vendredi 28 juillet 2017

État libre islandais

L’État libre islandais (Þjóðveldisöld en islandais) désigne l’État qui a existé en Islande de l’établissement de l’Althing (Alþing en islandais) en 930 au serment de vasselage (Gamli sáttmáli) prêté en 1262 au roi de Norvège.

Histoire

Fondation de l'État libre (930)

 

L’établissement du Þjóðveldisöld est dû à un groupe constitué en grande partie d’émigrants récents norvégiens ayant fui l’unification de leur pays sous le roi Harald Ier. Les colonisateurs commencent par instituer des thing locaux, assemblées héritées de la tradition scandinave. Ils réunissent les fermiers propriétaires libres. À la fin de la colonisation, les Islandais de la deuxième et troisième génération éprouvent le besoin d’une forme de structure gouvernementale.

Âge des Sagas (930-1030)

 

Elles se rapportent aux hauts faits d'un ancêtre ayant vécu aux Xe et XIe siècles. Leurs auteurs ne sont pas connus. Les héros de ces sagas sont généralement fameux en raison des expéditions vikings qu'ils ont menées ou de leurs qualités personnelles (sens de l'amitié, talent poétique, mœurs chevaleresques, etc.).
Régis Boyer en donne six comme particulièrement exemplaires : la saga de Hrafnkell, la Saga d'Egill, fils de Grímr le Chauve, la Saga de Snorri le godi, la Saga des gens du Val-au-Saumon, la Saga de Grettir le Fort et la Saga de Njáll le Brûlé.

Évangélisation de l'Islande (999-1000)

 

La christianisation de l’Islande intervient en l’an 1000. En islandais, on parle de kristnitaka, littéralement « prise du christianisme ».

L'âge de la paix (1030-1220)

 

Les « sagas des contemporains » (Samtíðarsögur) font, comme leur nom l'indique, la narration d'évènements contemporains à la vie de l'auteur. Il s'agit notamment des sagas d'évêques.

L'âge des Sturlungar : déclin et chute (1220-1262)

 

La Saga des descendants de Sturla relate les malheurs des Islandais entre les XIIe et XIIIe siècles. Plusieurs sagas issues de cet ouvrage ont été écrites par Sturla Thórðarson. Vers l’an 1220, à la suite des conséquences de l’instauration de la toute première taxe territoriale islandaise destinée à l’entretien des églises, détournée par des chefs et entraînant leur enrichissement excessif1, l’État libre islandais a commencé à souffrir de graves dissensions internes : à cette époque, 80 % des terres appartenant à seulement cinq grandes familles, les disputes entre celles-ci dégénéraient en sorte de guerre civile qui déchirait le pays, surtout au milieu du XIIIe siècle.
Le roi de Norvège aussi continua plus que jamais à faire pression sur les Islandais pour qu’ils soumettent leur pays à son pouvoir. Le fameux, riche et influent poète-politicien Snorri Sturluson jouait un rôle clé toujours disputé dans ces entretiens. Les mécontentements suscités par les conflits internes et la pression exercée par les souverains norvégiens ont amené les chefs de clans islandais à mettre de facto fin à l’État libre islandais en décidant, en 1262, de reconnaître pour souverain le roi Haakon IV de Norvège et d’adopter des structures de pouvoir féodal.

Fonctionnement

L’Islande possède un corps législatif national, la Lögrétta, dont sont membres les seuls goðar et un système judiciaire évolué. Le droit est fondé sur la coutume. La guerre privée est un moyen courant de régler les litiges, mais le consensus et l’arbitrage public sont généralement recherchés en l’absence d’autorité centrale.
Le hreppr gère et contrôle les terres communes, en particulier les pâtures d’estive et les côtes. Il peut intervenir comme assurance au bénéfice d’éleveurs mis en difficulté par une mauvaise récolte de foin.

Le système des goðorð

 

La structure de l’Islande médiévale était peu commune. Sur le plan national, l’Althing constituait à la fois un tribunal et une chambre législative ; il n’y avait ni roi ni pouvoir exécutif central. L’Islande se divisait en nombreux goðorð (au pluriel comme au singulier) consistant essentiellement en clans ou en alliances dirigées par des chefs de clan appelés goðar (singulier goði). Les chefs de clan assuraient la défense et nommaient des juges pour résoudre les conflits entre les membres du goðorð qui ne consistaient pas, à strictement parler, en zones géographiques mais en groupes auxquels chaque individu adhérait de son plein gré. Il était donc possible, au moins en théorie, de changer à volonté de goðorð. C’étaient aussi les goðar qui, avec deux hommes de leur suite chacun, représentaient le peuple dans le parlement Althing, une structure donc plutôt oligarchique.
Telle est la base de la thèse, contestée, selon laquelle l’État libre constituait une sorte de démocratie. Le goði était propriétaire de son rang qu’il pouvait acheter, vendre, emprunter et léguer alors que nul groupe d’hommes de position inférieure ne pouvait élire ou déclarer quelqu’un goði.

Le système judiciaire

 

Si quelqu’un voulait faire appel d'une décision prise par son tribunal de goðorð ou si un conflit surgissait entre les membres de différents goðorð, il était possible de référer l’affaire à un système de cours de plus haut niveau jusqu’aux quatre cours régionales de 36 juges (fjórðungsdómur) composant l’Althing, alors les goðar des quatre parties de l’Islande. L’Althing a, par la suite, créé une « cinquième cour » nationale (fimmtadómur), une sorte de cour suprême composée de 48 juges nommés par les goðar de la partie législative (Lögrétta) de l’Althing. Bien que l’Althing n’ait que modérément réussi à résoudre les disputes, elle a également montré l’ampleur de ses pouvoirs lorsqu’elle a ordonné, quand l’Islande a été contrainte, sous les menaces du roi Olaf Ier de Norvège, de se convertir au christianisme en l’an 1000, que tous les Islandais devaient être baptisés et a interdit la célébration publique, et quelques années plus tard, privée, des rituels païens. En 1117, ses lois ont été mises par écrit.

L’État libre islandais comme exemple d’anarcho-capitalisme

 

Selon une théorie exprimée par l’économiste David Friedman, la société islandaise aurait été anarchiste pendant ses trois siècles d’indépendance, l’Althing s’apparentant plus à une chambre de commerce qu’à un corps de législation souverain. Si cette représentation s’avère exacte, l’histoire islandaise serait celle qui aurait approché au plus près de l’idéal anarcho-capitaliste de Friedman.

Économie et société

La population de l’Islande vers 930 est alors estimée à 35 000 personnes. Elle est fortement mêlée, composée à majorité de Norvégiens du sud-Ouest, mais aussi de Danois et de Suédois, de Flamands, de Saxons et d’Anglais. La proportion des Celtes est considérable, venus d’Irlande et des îles nord-atlantiques (Orcades, Shetland, Hébrides), voire de l’île de Man ou du nord de l’Écosse.
Les colons islandais vivent principalement de l’élevage extensif des bovidés et surtout des ovins. La pratique de l’agriculture (blé noir principalement) est possible dans le sud, mais limitée, et le grain sera toujours un article d’importation indispensable. La pêche est une ressource importante (saumon et truite, morue et hareng), à laquelle s’ajoute la chasse au phoque et à la baleine, pour l’ivoire en particulier. Le commerce vers la Norvège, l’Angleterre et l’Irlande tient une place importante (importations de bois de construction, de blé, de fer, de goudron, de vin, d’habits de luxe et d’objets d’art, en échange de laine, de suif et de peaux).
En 1104, la région du Thjórsardalr, au sud de l’Islande, colonisée à la fin du IXe siècle, est ravagée par l’éruption du volcan Hekla. Une vingtaine d’exploitations agricoles ont été fouillées par les archéologues. Les fouilles révèlent l’évolution de la maison-longue : pièce unique avec un foyer central au début de la colonisation, puis deux pièces distinctes du hall qui joue le rôle de cuisine, enfin demeures plus complexes et raffinées, avec chambre des maîtres, hall aux murs lambrissés, cuisine ou atelier réservé aux femmes, laiterie et hangar attenant. Les fondations sont en pierre mais les murs, très épais, sont constitués par de la tourbe, sans doute plus isolante.

1 commentaire:

Je a dit…

L’anarcho-capitalisme est un courant de pensée politique inspiré par le libéralisme philosophique, selon laquelle l’existence de l’État est illégitime et inutile. Ce courant est une branche du libertarianisme, différent du minarchisme, qui soutient quant à lui l'existence d'un État minimal pour tous (« État veilleur »).

Il se sépare du libéralisme classique, lequel reconnaît la nécessité d’un État et ne vise qu’à limiter de façon stricte son domaine et ses modes d’intervention. Il se distingue aussi des courants historiques traditionnels (socialistes, fédéralistes, individualiste) de l’anarchisme par son acceptation sans limite de la propriété privée, et accessoirement, son appartenance aux libertariens, son absence de critique de la religion entre autres.

Les anarchistes traditionnels considèrent plutôt que l'anarcho-capitalisme appartient à l'aile droite des libéraux et pas au courant historique de l'anarchisme, en dépit de son rejet de l'État ; ceci du fait qu'il ne partage pas avec l'anarchisme historique son « souci de l'égalité économique et [de] la justice sociale ». Il en va de même pour la plupart des anarchistes individualistes.