Le multiplicateur monétaire (de crédit) est la
théorie qui explique quel montant de crédit (de masse monétaire) peut
être distribué par les banques à partir de la base monétaire créée par
la Banque Centrale.
Avant d'ajouter plus loin :
De ce fait (internationalisation des bases monétaires),
le multiplicateur monétaire n'a plus de sens au niveau national ou
régional, ce que montrent d'ailleurs bien les évolutions observées, mais
seulement au niveau mondial.
Il est clairement dit ici que la masse monétaire distribuée par les banques dépend
de la base monétaire créée par la Banque centrale. Pourquoi l'auteur
utilise-t-il le terme de "distribuée", qui laisse planer un doute sur
son origine, et non celui de "créée" ? C'est la première remarque.
L'internationalisation des échanges lui permet de "botter en touche" et
de faire l'impasse sur les arguments adverses. C'est la deuxième
remarque.On sait que la base monétaire est constituée des billets de banque et des avoirs en compte auprès de la Banque centrale déposés par les banques commerciales et par le Trésor. Précisons que figurent dans les avoirs en compte des banques commerciales : les réserves obligatoires (R.O.), les facilités de dépôt et les reprises de liquidités en blanc.
Il est généralement admis que la théorie du multiplicateur s'appuie sur la monnaie fiduciaire (les pièces et les billets) et sur les réserves obligatoires, soit les deux besoins de refinancement auxquelles les banques ne peuvent échapper. S'il en est bien ainsi, pourquoi les avoirs du Trésor Public et les reprises de liquidité (qui sont dans la base) sont-ils purement et simplement évacuées des calculs dans la théorie ? Aurait-on affaire à une base à géométrie variable ? En outre, la théorie ne prend pas en considération l'abondance de monnaie centrale due à l'activité de l'Institut d'émission (achat de devises et activité propre, notamment).
La hausse de la masse monétaire bancaire s'expliquerait-elle malgré tout par une hausse préalable de la base monétaire ?
Ceci est en totale contradiction avec ce que dit la Banque de France (Bulletin n° 70 - octobre 1999), à propos des établissements financiers, dits en banque, c'est-à-dire structurellement endettés envers la Banque centrale :
La création monétaire de ces établissements, qui intervient lorsqu'ils prêtent à leurs clients, exige une création monétaire postérieure par la banque centrale lors de leur refinancement.
C'est très clair pour celles qui sont "en banque". Pour les autres
"hors banque", leurs disponibilités en monnaie centrale leur permettent
de remplir le moment venu leurs obligations de réserves obligatoires.
Mais poursuivons.De notre point de vue, la théorie du multiplicateur relève d'un raisonnement inversé. Ce ne sera pas le dernier, car il semble bien qu'en économie ce type de raisonnement à l'envers fasse florès. C'est exactement le contraire qui se produit comme le montre l'exemple suivant de création monétaire par une banque.
Avant d'accorder un crédit, toute banque s'assurera en toute priorité de la solvabilité de l'emprunteur et de sa capacité à honorer ses engagements. C'est la seule démarche qui importe aux yeux du banquier, le reste n'est que problème d'intendance. Il n'existe pas de banque qui ne possède pas de titres du Trésor dans son portefeuille. C'est la démarche de précaution. La banque sait donc qu'elle pourra sans aucune difficulté, soit obtenir un prêt de la part de ses concurrentes, soit se procurer la monnaie centrale nécessaire auprès de la Super-banque puisqu'elle détient le premier titre reconnu par elle, à défaut de posséder un titre éligible chez elle comme l'est le titre de créance sur une entreprise de première catégorie, celui de l'exemple ci-après. C'est la démarche d'intendance.
Prenons le cas d'une entreprise A de première catégorie, c'est-à-dire dont les créances sont éligibles à la Banque centrale, qui emprunte 10 millions d'unités monétaires (UM) à sa banque X.
Observons bien l'ordre dans lequel se déroulent les opérations.
La banque X crée la monnaie ex-nihilo, comme l'on dit. Elle crédite le compte de dépôt à vue (DAV) de son client A en échange d'une créance (engagement de payer à l'échéance) qu'elle porte à l'actif de son bilan.
La somme de ses dépôts à vue s'étant accrue, par le fait même de cette émission, la banque X doit consigner à la Banque centrale, à ce titre et pour la journée, un montant de réserves obligatoires égal par exemple à 2%. C'est à peu près comme si X démarrait son activité, ne disposant alors d'aucune réserve obligatoire, mais ayant pris auparavant la précaution de souscrire ou d'acheter des bons ou obligations du Trésor.
La hausse de la base monétaire est donc dépendante de la hausse du crédit bancaire ou masse monétaire, et non l'inverse, chaque fois que les banques créent de la monnaie ex-nihilo, c'est-à-dire continûment. Chaque nouvelle émission de monnaie bancaire aura donc pour effet premier la constitution de réserves obligatoires, puis par la suite la transformation d'une fraction de cette monnaie scripturale en monnaie fiduciaire pour les besoins des agents économiques, dans un rapport mathématique constant dû aux habitudes des agents et à la loi bancaire.
Il semble bien que la théorie du multiplicateur trouverait à s'appliquer si, et seulement si, la banque prêtait les fonds de sa clientèle, dont elle disposerait comme si elle n'était qu'un simple établissement financier. Dans cette hypothèse, X pourrait prêter la fraction des fonds détenus, non placée en réserves obligatoires et non convertie en monnaie fiduciaire, une première fois, puis la fraction du solde des fonds détenus non placée en réserves obligatoires et non convertie en monnaie fiduciaire, une deuxième fois, et ainsi de suite comme le prévoit la théorie.
Ce n'est pas le cas pour des raisons, tenant au fond, qui séparent les banques et les établissements financiers. Entre autres motifs, contrairement à l'établissement financier, la banque ne peut pas disposer des fonds de ses clients et elle n'en a pas besoin puisqu'elle crée la monnaie !
Les fonds déposés en banque, à vue ou à terme, appartiennent aux clients et la banque ne peut pas en disposer sans leur autorisation écrite. C'est là une différence juridique fondamentale avec l'établissement financier qui lui dispose des fonds de ses clients non sans avoir obtenu au préalable leur accord. Tout est organisé et réglementé pour faire croire qu'en banque la monnaie circule, ce qui est faux.
On se trouve ici au cœur de la confusion qui règne en matière de liquidité bancaire, confusion soigneusement entretenue par les autorités monétaires. En 1988, (après la publication en février d’un règlement relatif à la liquidité) la Banque de France écrivait en effet : « l’effet premier de l’existence des réserves obligatoires est de ponctionner la liquidité bancaire ».
Le bulletin de la Banque de France d'octobre 1999, déjà cité, recèle vraiment une mine d'informations. Voici ce qu'il dit :
"de plus, un système de réserves
obligatoires, en imposant des encaisses liquides supérieures à ce que
les banques doivent détenir en moyenne, permet d'absorber plus
facilement les besoins temporaires de liquidité, ce qui tend à réduire
le besoin d'intervention de la banque centrale".
Le premier discours était très clair. Il supposait, de toute
évidence, que les banques pouvaient "ponctionner" la liquidité bancaire
de leurs clients pour satisfaire à leurs obligations de réserves.
Alors qu'elles devaient et doivent toujours se procurer ou se fournir
en monnaie centrale pour y parvenir !Le deuxième discours est plus alambiqué et plein de contradictions. D'abord, les réserves obligatoires ne sont pas des encaisses liquides puisqu'elles sont immobilisées en compte, à moins que l'autorité monétaire vise ici les excédents de monnaie centrale, mais dans ces conditions, toutes les banques ne sont plus sur un même pied d'égalité devant la loi. Celles qui sont "en banque" devant se fournir en monnaie centrale, la Banque centrale devra alors intervenir, contrairement à ce qu'elle prétend. Celles qui sont "hors banque" effectivement se verraient retirer une part des liquidités en monnaie centrale dont elles disposent.
Quoi qu'il en soit, on peut se poser la question de savoir de quelle liquidité il s’agit ? Les banques n'ayant d'autre liquidité que celle dont elles disposent à leur compte à l'Institut d'émission, c'est-à-dire au minimum les Réserves Obligatoires (R.O.) imposées à toutes par la législation bancaire et éventuellement pour les plus avantagées des reprises de liquidités provenant d'excédents de monnaie centrale.
Mais, il reste en toile de fond l'intention partout présente des autorités monétaires de vouloir nous faire croire que les banques utilisent les disponibilités de leurs clients et qu'elles ne créent la monnaie que dans des limites contenues par elles. Ce qui n'est pas vrai, comme on vient de le voir. Cette assertion cherche surtout à laisser penser que la Banque centrale contrôle l'émission de monnaie par les banques, ce dont il est permis de douter.
Additif du 5 octobre 2014
Dans son bulletin trimestriel du 14 mars 2014, la Banque d'Angleterre (BoE) nous conforte dans nos conclusions.
Il est dit en effet à la page 15 :
Two misconceptions about money creation
The vast majority of money held by the public
takes the form of bank deposits. But where the stock of bank deposits
comes from is often misunderstood. One common misconception is that
banks act simply as intermediaries, lending out the deposits that
savers place with them. In this view deposits are typically ‘created’
by the saving decisions of households, and banks then ‘lend out’ those
existing deposits to borrowers, for example to companies looking to
finance investment or individuals wanting to purchase houses. In fact,
when households choose to save more money in bank accounts, those
deposits come simply at the expense of deposits that would have
otherwise gone to companies in payment for goods and services. Saving
does not by itself increase the deposits or ‘funds available’ for banks
to lend.
Indeed, viewing banks simply as intermediaries
ignores the fact that, in reality in the modern economy, commercial
banks are the creators of deposit money. This article explains how,
rather than banks lending out deposits that are placed with them, the
act of lending creates deposits — the reverse of the sequence typically
described in textbooks.(3)
Another common misconception is that the
central bank determines the quantity of loans and deposits in the
economy by controlling the quantity of central bank money — the
so-called ‘money multiplier’ approach. In that view, central banks
implement monetary policy by choosing a quantity of reserves. And,
because there is assumed to be a constant ratio of broad money to base
money, these reserves are then ‘multiplied up’ to a much greater change
in bank loans and deposits. For the theory to hold, the amount of
reserves must be a binding constraint on lending, and the central bank
must directly determine the amount of reserves.
While the money multiplier theory can be
a useful way of introducing money and banking in economic textbooks,
it is not an accurate description of how money is created in reality.
Rather than controlling the quantity of reserves, central banks today
typically implement monetary policy by setting the price of reserves —
that is, interest rates. In reality, neither are reserves a binding
constraint on lending, nor does the central bank fix the amount of
reserves that are available. As with the relationship between deposits
and loans, the relationship between reserves and loans typically
operates in the reverse way to that described in some economics
textbooks. Banks first decide how much to lend depending on the
profitable lending opportunities available to them — which will,
crucially, depend on the interest rate set by the Bank of England. It
is these lending decisions that determine how many bank deposits are
created by the banking system. The amount of bank deposits in turn
influences how much central bank money banks want to hold in reserve
(to meet withdrawals by the public, make payments to other banks, or
meet regulatory liquidity requirements), which is then, in normal times,
supplied on demand by the Bank of England. The rest of this article
discusses these practices in more detail.
Nous ne savons pas si cette information a été diffusée sciemment ou
non, mais elle constitue un terrible aveu d'impuissance des Banques
centrales à maitriser la monnaie.Source : http://www.bayard-macroeconomie.com/multiplicateur.html
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Biographie de l'auteur de l'article
Mes références
Autodidacte, aujourd'hui retraité, j’ai fait toute ma carrière dans le groupe Saint-Gobain successivement dans les services comptables, administratifs, financiers, de trésorerie, de gestion budgétaire, d’audit interne (4 ans au siège de la Compagnie) et des études financières.
Chercheur indépendant depuis 35 ans, je me suis servi presque essentiellement de mes seules connaissances professionnelles : la comptabilité et la finance. A l'origine de mes travaux (1980) la création de toutes pièces d'une comptabilité nationale débouchant sur la découvert d'une loi macroéconomique qui commande l'allure de marche de toute activité nationale. J'ai consacré les premières années qui ont suivi, à la mise au point et à la vérification de cette loi.
Fin 1999, un économiste éminent : le professeur Alain Cotta s'est intéressé à mes travaux, au point d'en proposer spontanément le manuscrit à son éditeur, malheureusement sans succès car je suis un inconnu.
Publication fin 2012 d'un livre intitulé « Solutions pour sauver l’euro et renouer avec la croissance » chez « 7 Ecrit Editions ». Préface d'Alain Grandjean, économiste. Tirage 5.000 exemplaires.
Mes intentions
Observant depuis quelques années les difficultés que rencontrent les pays occidentaux dans la gestion de leur économie, difficultés aggravées par la crise monétaire de 2007/2008, j'ai cherché à en comprendre les causes afin de proposer des solutions basées sur mes connaissances techniques en économie.
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