vendredi 24 avril 2015

Les concepts organisateurs de la formation du citoyen dans les programmes (7/10)

7 LA SOLIDARITE
 
7.1 Définitions

Le terme de solidarité tend à remplacer aujourd’hui celui de fraternité. Cependant, « fraternité » reste, avec « liberté » et « égalité » un des termes de la devise républicaine. Il renvoie à un état d’esprit, celui de la Révolution de 1848 qui instaure le suffrage masculin et abolit l’esclavage. Il est enfin présent en 1936 au moment où le Front populaire instaure la semaine de 40 heures et 15 jours de congés payés et en 1944 lorsque le Gouvernement provisoire, issu de la Résistance, donne le droit de vote aux femmes et crée la Sécurité Sociale. Si l’on se réfère au dictionnaire Robert « La solidarité est la relation entre personnes ayant conscience d’une communauté d’intérêts qui entraîne, pour un élément du groupe, l’obligation morale de ne pas desservir les autres et de leur porter assistance ».
Dans les sociétés traditionnelles, c’est la communauté des croyances et des sentiments qui fonde la cohésion sociale. Durkheim distingue la « solidarité mécanique » qui est le propre des sociétés préindustrielles où la religion joue un rôle essentiel pour maintenir le lien social et « la solidarité organique », celle des sociétés de l’âge industriel, où la coopération entre les individus est rendue obligatoire par la division du travail. Alexis de Tocqueville dans La démocratie en Amérique écrit : « Chez les peuples démocratiques, tous les citoyens sont indépendants et faibles ; ils ne peuvent presque rien par eux-mêmes et aucun d’eux ne saurait obliger ses semblables à lui prêter leur concours. Ils tombent donc tous dans l’impuissance s’ils n’apprennent pas à s’aider mutuellement ».
 
7.2 Histoire

On peut distinguer deux périodes dans l’histoire de la solidarité sociale. Au Moyen Age et sous l’Ancien Régime, c’est l’Eglise qui a en charge le soin des personnes en difficulté, des pauvres et des malades .La charité chrétienne et celle des particuliers s’exercent dans les hôpitaux, les Hôtels-Dieu et les orphelinats. L’oeuvre de Saint Vincent de Paul au XVIIe siècle est, à bien des égards, exemplaire. Des associations de secours mutuel organisent l’entraide dans le cadre des corporations de métiers. Avec le développement industriel, au XIXe siècle, certains patrons d’industrie comme Henri Schneider pratiquent « le paternalisme » en organisant des oeuvres de bienfaisance pour leurs ouvriers : création de logements, d’hôpitaux. Les premières assurances sociales datent de la fin du XIXe siècle et du premier XXe siècle (assurances contre la maladie, l’invalidité, la vieillesse). Mais à la veille de la Seconde Guerre mondiale, cette protection ne bénéficie qu’à un petit nombre de salariés. Les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 qui fondent la Sécurité Sociale inaugurent une ère nouvelle. Elles affirment 4 principes : la généralisation de la Sécurité Sociale à toute la population, la mise en place d’un régime unique et la protection pour l’ensemble des risques, la solidarité à travers un financement assuré par les cotisations ouvrières et patronales et l’autonomie de gestion. Le préambule de la Constitution de 1946 (alinéa 11), en affirmant que « la nation garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs », confirme d’une certaine manière cette création par son inscription dans la loi fondamentale de la République.

7.3 Les enjeux actuels

A l’âge post-industriel, la solidarité apparaît comme un devoir à la fois pour l’individu et pour l’Etat. Elle est liée à la valeur de fraternité comme le proclame la Déclaration Universelle des Droits de l’homme de 1948 (article Ier) et elle est garantie par l’Etat comme l’indique le Préambule de la Constitution de 1946 (alinéa 11). La solidarité peut s’exercer sur le plan individuel, dans la vie quotidienne par l’individu dans sa famille, dans son travail, dans son quartier, dans sa ville ou sur le plan collectif par les individus groupés en associations (loi 1901, c’est à dire sans but lucratif) comme le Secours populaire, les Restos du coeur, la Banque alimentaire, ATD Quart Monde... Ce combat, au quotidien, est symbolisé depuis 1992 par l’organisation, le 17 octobre, d’une journée mondiale de refus de la misère à Paris au Trocadéro, sur le parvis des Libertés et des Droits de l’homme.
La solidarité instituée c’est à dire mise en oeuvre par des institutions comporte trois niveaux : Au niveau local, l’aide sociale est financée par les communes et les départements (Direction des Affaires médicales et sociales). L’aide sociale s’occupe de l’enfance et de la famille, des adultes isolés, des personnes handicapées, des personnes âgées, des jeunes en difficulté ; Au niveau national, l’évolution de la Sécurité Sociale depuis plus de 70 ans s’inscrit dans une solidarité de plus en plus active liée à la crise économique qui atteint la France depuis 1974. La montée du chômage entraîne l’apparition de nouvelles formes de pauvreté et l’exclusion sociale. En 1988, l’Etat crée le Revenu Minimum d’Insertion (RMI) qui vise à réinsérer dans les circuits économiques les Français en voie de marginalisation. Cette loi, expression de la solidarité nationale, reprend d’ailleurs les termes exacts du préambule de la Constitution de 1946 : « Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation de l’économie et de l’emploi, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ». Le RMI a été remplacé en 2008 par le RSA (Revenu de solidarité active)
Au niveau international, la solidarité est définie par La Déclaration Universelle des droits de l’homme de 1948 (article 25) qui affirme : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux [...] ». Elle s’exerce dans différentes directions. Les organisations internationales qui travaillent dans le cadre de l’ONU ont chacune leur domaine d’action. L’UNICEF, Fonds des Nations Unies pour l’Enfance, s’occupe plus spécialement des enfants, le HCR, Haut Commissariat aux Réfugiés, basé à Genève, s’occupe des personnes qui fuient leur pays pour des raisons économiques ou politiques, l’UNESCO dont le siège est à Paris s’efforce de développer l’éducation et la culture dans l’ensemble des pays du monde, la FAO s’occupe des problèmes liés à la malnutrition et à la sous-nutrition. L’action humanitaire, même si elle est souvent contestée dans sa mise en oeuvre, ne l’est jamais dans ses buts qui sont de sauver des individus ou des groupes menacés de calamités de toutes sortes. Les Etats envoient des aides en hommes, en nourriture, en médicaments, en matériels de toutes sortes dans le cas de catastrophes naturelles, d’épidémies, de famines... Les ONG, organisations non gouvernementales, comme Médecins du monde, Amnesty International, La Croix-Rouge pratiquent l’aide humanitaire à l’échelle mondiale. Enfin, la solidarité internationale n’est pas uniquement économique et sociale. Elle peut être aussi politique. En effet, afin de sauver des populations entières menacées d’extermination, une résolution a été adoptée par les Nations-Unies : le droit d’ingérence humanitaire qui a permis notamment à la communauté internationale d’intervenir dans différentes régions du monde.

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