mercredi 19 juillet 2017

Le héros aux mille et un visages, de Joseph Campbell

Sommaire détaillé 


L'aventure du héros

- Le départ
-- L'appel de l'aventure
-- Le refus de l'appel
-- L'aide surnaturelle
-- Le passage du premier seuil
-- Le ventre de la baleine

- Initiation
-- Le chemin des épreuves
-- La rencontre avec la déesse
-- La femme tentatrice
-- La réunion au père
-- Apothéose
-- Le don suprême

- Le retour
-- Le refus du retour
-- La fuite magique
-- La délivrance venue de l'extérieur
-- Le passage du seul au retour
-- Maître des deux mondes
-- Libre devant la vie

Le cycle cosmogonique

- Emanations
-- De la psychologie à la métaphysique
-- La ronde universelle
-- Hors du vide : l'espace
-- A l'intérieur du l'espace : la vie
-- L'éclatement de l'unité en multiplicité
-- Contes populaires de la Création

- La naissance virginale
-- La Mère de l'univers
-- Matrice du destin
-- Matrice de la rédemption
-- La Vierge Mère dans les traditions populaires

- Les transformations du héros
-- Le héros primordiale et l'être humain
-- Enfance du héros humain
-- Le héros-guerrier
-- Le héros-amant  
-- Le héros-empereur et le héros-tyran
-- Le héros-rédempteur du monde
-- Le héros-saint
-- Le départ du héros

- Dissolutions
-- Fin du microcosme
-- Fin du macrocosme

Le héros mythologique 

(p. 336-337)

Le héros mythologique, quittant la chaumière ou le château où il vivait jusqu'alors, est attiré, enlevé, ou encore se dirige volontairement vers le seuil de l''aventure. Il y rencontre une présence obscure qui garde le passage. Le héros peut, soit vaincre cette puissance -ou se la conciclier- et pénétrer vivant dans le royaume des ténèbres (combat avec le frère, contre le dragon, ou offrande, amulette); soit être tué par son adversaire et descendre au royaume de al mort (démembrement, crucifixion). Une fois ce seuil franchi, le héros poursuit son voyage à travers un monde de forces inhabituelles quoique étrangement familières, dont certaines le menacent dangereusement (épreuves), tandis que d'autres lui offrent leur secorus magique (guides). Lorsqu'il parvient au nadir de la ronde mythologique, il subit l'épreuve suprême et obtient sa récompense. La victoire peut être représentée par l'union sexuelle du héros avec la déesse mère du monde (mariage sacré), sa reconnaissance par le père créateur (réunion au père), sa propre divinisation (apothéose), ou bien encore -si les forces lui sont restées hostiles- par le rapt du gage à la recherche duquel il était parti (rapt de l'épouse, rapt du feu); par essence, il s'agit d'un élargissement du champ de la conscience et donc de l'être (illumination, transfiguration, libération). La tâche finale est de revenir. Si les puissances ont accordé leur bénédiction au héros, c'est maintenant sous leur protection qu'il avance (émissaire); sinon, il s'enfuit et il est poursuivi (fuite entrecoupée de transformations, d'obstacles). Au seuil du retour, il lui faut se séparer des puissances transcendantales; le héros ré-émerge du royaume de la terreur (retour, résurrection). Le gage qu'il rapporte régénère le monde (elixir).

Les modes sur lequels le monomythe a été chanté défient toute description. Nombre de légendes isolent et amplifient largement l'un ou l'autre des éléments typiques du cycle complet (thème de l'épreuve, thème de le fuite, du rapt de la fiancée); d'autres relient plusieurs cycles indépendants en un seul (comme dans L'Odyssée). Des personnages et des épisodes appartenant à des cycles différents peuvent fusionner; ou bien un élément unique du cycle peut se dédoubler pour réapparaître sous de multiples variantes.

Les grandes lignes des mythes et des légendes peuvent subir des déformations et s'osbcurcir. Les traits archaïques sont, en général, éliminés ou atténués. Des matériaux importés sont remaniés pour s'adapter au milieu, aux coutumes et aux croyances locales et ce processus ne va pas sans qu'ils en souffrent. Par ailleurs, il est inévitable que des mutilations, volontaires ou accidentelles, se produisent au cours des innombrables répétitions auxquelles est soumis un récit traditionnel. Pour justifier la présence d'éléments qui, pour une raison ou une autre, ont perdu leur sens, des interprétations secondaires sont inventées qui dénotent parfois une extraordianire habileté.

De la psychologie à la métaphysique

(p.347-348)

La pesnée contemporaine admet sans peine que le symbolisme de la pythologie possède une signification psychologique; Depuis les travaux des psychanalystes, notamment, il ne reste guère de doute que les mythes sont de la nature du rêve et que ceux-ci manifestent la dynamique de la psyché; Sigmund Freud, Carl G. Jung, Wilhem Stekel, Otto Rank, Karl Abraham, Géza Roheim et bien d'autres, au cours de ces dernières décennies, ont développé une science nouvelle, abondamment documentée : la science de l'interprétation du rêve et du mythe; si les savants ne sont pas tous d'accord entre eux, la masse considérable de principes qu'ils ont en commun les rend solidaires de ce grand pouvement de notre temps. Depuis qu'ils ont découvert que les thèmes et la logique du mythe et du contre de fées correspondent à ceux des rêves, les prétendues chimères des Anciens sont revenues de façon spectaculaire au premier plan de la conscience contemporaine.

Cette science nouvelle fait apparaître qu'à travers les contes merveilleux -qui se proposent de raconter la vie des héros légendaires, et qui mettent en scène les divinités de al nature, les esprits des morts et les ancêtres totémiques du groupe- une expression symbolique a été donnée aux peurs, tensions et désirs inconscients qui sont à la base des différents types de comportement humain conscient. En d'autres termes, la mythologie est psychologie et non, comme on l'a interprétée à tort, biographie, histoire ou cosmologie. Le psychologue d'aujourd'hui peut lui rendre sa vraie signification et retituer ainsi au monde contemporain un document éloquent et inépuisable sur les plus profonds abîmes de la nature humaine. On peut y observer, commme dans un fluoroscope, les processus cachés de l'nigme de Homo sapiens - qu'il soit occidental ou oriental, primitif ou civilisé, archaïque ou contemporain. Le spectacle entier est sous nos yeux. Nous navons plus qu'à le déchiffer, en étudier les thèmes constants, en analyser les variations, pour enfin comprendre les forces profondes qui façonnèrent le destin de l'homme et qui déterminent encore notre vie prive et notre vie sociale.

Les royaumes des dieux

(p.352)

Le ciel, l'enfer, les temps mythologiques, l'Olympe et toutes les autres demeures des dieux, sont interprétés par la psychanalyse comme des symboles de l'inconscient. La clef pour comprendre les systèmes actuels de l'interprétation psychologique des mythes est, par conséquent, la suivante : royaume métaphysique = inconscient. Par réciprocité, la clef qui ouvre la porte en sens contraire, est la même équation, inversée : inconscient = royaume métaphysique.  Car, comme l'a dit Jésus Christ, "Voyez, le royaume de Dieu est en vous.".

Le cycle cosmogonique

(p.361)

Le cycle cosmogonique doit être compris comme le passage de la conscience universelle qui, provenant de al zone de sommeil profond du non-manifesté, passe par le rêve et se manifeste dans l'état de veille dirunr; puis retourne, à travers le rêve, aux ténèbres éternelles.

Veille => dissolution (Rêve) => Sommeil profond => émanation (Rêve) => Veille

Selon un mouvement de pulsation, le cycle cosmogonique provoque la manifestation puis retourne à la non-manifestation, et cela, dans le silence de l'inconnu. Les hindous représentent ce mystère par al syllabe sacrée AUM. Le son A représente ici la conscience de veille; le son U, la conscience de rêve; le son M, le sommeil profond.

Définitions complémentaires de la mythologie 

(p. 508)

La mythologie a été interprétée par les savants modernes comme :
- une tentative primitive et maladroite d'interpréter le mode de la nature (Frazer)
- une manifestation de fantaisie poétique remontant aux temps préhistoriques et incomprise par la suite (Müller)
- un recueil d'instructions à base allégorique destiné à former l'individu en focntion du groupe (Durkheim)
- un rêve collectif, symptomatique des impulsions archétypes enfouies au plus profond de la psyché de l'homme (Jung)
- le véhicule traditionnel des connaissance métaphysiques les plus élevées de l'humanité (Coomaraswamy)
- et comme la Révélation de Dieu à ses Enfants (Eglise).
La mythologie est cela tout ensemble. Mais les points de vue diffèrent selon ceux qui la jugent.

Le héros aujourd'hui 

(p.514)

Tout ce qui précède est, en réalité, fort éloigné des vues contemporaines; car l'idéal démocratique de l'individu libre, l'invention de la machien et le développement de la méthode scientifique de recherche ont à ce point transformé la vie humaine que le monde des symboles éternels, hérités de la nuit des temps, s'est évanoui. Comme le dit le Zarathoustra de Nietzsche par ces mots fatals, annonciateurs d'une nouvelle époque : "Tous les diexu sont morts." On connaît bien l'histoire; elle a été racontée de mille manières. C'est le cycle héroïque de l'époque moderne, la merveilleuse histoire de l'humanité arrivée à l'âge d'homme. L'envoûtement du passé, la servitude de la tradition ont été abattus par des coups sûrs et puissants. La trame du rêve des mythes s'est évanouie; la pensée s'est ouverte à la pleine conscience; l'homme moderne émerge de l'ancienne ignorance comme un papillon de son cocon, comme le soleil, à l'aube, du sein de la nuit maternelle.

Ce n'est pas seulement qu'il n'existe pas d'endroit où les dieux puissent se dissimuler aux microscopes et aux téléscopes: il n'y a plus de société semblablee à celles que les dieux soutenaient autrefois. Le groupe social n'est plus porteur d'un contenu religieux, c'est un organe politico-économique. Son idéal n'est plus celui de la pantomine hiératique qui rendait visible sur terre les formes du ciel, mais celui de l'Etat séculier, dans al dure et impitoyable concurrence pour pour posséder les ressources de la suprématie matérielle. Les sociétés isolées, tenues par leurs rêves dans un horizon chargé de mythologie, ne représentent plus que des territoires à exploiter. Et, au sein même des sociétés développées, les derniers vestiges de l'héritage ancien de rites, de morale et d'art sont en pleine décadence.

Le problème de l'humanité est , par conséquent, à l'exact opposé de clui qui se posait aux hommes au cours des périodes relativement stables de l'histoire et qu'ordonnaient ces grandes mythologies qui passent pour des fabels de nos jours. Dans ces temps-là, toute signification résidait dans le groupe, dans les vastes formes anonymes, et non dans l'individu n'exprimant que lui-même; aujourd'hui, il n'y a aucune signification dans le groupe, aucune dans le monde : elle réside toute entière dans l'individu; Mais il en est totalement inconscient. On ignore ce vers quoi l'on tend. On ignore par quoi l'on est mû. Toute communication entre la zone consciente et la zone inconsciente de la psyché humaine a été rompue, et nous avons été coupés en deux.

L'acte à accomplir par le héros actuel n'est plus le même qu'au temps de Galilée. Là où régnaient alors les ténèbres se trouve aujourd'hui la lumière; mais aussi, là où était la lumière se trouvent aujourd'hui les ténèbres. L'exploit du héros moderne, c'est de tenter de ramener à la lumière cette Atlantide perdue qu'est notre âme réunie.

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