lundi 30 juillet 2012

Le maire de Saint-Leu autorise la pêche aux requins

«La chasse au requin bouledogue est autorisée, par tous moyens, y compris par chasse sous-marine, de jour comme de nuit, sur tout le territoire maritime de la commune de Saint-Leu, placé sous la responsabilité du maire au regard du code général des collectivités territoriales (du rivage jusqu'à une limite fixée à 300 mètres à compter de la limite des eaux)», dit l’arrêté.

Il est précisé que «les requins bouledogues devront être remis aux services de la commune sur le port de plaisance de la ville» et que «la commune achète les requins bouledogues de plus d'un mètre cinquante obtenus par tous pêcheurs ou chasseurs, au départ de la ville de Saint-Leu, au prix de deux euros par kilogramme de poids vifs, dans la limite de trente requins bouledogue à compter de la publication du présent arrêté».

Dans son arrêté, le député-maire de Saint-Leu explique autoriser la chasse au requin suite à «la recrudescence des attaques mortelles ou mutilantes des requins bouledogues sur les usagers du rivage de l’Ouest de La Réunion depuis 2011» et suite à «la présence de requin bouledogue dans la ravine du Grand Etang, du centre-ville de Saint-Leu en 2012». Il signale aussi qu’il y a «urgence d’assurer une protection minimum des usagers de la mer le long du littoral de la commune de Saint-Leu, à défaut d’être contraint d’interdire totalement l’accès à la mer aux usagers en raison des risques établis d’attaques mortelles de requin de type bouledogue».

Pourtant l'arrêté du maire saint-leusien va à l'encontre du dispositif légal de protection mis en place par l'État dans le cadre de la protection de la réserve marine. Interrogé par Imaz Press Réunion ce lundi 30 juillet, Thierry Robert se défend : «j’ai eu le courage d’avoir essayer quelque chose. Si un accident se produit à Saint-Leu, ma responsabilité n’est plus engagée. En effet, un moment précis, j’ai pris une décision. Le plus important est d’assumer».

Le maire de Saint-Leu dit également croire en «très peu de solutions concrètes» malgré les nombreuses études sur les squales en cours.

À la question de savoir si l’autorisation de la pêche aux requins bouledogues est la meilleure des solutions, Thierry Robert considère qu’«il n’y en a pas de bonnes ou mauvaises». «C’est très simple, entre la vie d’un homme et un requin, je choisis la vie. C’est un avis que j’assume parfaitement. Je comprends les critiques, j’écoute, je prends et j’analyse», poursuit-il.

Par ailleurs, les réactions suite à cet arrêté ne se sont pas faites attendre. «C’est du grand n’importe quoi», s’indigne Mickaël Rard, président de l’observatoire marin de La Réunion. Il pointe du doigt un «arrêté qui va à l’encontre de celui pris par le préfet interdisant le rejet en mer de produits de la mer à l'intérieur des 2,5 milles nautiques dans les eaux territoriales de La Réunion». Il indique ensuite que «tuer les requins ne servira à rien puisque ces derniers reviendront» et «les tuer sur place les attireront davantage». «Dans le cadre du développement durable, l’activité de l’homme doit se faire en harmonie avec la nature», ajoute-t-il.

«Pourquoi cet acharnement sur la réserve marine et sur les requins bouledogues ? Pourquoi autant de virulence et un tel retour de force alors que des programmes sont en cours et des fonds ont été investis ?, s’interroge, pour sa part, Stéphane Girard, coordinateur de l'organisation non gouvernementale Sea Sheperd à La Réunion. Il cite notamment l’étude CHARC qui porte sur les comportements des squales et le projet BIOTOP du conseil régional. «Où est l’urgence d’un tel arrêté?», note-t-il encore, avant de souligner «comprendre la mort du jeune Alexandre à Trois-Bassin». «Cela n’amuse personne, y compris Sea Sheperd», déplore-t-il.

Le coordinateur de l’ONG se dit ensuite très surpris que le député-maire de Saint-Leu veuille «acheter les requins bouledogues au prix de deux euros par kilo». Il rappelle que si «cela à consiste à revendre, la chair de requin est interdite à la consommation». «Une partie de la viande sera destinée aux scientifiques pour des prélèvements dans le cadre d'études et le reste à l'équarrissage», explique, pour sa part, Thierry Robert.

Stéphane Girard précise «avoir contacté la responsable de Sea Shepherd France qui a alerté les services juridiques». «Nous laissons le soin au préfet de prendre une décision et nous tiendrons informer nos concitoyens, à commencer par les pêcheurs qui se retrouveraient dans l’illégalité», explique-t-il, avant d’ajouter : «Est-ce une grande provocation pour faire bouger les lignes ou un test à destination du préfet ?».

À noter que la préfecture n'a pas encore réagi officiellement. Toutefois, on prône que si l'illégalité de cet arrêté est prouvé, ce sera au tribunal administratif de trancher.

Pour rappel, le jeudi 26 juillet 2012, à l’appel de la ligue de surf, et des associations Prévention Requin Réunion et Océan Prévention, environ 300 personnes sont venues manifester devant la préfecture pour réclamer le lancement d’une campagne de prélèvement de requins dans les eaux réunionnaises. Ce dimanche 29 juillet 2012, ces mêmes usagers de la mer avaient renouvelé leur appel lors d'un rassemblement sur la plage des Brisants à Saint-Gilles. Thierry Robert était venu leur apporter son soutien. C'est la mort d'Alexandre Rassiga, un surfeur de 21 ans, tué par un requin ce lundi à Trois Bassins qui était à l'origine du mouvement de protestation.

Source : Imaz Press Réunion

2 commentaires:

Je a dit…

Si les requins mettent en danger de mort les humains à quelques dizaines de mètres des côtes, il est naturel de se protéger. D'après mes informations, les requins bouledogues sont sédentaires. La dizaine ou douzaine qui occupe nos côtes doit être éliminée. C'est une question de vie ou de mort.

Maintenant, les causes de cette présence sont à élucider. Est-ce parce qu'ils n'ont plus rien à manger au large ? Surpêche ? Ou est-ce le parc marin qui les attire ? Ou les déchets déversés dans l'océan par les humains ? Il faut bien sûr comprendre pour que de nouveaux requins ne viennent pas immédiatement remplacer ceux qu'on éliminerait.

Sur la décision de Thierry Robert, se mettre hors-la-loi est "délicat" pour un élu ! Est-ce une sorte de désobéissance civique face à une loi qui ne protège plus les citoyens ? Y a-t-il arrière-pensée électorale ? Quand ont lieu les prochaines élections ?

Anonyme a dit…

Légalement, c'est compliqué : bien évidemment, un maire n'a pas autorité pour prendre un arrêté qui aille contre un texte législatif national, mais il peut arguer du fait qu'il n'a fait qu'appliquer l'obligation légale qu'il a de protéger les biens et les personnes, contre un danger qui a ici été hélas bien avéré…