refoulé à la périphérie.
Il y en a surtout au sud, comme les Todas (Dravidiens d'un plateau du pays tamoul) et juste à côté dans le Kérala. Il parle aussi de Sri Lanka mais pense peut-être aux Nas du Tibet ?

L'idée d'une polyandrie indienne archaïque joue un rôle important dans le Mahābhārata où la même princesse Draupadi épouse les 5 frères Pāṇḍavaḥ simultanément.

Todd semble avoir dans des extraits quelques passages presque bachofeniens sur des structures archaïques plus féminines et il attribue même les facteurs de blocage des communautés du Moyen-Orient à un développement du patriarcat.
La Chine est actuellement en phase de rattrapage, mais je doute qu'elle aille au-delà, car elle est trop handicapée par ses structures familiales et le statut accordé aux femmes.

[...] La famille nucléaire est propice à l'épanouissement des facultés individuelles, hors de toute contrainte sociale. L'Angleterre hier, les Etats-Unis aujourd'hui, en sont un bon exemple. Peut-être demain… l'
Indonésie, qui a également une structure familiale de type nucléaire, avec une relative égalité entre les hommes et les femmes et donc, si étonnant que cela paraisse, de bonnes prédispositions à l'innovation.
Todd aime bien jouer des prophéties paradoxales après sa thèse que l'Europe pouvait redevenir importante (L'Invention de l'Europe, 1990, et Après l'Empire, 2002), annoncer un essor de la famille nucléaire égalitaire indonésienne paraît plus original (il compare aussi le système anglais avec les Philippines).

Un problème de son "déterminisme" est que l'Ethiopie aussi a des groupes à famille nucléaire égalitaire, je crois. Mais il aura peut-être d'autres facteurs ad hoc dans le second volume sur l'Afrique pour expliquer que l'Ethiopie ne soit pas une exception démocratique (son premier volume n'est consacré qu'à l'Eurasie). Et comme il abandonne le structuralisme de son cousin Claude Lévi-Strauss pour une forme de diffusionnisme historique, il pourra toujours introduire de la contingence dans son système.

SourceSystème démographique en Inde et Indonésie

3 commentaires:

Je a dit…

Johann Jakob Bachofen (22 December 1815 – 25 November 1887) was a Swiss antiquarian, jurist, philologist, anthropologist, and professor for Roman law at the University of Basel from 1841 to 1845.

Bachofen is most often connected with his theories surrounding prehistoric matriarchy, or Das Mutterrecht, the title of his seminal 1861 book Mother Right: an investigation of the religious and juridical character of matriarchy in the Ancient World. Bachofen assembled documentation demonstrating that motherhood is the source of human society, religion, morality, and decorum. He postulated an archaic "mother-right" within the context of a primeval Matriarchal religion or Urreligion.

Bachofen became an important precursor of 20th-century theories of matriarchy, such as the Old European culture postulated by Marija Gimbutas from the 1950s, and the field of feminist theology and "matriarchal studies" in 1970s feminism.

Je a dit…

Das Mutterrecht

Dans Das Mutterrecht (Le Droit maternel, 1861), il confronte les mythes grecs et les données historiques laissées par les auteurs anciens, dont il déduit, à la suite de Joseph François Lafitau (Mœurs des sauvages Américains comparées aux mœurs des premiers temps) la possibilité qu'aient existé des sociétés de type matriarcal en Grèce antique. Il se fonde essentiellement sur le témoignage d'Hérodote au sujet des pratiques matrilinéaires de Lycie, sur le mythe des Amazones ou encore sur des cultes athéniens dédiés à la Nature.

Les thèses de Bachofen s'articulent autour de deux grands principes. D'abord, Bachofen est l'un des premiers auteurs à évoquer une domination du principe féminin (« Grande déesse ») dans la religion des premières sociétés humaines : la Déesse est l'incarnation de la vie et de la prospérité. Ainsi, en Grèce antique, le panthéon primitif grec aurait été dominé par des divinités féminines avant que les hommes ne s'emparent du pouvoir religieux — fondant ainsi le patriarcat, établissant en lieu et place du culte de la Déesse les cultes de l'époque classique. L'archéologie a depuis mis au jour de nombreux artefacts préhistoriques témoignant d'un culte des organes génitaux féminin.

Deuxièmement, pour Bachofen, l'époque primitive est l'ère de la « gynocratie du droit maternel », où l'hérédité du pouvoir se transmet de mère en fille. La vie sociale apparaît selon lui dans la promiscuité des temps préhistoriques : seule la maternité peut être prouvée. Au reste, les fonctions respectives des deux sexes dans la procréation et la maternité sont mal connues des primitifs, qui conçoivent une sorte de parthénogenèse relevant du surnaturel, dont le corps de la femme est le dépositaire. Selon l'aspect romantique de la théorie de Bachofen, les femmes se libèrent de la tyrannie des caprices sexuels masculins par le biais du pouvoir de la religion.

Je a dit…

Le diffusionnisme est, en anthropologie et sociologie, une appréhension des cultures humaines par leur distribution dans l'aire, leur historicité et les dynamiques géographiques associées. Le diffusionnisme va s'institutionnaliser en tant que courant de pensée à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle notamment en Allemagne, en Angleterre et aux États-Unis. Première critique de l'évolutionnisme, le diffusionnisme est considéré comme la deuxième grande théorie anthropologique après celle-ci.

Théorie

Postulat

Selon cette théorie, l'évolution de l'humanité ne se fait pas selon une logique évolutioniste monolinéaire mais plutôt plurilinéaire : au niveau géographique, les cultures développent leurs propres jeux de connaissances, puis avec le jeu des flux migratoires humains, les connaissances se rencontrent et s'enrichissent à la hauteur de l'échelle géographique de la diffusion. Le rôle du diffusionnisme est alors d'étudier les transmissions inter-culturelles entre foyers de diffusion pour comprendre les phénomènes d'hybridation des connaissances qui composent l'évolutionisme.

Cette approche rompt avec les problématiques évolutionnistes. Il n'est en effet plus possible de se réclamer de la conception du progrès héritée de l'évolutionnisme d'alors qui voit dans les transformations culturelles et sociales des inventions parallèles et convergentes résultant d'une unique loi d'évolution des sociétés humaines.

Cependant, le diffusionnisme n'exclut pas forcément une conception évolutionniste de l'histoire. Il ne fait que remplacer le parallélisme et la loi des évolutions convergentes par une théorie des diffusions des traits culturels. Ainsi, si le diffusionnisme put servir de vecteur critique de tout évolutionnisme postulant une hiérarchie des sociétés (aux États-Unis notamment), il s'en accommoda ailleurs assez facilement.

Méthode

Le diffusionnisme insiste donc sur la théorisation des contacts interculturels. Cela donna lieu à un grand nombre d'études comparatives et cartographiques, ayant le plus souvent pour but d'établir la séquence de filiation d'un fait culturel et de circonscrire le « foyer culturel » dans lequel aurait émergé l'élément en question. La constitution de cartes géographiques porteuses d'un savoir anthropologique va tenir une place importante dans les méthodes du diffusionnisme.