vendredi 21 juillet 2017

Monnaie locale

Une monnaie locale est, en sciences économiques, une monnaie non soutenue par un gouvernement national (qui n'a pas nécessairement cours légal), et destinée à n'être échangée que dans une zone restreinte. Les monnaies de ce type sont également appelées monnaies complémentaires. Elles prennent de nombreuses formes, aussi bien matérielles que virtuelles. Parler de monnaie locale, c'est s'inscrire dans un discours économique particulier. Il en existe plusieurs milliers dans le monde et plusieurs dizaines en France (Sol-violette à Toulouse, Stück à Strasbourg, etc.).

Histoire

La banque libre est l'environnement économique des monnaies locales. Les monnaies locales les plus connues de l'ère moderne sont les jetons de salaire émis par des entreprises pour payer les travailleurs, et les jetons de certains commerces pour favoriser la loyauté de leurs clients. Au dix-neuvième siècle et au début du vingtième, les défaillances des banques nationales durant les crises ont fréquemment créé une forte demande de liquidités, à laquelle satisfaisaient les monnaies de nécessité créées par les chambres de commerce, des municipalités, des entreprises et des commerçants. Ces monnaies étaient généralement destinées à être rachetées en monnaie nationale à une date ultérieure.
Quelques-unes de ces monnaies, néanmoins, menèrent à la mise en place d'un système monétaire à part entière. L'idée d'utiliser la banque libre pour produire une monnaie de rechange à usage communautaire remonte au moins aux coopératives d'épargne et de crédit allemandes, dans les années 1800. Les plus anciens émetteurs de monnaie locale toujours en usage sont la Banque WIR de Suisse et ce qu'on pourrait désigner comme les banques syndicales du Japon.
Le terme monnaie complémentaire est un hyperonyme de monnaie locale. Mais les deux termes sont souvent utilisés indifféremment. Dans l'usage courant, monnaie locale ne désigne pas une monnaie soutenue au niveau national, mais une monnaie à usage local exclusivement.
Ses défenseurs, comme Jane Jacobs, soutiennent que ce type de monnaie permet à une région économiquement morose, voire déprimée, de se remettre d'aplomb, en donnant aux habitants un moyen de paiement contre des biens et des services localement produits ou assurés. D'une manière générale, il s'agit de la fonction essentielle de toute monnaie. Cependant, les monnaies locales fonctionnent généralement dans des régions géographiques relativement petites et elles encouragent le recyclage en favorisant la réduction des émissions de carbone liées au transport et à la fabrication des biens. En ce sens, elles font partie de la stratégie économique de nombreux groupes écologiques orientés vers des pratiques de vie durable, comme par exemple le parti vert de l'Angleterre et du pays de Galles.
Les monnaies locales voient parfois le jour dans des situations de tourmente économique touchant la monnaie nationale. La crise économique argentine de 2002 en fournit un exemple : les certificats de reconnaissance de dettes, sans prise d'intérêt et en petites coupures, mis en circulation par les administrations locales adoptèrent rapidement, et avec succès, certaines des caractéristiques des monnaies locales.
Le recours à des monnaies locales pour doper les économies régionales est fermement défendu par l'institut Instrodi des Pays-Bas.

Monnaies locales historiques

L'expérience de Wörgl qui fut conduite de juillet 1932 à novembre 1933 est un exemple classique de l'efficacité potentielle des monnaies locales. Wörgl est une petite ville d'Autriche de 4 000 habitants qui introduisit un système de bon local durant la Grande Dépression. En 1932, le taux de chômage à Wörgl avait augmenté de 30 %. Le gouvernement local avait accumulé des dettes d'une montant d'1,3 million de schillings autrichiens (ATS) alors que les réserves en liquidité correspondaient à 40 000 ATS. La construction locale et l'entretien municipal étaient au point mort.
À l'initiative du maire de la ville, Michael Unterguggenberger, le gouvernement local imprima 32 000 bons-travail portant un taux d'intérêt négatif de 1 % par mois (monnaie fondante), et pouvant être convertis en schillings pour 98 % de leur valeur faciale. Un montant équivalent en schilling était déposé à la banque locale pour couvrir les bons en cas de rachat en masse et de réclamation des intérêts par le gouvernement. Les bons circulèrent si rapidement, que seuls 12 000 d'entre eux furent en fait mis en circulation. Selon les rapports du maire et d'économistes d'alors qui étudièrent cette expérience, le système de bons fut facilement accepté par des marchands locaux et la population locale. Les bons permirent de réaliser pour 100 000 ATS de projets de travaux publics incluant la construction et la réparation de routes, de ponts, de réservoirs, de systèmes de drainage, d'usines et de bâtiments. Le bon eut également cours légal pour le paiement des taxes locales. Pendant l'année où la monnaie fut en circulation, elle circula 13 fois plus vite que le shilling officiel et servit de catalyseur à l'économie locale. Les lourds arriérés en impôts locaux se réduisirent de façon significative. Les recettes du gouvernement local s'élevèrent de 2 400 ATS en 1931, à 20 400 en 1932. Le chômage fut éliminé, alors qu'il demeura très élevé dans le reste du pays. Aucune hausse des prix ne fut observée. S'appuyant sur le succès significatif de l'expérience de Wörgl, plusieurs autres communautés introduisirent des systèmes de bons similaires.
En dépit des bénéfices tangibles du programme, il se heurta à l'opposition du parti socialiste régional, et à l'opposition de la banque centrale autrichienne, qui y vit une violation de ses pouvoirs sur la monnaie. Il en résulta une suspension du programme, le chômage se développa à nouveau, et l'économie locale dégénéra bientôt au niveau d'autres communautés du pays.
Parmi d'autres documents historiques bien documentés, l'on trouve :

Caractéristiques

Avantages

L'expérience de Wörgl illustre de manière significative quelques-unes des caractéristiques communes, et principaux avantages, des monnaies locales. Tout d'abord, les monnaies locales ont tendance à circuler beaucoup plus rapidement que les monnaies nationales. La même quantité de monnaie en circulation est employée davantage de fois et entraîne une activité économique globale beaucoup plus importante. Elle produit de plus grands bénéfices par unité. La plus grande vélocité de la monnaie est le résultat d'un taux d'intérêt négatif qui encourage les gens à dépenser la monnaie plus rapidement.
Ensuite, les monnaies locales permettent à une communauté d'utiliser pleinement ses ressources productives existantes, tout spécialement la force de travail inemployée, ce qui a un effet catalytique sur le reste de l'économie locale. Elles sont fondées sur le postulat que la communauté n'utilise pas pleinement ses capacités de production, par manque de pouvoir d'achat local. La monnaie alternative est utilisée pour augmenter la demande, d'où une plus grande exploitation des ressources productives. Pour autant que l'économie locale fonctionne en deçà de sa pleine capacité, l'introduction d'une monnaie locale n'a pas besoin d'être inflationniste, même quand il en résulte une augmentation significative du volume total de monnaie et de l'activité économique totale.
Puisque les monnaies locales ne sont acceptées qu'au sein de la communauté, leur usage encourage l'achat de biens et de services produits localement et valables localement. Ainsi, quel que soit le niveau d'activité économique, la plupart des bénéfices vont enrichir la communauté, et une part moins importante est drainée hors de la communauté, vers d'autres parties du pays ou du monde. Par exemple, le travail de construction entrepris avec des monnaies locales emploie de la force de travail locale et utilise autant que possible des matériaux locaux. Cette amélioration du tissu local devient une incitation pour l'acceptation et l'utilisation des bons par la population locale.
Enfin, certaines formes de monnaie complémentaire permettent de promouvoir une utilisation plus complète des ressources sur une zone géographique beaucoup plus large et aident à s'affranchir de l'obstacle de la distance. Le système Fureai Kippu au Japon distribue des crédits en échange d'aide pour les citoyens seniors. Les membres de la famille qui vivent loin de leurs parents peuvent gagner des crédits en offrant assistance à une personne âgée de leur communauté locale. Les crédits sont alors transférés à leurs parents ou convertis par eux pour une aide locale. Les points de fidélité des compagnies d'aviation sont une forme de monnaie complémentaire qui encourage la fidélité du client en échange de vols gratuits. Les compagnies aériennes offrent la plupart de leurs bons pour des sièges sur les vols moins fréquentés, où des sièges demeurent en général libres, fournissant ainsi au client un avantage dont le coût est relativement bas pour la compagnie.
Alors que la plupart de ces monnaies sont restreintes à une zone géographique réduite, ou à un pays, grâce à Internet, des formes de monnaie complémentaire peuvent être utilisées pour stimuler des transactions sur une base globale. En Chine, les pièces QQ de Tencent sont une forme virtuelle de monnaie qui circule à présent de manière étendue. Les pièces QQ peuvent être achetées avec des Renminbi et utilisées pour des achats de produits et services virtuels comme des sonneries de téléphone et du temps d'accès à des jeux vidéo en ligne. Il est également possible de les obtenir en utilisant un service en ligne d'échange de biens et de services pour environ deux fois le prix en Renminbi, échange pour lequel de la "monnaie" additionnelle est directement créée. Bien que les monnaies virtuelles ne soient pas "locales" au sens traditionnel du terme, elles pourvoient bien aux besoins spécifiques d'une communauté particulière, dans ce cas une communauté virtuelle. Une fois en circulation, elles viennent s'ajouter au pouvoir d'achat effectif total des populations en ligne, comme dans le cas des monnaies locales.
La société n'utilise qu'une faible part de ses ressources et de ses opportunités. Pratiquement chacun possède des connaissances sous-employées, des aptitudes et du temps qui peuvent être utilisées de manière productive. La plupart des fabricants et des services ont des machines ou des capacités sous-employées. Les monnaies complémentaires sont un moyen créatif de révéler ce potentiel social inexploité.

Difficultés

Une difficulté courante émergeant avec de nombreuses monnaies locales est l'accumulation de monnaie, qui avec la remise soudaine dans le circuit financier de cette masse monétaire, crée de l'hyperinflation. Cela est particulièrement susceptible d'arriver quand la monnaie locale n'est pas échangeable en monnaie nationale et qu'il n'y a que quelques vendeurs de produits de première nécessité (comme la nourriture ou le logement) qui acceptent la monnaie locale pour paiement partiel ou en totalité.

Monnaies locales modernes

L'utilisation de monnaies locales a fortement augmenté dans les vingt dernières années. Aujourd'hui, plus de 2 500 systèmes de monnaie locale sont utilisés à travers le monde. L'un des plus en vue est le SEL, le Système d'Échange Local, un réseau d'échange supporté par sa propre monnaie interne. Démarré à l'origine à Vancouver, au Canada, plus de 30 systèmes SEL sont aujourd'hui actifs au Canada, et plus de 400 au Royaume-Uni. L'Australie, la France, la Nouvelle-Zélande et la Suisse possèdent des systèmes similaires.
Une ville du sud de l'Angleterre bat sa propre monnaie, la livre de Lewes. Les quelques 16 000 habitants de Lewes, capitale de l'East Sussex, près de Brighton, peuvent l'utiliser uniquement dans les commerces locaux. Plus de soixante-dix sociétés ou magasins acceptent cette devise, valant autant que sa grande sœur la livre sterling. Une dizaine de milliers de billets d'une livre de Lewes ont été imprimés.

Europe

France

De nombreuses initiatives de monnaies locales ont été lancées depuis 2010. La plupart sont recensées sur un site web dédié. On peut citer :
  • l'abeille, à Villeneuve-sur-Lot (février 2011) ;
  • l'agnel, à Rouen et Elbeuf et leurs environs (novembre 2015) ;
  • la Bel monnaie, à Valence et Romans sur Isère (janvier 2016), monnaie uniquement électronique (Association pour le développement de l'économie locale par la monnaie) ;
  • la beunèze, en Saintonge (mai 2015) ;
  • le Bou’Sol, à Boulogne-sur-Mer () ;
  • le boyard, sur le pays Marennes-Oléron (2014 ou 2015) ;
  • le céou, en Bouriane (Lot) (mars 2014) ;
  • la Commune sur le bassin de vie du Roannais (2010);
  • la doume, dans le Puy-de-Dôme, portée par l'ADML 63 (Association pour le développement de monnaies locales dans le Puy-de-Dôme et alentours) ;
  • l'elef, à Chambéry (22 novembre 2014) ;
  • l'eusko, au Pays basque (janvier 2013) ;
  • la Gabare, monnaie locale de Touraine (septembre 2016) ;
  • le Galais dans le pays de Ploërmel dans le Morbihan (novembre 2015) ;
  • le galléco, en Ille-et-Vilaine (2013) ;
  • la Gentiane, à Annecy (automne 2017) ;
  • la Gonette, à Lyon et dans certaines villes de l'agglomération ou du département du Rhône (7 novembre 2015)
  • le Grain, dans la région havraise, porté par l'association Le Grain Monnaie Locale (septembre 2015) ;
  • l'heol, au pays de Brest (janvier 2012) ;
  • Le Louis, à Carrières-sous-Poissy dans les Yvelines (18 février 2017)
  • la Luciole en Ardèche du Sud et Ardèche Méridionale, portée par l'association Les Lucioles ;
  • la Maillette dans le pays de Dinan ;
  • la Muse pour le Maine et Loire, portée par l'association Agir pour la Transition ;
  • la mesure, à Romans-sur-IsèreDrôme (mai 2011) ;
  • la Miel (Monnaie d'Intérêt Économique Local), dans le Libournais, l'Entre-deux-Mers et le Sud-Gironde (janvier 2013) ;
  • la Mige, en Creuse (14 mai 2017) ;
  • l'occitan, à Pezenas (janvier 2010) ;
  • la pêche, à Montreuil (21 juin 2014) ;
  • la Pive, en Franche-Comté (lancement en mai 2017) ;
  • la pyrène, en Ariège ;
  • le radis, à Ungersheim (juillet 2013) ;
  • le Renoir, à Cagnes-sur-Mer (septembre 2016) ;
  • le Retz'L, au sud de Nantes et dans le Pays de Retz (avril 2013) ;
  • la roue, en Provence, en Vaucluse (janvier 2012) puis dans les Bouches-du-Rhône (avril 2014) ;
  • l'unité Sel à nom variable des systèmes d'échange local (à partir de 1994) ;
  • le sol-violette, à Toulouse, lancé au début 2011 pour une expérimentation de six mois, et toujours en vigueur aujourd'hui ;
  • la SoNantes, à Nantes et dans l'agglomération nantaise (monnaie complémentaire non reconvertible – supports électroniques uniquement; avril 2015) ;
  • le stück, à Strasbourg (3 octobre 2015) ;
  • la T!nda, en BéarnPyrénées-Atlantiques (juin 2014) ;
  • la touselle, en Comminges (sud de la Haute-Garonne) ;
  • le projet en vallée de chevreuse, Yvelines, Essonne (lancement 2018) ;
  • I Soldi Corsi en Corse, actuellement en création, lancement probable au printemps 2017.
Mentionnons aussi le projet Sol (Monnaie complémentaire Sol), monnaie solidaire dématérialisée (supports électroniques seulement).

Belgique

Autres

Afrique

Amérique du Nord

Amérique du Sud

Asie

Critiques

Les opposants au concept de monnaie complémentaire affirment qu'une telle monnaie crée une barrière qui nuit aux économies d'échelle et à l'avantage comparatif, et que, dans certains cas, elle sert, tout comme les monnaies nationales traditionnelles, de moyen d'évasion fiscale.

Source https://fr.wikipedia.org/wiki/Monnaie_locale

6 commentaires:

Je a dit…

Une banque libre, telle que la définit Kevin Dowd, est un système financier qui n'implique pas de banque centrale ni aucun autre régulateur financier, y compris le gouvernement, cela dans le but que les institutions financières puissent agir librement, tel que défini par les forces en présence sur le marché.

Histoire

Plus de 100 pays ont adopté ce système durant l'essor du système des banques libres écossaises qui a duré près d'un siècle ; cela inclut l'Allemagne, l'Italie, la Belgique, l'Espagne, le Portugal et la Grèce.

- Canada (1891 à 1934). Aucune banque canadienne n'a fait faillite durant la grande Dépression de 1929 et ce, en partie à cause de son absence de banque centrale, à l'existence de réseaux de succursales et à la collaboration interbancaire mise en place par l'Association des Banquiers Canadiens. Cependant, le 3 juillet 1934, la Loi sur la Banque du Canada est adoptée ce qui a pour effet de créer la Banque centrale du Canada.

- Écosse (1716 à 1845). Ce pays a développé un système de concurrence entre banques. Chacune appliquait le système de compensation des billets de banque ; les échanges se faisait deux fois par semaine et la balance était immédiatement équilibrée. Dès le début, ils ont adopté un système de branches, et, comparé aux autres pays, ils ont eu un développement beaucoup plus rapide de leurs banques de dépôt ainsi que des techniques de prêts.

- France (1796-1803). Quelques années après la révolution française, par la loi du 24 Germinal an XI, Napoléon Ier donne le monopole de l'émission des billets à la Banque de France pour une valeur minimale de 500 francs qui s'étend sur une durée de 15 ans.

La Première Guerre mondiale a été un point tournant dans l'histoire des banques libres. Le Canada et la Nouvelle-Zélande ont adopté une forme de contrôle gouvernemental des provisions en argent afin d'aider la finance de leur engagement dans la guerre. La Société des Nations fit un mémorandum pour que chaque nation qui n'avait pas une banque centrale en ait une.

La dernière banque libre fut celle du Venezuela, qui a été remplacée par une banque centrale en 1940.

Je a dit…

La banque WIR est une institution bancaire suisse qui émet sa propre monnaie pour faciliter les échanges économiques entre ses membres. Son siège est à Bâle. WIR est l'abréviation du mot allemand Wirtschaft qui signifie « économie », wir signifiant également « nous » en allemand.

La banque WIR est un organisme sans but lucratif. Il sert l'intérêt des clients. C'est un système très stable, peu enclin à l'échec, ou crise systémique, comme dans le système bancaire actuel. Il reste pleinement opérationnel même en temps de crise économique généralisée. WIR peut avoir contribué à la remarquable stabilité de l'économie suisse, car il amortit les ralentissements du cycle d'affaires.

Depuis la crise économique mondiale des années 2008 et suivantes, « le franc WIR n’intéresse pas forcément les PME suisses parce que les crédits en francs suisses sont [en 2012] octroyés à des taux d’intérêt historiquement bas. En raison de ces circonstances tout à fait extraordinaires, l’avantage naturel du crédit WIR traditionnellement avantageux – le véritable moteur du système de paiements WIR – perd un peu de son attrait. »

Historique

La banque WIR a été fondée en 1934. En 1993, elle comptait 53 730 membres, 16 788 comptes et un chiffre d’affaires semestriel d'environ 0,8 million de WIR (même valeur que le franc suisse). En 1990, les coûts de l'organisation WIR étaient couverts par une cotisation de 8 CHF par trimestre, soit 32 CHF par an, à laquelle s'ajoute un prélèvement de 0,6 % à 0,8 % à chaque transaction. Au premier semestre 2012, le chiffre d’affaires WIR était de 709,4 millions.

Les PME parmi ses partenaires pratiquent un système de paiement sans numéraire. En 2010, en Suisse, une PME sur 5 utilise le WIR. Selon son rapport de gestion 2014, la banque WIR compterait 45 000 PME affiliées.

Je a dit…

Le Wära est une monnaie fondante locale en circulation en 1931 à Schwanenkirchen, une petite ville minière de Bavière.

Introduction

Le « wära » est une forme de monnaie non thésaurisable, dite monnaie « fondante », créée en Allemagne en 1919 par la société des « franchistes ».

Fonctionnement

Une monnaie fondante est une monnaie qui perd régulièrement de sa valeur. Ainsi le wära perdait environ 1 % de sa valeur tous les mois. Il fallait apposer un timbre toutes les fins de mois sur les billets pour que ceux-ci retrouvent leur valeur d'origine. 12 cases figuraient au dos de chaque wära à cet effet. Les bons étaient changés chaque année quand les cases étaient pleines. Cette "sanction" à la thésaurisation empêchait de les stocker et de déclencher des crises.

Historique

L'idée de monnaie fondante revient à l'allemand Silvio Gesell qui a émis cette idée en 1918 dans son ouvrage L'Ordre économique naturel (Ed Uromant, Bruxelles).

La société des franchistes fut créée en Allemagne en 1919 pour mettre en place cette monnaie.

Je a dit…

Jean Silvio Gesell (né le 17 mars 1862 à Saint-Vith aujourd'hui en Belgique, autrefois en Prusse - mort le 11 mars 1930 à Oranienburg dans la coopérative Eden en Allemagne) était un commerçant, théoricien monétaire et initiateur de la monnaie franche.

En 1916, il publie son ouvrage majeur L'Ordre économique naturel. Il y présente sa théorie de la monnaie franche qui le rendra célèbre, laquelle consiste en la mise en circulation d'une monnaie fondante c'est-à-dire qui se déprécie à intervalle fixe (tous les mois ou tous les deux mois...).

Influencé par la pensée de Pierre-Joseph Proudhon, proche des anarchistes Gustav Landauer et Erich Mühsam, il est en 1919, commissaire du peuple aux finances de l'éphémère gouvernement d'Ernst Niekish lors de la République des conseils de Bavière.

Je a dit…

La réussite de l'expérience de la monnaie locale wära à Schwanenkirchen inspira la commune autrichienne de Wörgl sous l'impulsion de son maire, Michael Unterguggenberger, et devant la faillite menaçante, à établir un système semblable, mais sur la base de « certificats de travail ». Le 5 juillet 1932, le bourgmestre transforme la monnaie régulière circulant à Wörgl en une monnaie accélérée du type prôné par Silvio Gesell. La commune émet des bons de 1, 5 et 10 schillings qui seront nommés « bons-travail ». Ces bons avaient la particularité de diminuer de 1 % de leur valeur par mois, 10 schillings à ce régime perdraient en un an 1,20 schilling. Pour conserver des billets de valeur fixe, on pouvait, à la fin de chaque mois, moyennant la perception de la chute de 1 %, faire donner à la mairie un coup de tampon sur le billet, lui rendant sa pleine valeur. Les premiers billets furent émis en août 1932 pour une somme totale de 32 000 schillings. Cette somme était garantie à 100 % en argent autrichien régulier déposé à la caisse d'épargne locale. Cette forme de paiement fut interdite le 5 janvier 1933. La banque centrale autrichienne aurait craint pour son monopole de l'émission de monnaie. Le premier emploi des bons fut l'organisation d'un plan de travaux publics. On paya le salaire des ouvriers et on régla les fournitures faites à la ville uniquement en bons-travail. C'est ainsi qu'ils furent introduits dans la circulation. La rapidité de circulation de cette monnaie locale permit d'effectuer en trois mois 100 000 schillings de paiements avec une quantité de bons de 12 000 schillings. Les différents commerces acceptaient donc bons et argent autrichien en parallèle. La nouvelle monnaie ne stimulant pas l'épargne, la caisse d'épargne de Wörgl qui connaissait un excédent de retraits sur ses dépôts de 10 000 schillings en juillet 1932, vit cet excédent tomber à 5 000 schillings en août, après l'introduction des bons et 1 an après les dépôts et les retraits s'équilibraient. Les communes voisines de Kirchbichl, Brixen im Thale, Hopfgarten im Brixental et Westendorf admettent la circulation des bons de Wörgl et émettront à leur tour des bons de travail. Le maire a même le projet de donner à Wörgl le statut d'un « État-libre » et « laboratoire monétaire » sous l'égide de la SDN. L'expérience de Wörgl fit reculer le chômage de 25 % à l'époque de sa mise en œuvre (juillet 1932-septembre 1933), alors que sur l'ensemble de l'Autriche, pour la même période 1932-1933, le chômage augmenta de 20 %.

Je a dit…

Un Système d'échange local (ou Sel) est un système d'échange de produits ou de services au sein d'un groupe fermé, généralement constitué en association. Ses membres échangent des biens et services selon une unité propre à chaque groupe. L’objectif est d'accéder à des échanges égalitaires et de tisser des liens.

Les Sel sont des associations locales. L'acronyme « Sel » a été choisi pour son homonymie avec le sel, aliment, monnaie d'échange ancienne, à l'origine du mot « salaire ».

Il existe plus de 600 Sel en France, généralement classés dans l'économie sociale et solidaire.

Intérêt

Les promoteurs d'un Sel cherchent à créer de la solidarité et du lien social entre les membres du groupe. Une égalité entre les personnes se recrée.

Organisation

Forme juridique

Un Sel est une association, déclarée ou de fait. N'importe quel groupe de personnes peut créer un Sel. Il existe des associations qui fédèrent les Sel, telles que le Collectif des Sel ou l'association Sélidaire. Cette dernière se déclare statutairement représentative des Sel adhérents. Mais il n'y a pas d'obligation pour un Sel à adhérer à une association.

Les transactions

La comptabilité des unités est centralisée ou individuelle. Les débits et les crédits sont enregistrés sur les comptes des adhérents. Le fournisseur du produit ou du service voit son solde augmenter, le receveur voit son solde diminuer. Chaque Sel choisit sa propre unité d'échange.

Valeur de l'unité

L'unité d'échange est déterminée de gré à gré, comme dans le Sel de Paris. Dans le Sel de Caen, elle est une monnaie temps ː une heure = une heure, quel que soit le service rendu. C'est la tendance qui prévaut actuellement. Le Sel de Saint-Quentin-en-Yvelines utilise une monnaie fondante.

Forme de l'unité

L'unité de compte existe sous plusieurs formes ː elle est matérialisée par des jetons, des bons ; elle utilise un compte électronique ; elle est scripturale à l'aide de feuilles de compte contresignées par les partenaires d'un échange, ou de carnets d'échanges. Chaque Sel choisit le nom de son unité.

Publicité des offres et demandes

La majorité des Sel dispose d'un site Internet où les adhérents postent leurs propositions d'échanges. Certains Sel font des tours de table lors de réunions régulières, des panneaux d'affichage, des listes en papier.

Aspect légal

En France, les transactions réalisées ne sont exonérées de TVA et d’impôts que dans la mesure où il s’agit d’une activité non répétitive et ponctuelle, type « coup de main » et n’entrant pas dans le cadre d'une profession. Mais si on se livre à une activité répétitive ou entrant dans le cadre de son métier, on se doit de le déclarer aux organismes concernés.