samedi 26 mai 2018

Discours de la servitude volontaire

Le Discours de la servitude volontaire ou le Contr'un est un ouvrage rédigé par Étienne de La Boétie. Publié en latin, par fragments en 1574, puis intégralement en français en 1576, il a été écrit par La Boétie probablement à l'âge de 16 ou 18 ans.

Ce texte consiste en un court réquisitoire contre l'absolutisme qui étonne par son érudition et par sa profondeur, alors qu'il a été rédigé par un jeune homme. Ce texte pose la question de la légitimité de toute autorité sur une population et essaie d'analyser les raisons de la soumission de celle-ci (rapport « domination-servitude »).

L’originalité de la thèse soutenue par La Boétie, est de nous démontrer que, contrairement à ce que beaucoup s’imaginent quand ils pensent que la servitude est forcée, elle est en vérité toute volontaire. Combien, sous les apparences trompeuses, croient que cette obéissance est obligatoirement imposée. Pourtant comment concevoir autrement qu’un petit nombre contraint l’ensemble des autres citoyens à obéir aussi servilement ? En fait, tout pouvoir, même quand il s’impose d’abord par la force des armes, ne peut dominer et exploiter durablement une société sans la collaboration, active ou résignée, d’une partie notable de ses membres. Pour La Boétie, « Soyez donc résolus à ne plus servir et vous serez libres ».



La puissance subversive de la thèse développée dans le Discours ne s’est jamais démentie. Même s’il serait anachronique de la qualifier d’anarchiste, cette thèse résonne encore aujourd’hui dans la réflexion libertaire sur le principe d’autorité. Le jeune humaniste sarladais recherchait une explication à l’étonnant et tragique succès que connaissent les tyrannies de son époque. S’écartant de la voie traditionnelle, La Boétie porte son attention non sur les tyrans mais sur les sujets privés de leur liberté. Et il pose une question troublante : comment peut-il se faire que « tant d’hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations endurent quelquefois un tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’ils lui donnent ? » Si pour éviter la censure, les exemples sont tirés de l’Antiquité, la réflexion porte bien sur son époque, dans un pays où le poids du pouvoir monarchique se renforce.
L’originalité de la thèse de La Boétie est contenue tout entière dans l’association paradoxale des termes « servitude » et « volontaire ». Il établit ainsi un modèle de la servitude, des causes de son apparition à celles de son maintien qu’il s’agit d’établir ici.

Un point de vue : La Boétie, en énonçant son discours, ne se positionne pas comme maître à penser, ni comme détenteur de la vérité : ceux qui affirment détenir la vérité sont en vérité ceux qui détiennent la maîtrise. Ce qui est vrai, c'est la compréhension singulière qu'on a du texte ; pour accéder à la liberté, il faut n'être ni maître ni esclave.

Citations

  • « Il y a trois sortes de tyrans. Les uns règnent par l’élection du peuple, les autres par la force des armes, les derniers par succession de race. »
  • « Pareillement les tyrans, plus ils pillent, plus ils exigent, plus ils ruinent et détruisent, plus on leur baille, plus on les sert, de tant plus ils se fortifient et deviennent toujours plus forts et plus frais pour anéantir et détruire tout ; et si on ne leur baille rien, si on ne leur obéit point, sans combattre, sans frapper, ils demeurent nus et défaits et ne sont plus rien, sinon que comme la racine, n’ayant plus d’humeur ou aliment, la branche devient sèche et morte. »
  • On attribue à tort, semble-t-il, la citation suivante à ce texte, car elle ne peut être trouvée dans aucun des principaux textes publiés : « Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux ». En réalité, elle provient de Pierre Victurnien Vergniaud, célèbre avocat, homme politique et révolutionnaire français.

Télécharger le discours complet (19 pages) ici https://www.singulier.eu/textes/reference/texte/pdf/servitude.pdf

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