mardi 8 décembre 2015

L’érosion et l’évaporation du Capital #2

par Alban Dousset
jeudi 9 juillet 2015 
 
 
Je souhaite faire usage de l'espace d'expression qu'offre Agoravox pour enrichir un essai d'économie politique (en cours d'écriture) des critiques pertinentes que vous apporterez en commentaire.
Cet essai devrait s'intituler "L'érosion et l'évaporation de Capital", voici sa seconde partie.

Le communisme :
D’un point de vue politique, Marx est amené à penser que le Travail (compris comme les forces laborieuses) est bon et ce qui l’aliène (notamment le Capital incarné par les capitalistes) est mauvais.
Cette conception manichéenne le conduit à penser que « seul le facteur Travail compte » et que seule une société hyper-égalitaire serait juste et bonne. Au terme de la révolution qu’il prophétise, les classes sociales et la propriété privé disparaîtront.
Voici deux extraits du manifeste du parti communiste signé[1] par K. Marx :
« Ce qui caractérise le communisme, ce n'est pas l'abolition de la propriété en général, mais l'abolition de la propriété bourgeoise.
Or, la propriété privée d'aujourd'hui, la propriété bourgeoise, est la dernière et la plus parfaite expression du mode production et d'appropriation basé sur des antagonismes de classes, sur l'exploitation des uns par les autres.
En ce sens, les communistes peuvent résumer leur théorie dans cette formule unique : abolition de la propriété privée.
On nous a reproché, à nous autres communistes, de vouloir abolir la propriété personnellement acquise, fruit du travail de l'individu, propriété que l'on déclare être la base de toute liberté, de toute activité, de toute indépendance individuelle.
La propriété personnelle, fruit du travail et du mérite ! Veut-on parler de cette forme de propriété antérieure à la propriété bourgeoise qu'est la propriété du petit bourgeois du petit paysan ? Nous n'avons que faire de l'abolir, le progrès de l'industrie l'a abolie et continue à l'abolir chaque jour.
[...]
Et c'est l'abolition d'un pareil état de choses que la bourgeoisie flétrit comme l'abolition de l'individualité et de la liberté ! Et avec raison. Car il s'agit effectivement d'abolir l'individualité, l'indépendance, la liberté bourgeoises.

Par liberté, dans les conditions actuelles de la production bourgeoise, on entend la liberté de commerce, la liberté d'acheter et de vendre.
Mais si le trafic disparaît, le libre trafic disparaît aussi. Au reste, tous les grands mots sur la liberté du commerce, de même que toutes les forfanteries libérales de notre bourgeoisie, n'ont un sens que par contraste avec le trafic entravé avec le bourgeois asservi du moyen âge ; ils n'ont aucun sens lorsqu'il s'agit de l'abolition, par le communisme, du trafic, du régime bourgeois de la production et de la bourgeoisie elle-même.
Vous êtes saisis d'horreur parce que nous voulons abolir la propriété privée. Mais, dans votre société, la propriété privée est abolie pour les neuf dixièmes de ses membres. »
La problématique d'un parti communiste est la suivante :
Si la propriété privée (et avec elle le Capital[2]) et la liberté du commerce (donc, dans une certaine mesure, l'Entrepreneuriat[3]) sont abolies :
Comment mettre en relation le Travail[4] avec les moyens de production ?
La réponse généralement apportée par les quelques régimes communistes qui seront mis en place sera : la propriété étatique et la planification centralisée.
Contrairement à l'idée de Marx, la mise en œuvre du communisme ne conduisait pas à la fin de l'Etat[5]  ; l'Etat s’est même renforcé en prenant à sa charge le rôle du Capital et de l’Entrepreneuriat.
Les faiblesses économiques d'un Etat communiste mis en concurrence avec un Etat capitaliste sont multiples :
  • Disparition d'une croissance économique spontanés :
La conjugaison du facteur Entrepreneuriat (qui désire la croissance des organisations économiques dans lesquels ils évoluent) et du facteur Capital (qui désire accroître sa propre masse par l'intermédiaire de sa rentabilité) produisent une croissance économique auto-stimulée. Cette auto-stimulation est absente dans les systèmes politiques dans lesquels l'Etat se substitue au Capital et à l'Entrepreneuriat.
  • Disparition d'une optimisation productive spontanés :
Lorsque le Capital (qui recherche une rentabilité maximum pour un risque minimum) et le Travail (qui recherche un rapport optimal entre son travail et sa contrepartie) sont mis en relation par l'Entrepreneuriat, cela conduit les organisations économiques à rechercher une productivité optimale. Les gains de productivité correspondent potentiellement autant au conatus du Travail, du Capital ou de l'Entrepreneuriat. L'antagonisme survient lorsqu'il s'agit de répartir ce gain de productivité (baisse du prix de vente, augmentation de salaire, augmentation des dividendes...). Cette optimisation productive est absente dans les systèmes politiques dans lesquels l'Etat se substitue au Capital et à l'Entrepreneuriat.
  • Disparition de l'essaimage :
Lorsque les forces laborieuses constatent des insuffisances au sein de leur propre organisation économique, elles ont toujours la possibilité d'essaimer, de s'autonomiser, d'innover et de créer leur propre organisation économique. Cet aspect de l'Entrepreneuriat est également connue sous la célèbre expression de "destruction créatrice"[6], c'est à dire la disparition de secteurs d'activité "obsolètes" parallèlement à la création de nouvelles activités "novatrices". Cet essaimage est absent dans les systèmes politiques dans lesquels l'Etat se substitue à l'Entrepreneuriat.
  • Disparition de l'affectio societatis[7] :
La fin de la liberté d'entreprise et d'un marché du travail relativement libre, signifie la fin pour les individus de s'associer (ou se dissocier) librement. Cette relative liberté dans le choix de son organisation où de ses collaborateurs conduit [en principe] à une forme de sélection naturelle des individus dont la collaboration est la plus profitable pour eux-mêmes et pour leur environnement économique. L'affectio societatis est absent dans les systèmes politiques dans lesquels l'Etat se substitue à l'Entrepreneuriat et au Capital.

>> Cela ne signifie pas qu'il n'y a pas eu de croissance économique ou d'amélioration de la productivité dans les régimes communistes mais plutôt qu'elles ont été obtenues à marche forcée par l'Etat qui souhaitait rester concurrentiel (sur le plan économique et technologique) face aux états capitalistes. Da la même manière, l'affectio societatis et la destruction créatrice ne disparaissent que dans leur version libérale. Cela signifie que l'Etat substituera à "l'affectio societatis" un mélange d'amour patriotique et idéologique tandis qu'il remplacera la "destruction créatrice" par des rénovation industrielle planifiée dans ses plans quinquennaux.
Ces mesures palliatives de l'Etat sont bien moins performantes que les conatus intrinsèques de l'Entrepreneuriat et du Capital. Vu cet état de fait, on comprends mieux le retard économique ,notamment dans l'industrie légère et les biens de consommation, constaté dans les régimes communistes, tels que l'U.R.S.S.
Par définition, l’Etat dispose de moyens « relativement » illimités, il n’est donc pas doté de la cupidité propre au Capital et des ambitions transcendantales qui conduisent l’Entrepreneuriat.
On aimerait croire que les régimes communistes conduisaient malgré tout à une plus grande égalité salariales entre les forces laborieuses :

Wikipédia sur l'économie communiste[8] :
« Tableau des revenus moyens par catégorie sociale en 1970 : (revenu moyen = 100)
Poste
Revenu moyen = 100
Directeurs, cadres sup
136
techniciens, spécialistes
146
employés
81
ouvriers industriels
107
travailleurs du bâtiment
123
ouvriers agricoles (sovkhoz)
81
paysans kolkhoziens
59

De plus, en considérant les avantages en nature, les écarts entre les salaires du directeur et de l'ouvrier d'une même entreprise pouvaient aller de 1 à 50. »








Outre cette illusion d'une plus grande égalité salariales entre les forces laborieuses, il apparaît que le mode de fonctionnement communiste est nettement moins efficient économiquement que le mode de fonctionnement capitaliste.
L'implosion socio économique de l'URSS et le dénouement de la guerre froide semblent en faire la démonstration empirique.
 
  1. Le Capital désigne le désir (des propriétaires des moyens de production) de faire fructifier leur investissement. Le désir du Capital se situe dans la recherche d’une rentabilité maximum pour un risque minimum. En d’autres mots, le conatus du Capital réside dans sa multiplication.
  1. L’Entrepreneuriat désigne le désir (des forces laborieuses et productives) d'améliorer et développer l'organisation économique dans laquelle elles évoluent. Le désir de l’Entrepreneuriat se situe dans un désir de croissance, de réalisation et de construction. En d’autres mots, le conatus de l’Entrepreneuriat réside dans une transcendance organisationnelle. [>> Cette dernière se manifeste par la volonté de bâtir, de guider, de conquérir, d’optimiser, d’innover…]
  1. Le Travail désigne le désir (des forces laborieuses et productives) d'un échange pérenne et optimal entre tache laborieuse et rémunération. Ce désir cantonne l'individu à son intérêt individuel, c'est à dire à son désir d'un rapport optimal entre son travail et sa contrepartie. En d’autres mots, le conatus du Travail est une recherche d’efficience et de stabilité optimum pour son activité et sa contrepartie.
  1. L’Etat désigne le désir (de la structure organisant les connections économiques et le service public d’une société) d'une relative stabilité économique, sociale et politique. Le désir de l’Etat se situe dans l'autoconservation de sa structure. En d’autres mots, le conatus de l’Etat réside dans une stabilité systémique.
  1. La « destruction créatrice » désigne le processus continuellement à l'œuvre dans les économies et qui voit se produire de façon simultanée la disparition de secteurs d'activité économique conjointement à la création de nouvelles activités économiques. Cf wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Destruction_cr%C3%A9atrice
  1. L'affectio societatis désigne la volonté commune entre plusieurs personnes physiques ou morales de s'associer. Cf wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Affectio_societatis

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