vendredi 24 avril 2015

Les concepts organisateurs de la formation du citoyen dans les programmes (9/10)

9 LA LOI
 
9.1 Définitions

La loi est une règle faite par les hommes. Selon Montesquieu, « les lois sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses ». C’est un projet, une action qui se propose d’anticiper sur le futur et par là de changer la société. La loi s’efforce aussi de mettre de la raison dans la violence des hommes. Elle unit la nécessité et la liberté et elle se situe au point de rencontre entre la volonté individuelle et la volonté générale. Etant la source du droit, la loi exprime tout à fait l’ordre juridique. Elle énonce les principes auxquels les individus doivent se soumettre. Cette conception correspond à celle d’un Etat de droit.
Tous les textes adoptés par les pouvoirs publics n’ont pas la même valeur. C’est ce qu’on appelle la hiérarchie des normes juridiques. La Constitution et son préambule se situent au sommet de la hiérarchie. Le domaine de la loi est défini dans l’article 34 de la Constitution de 1958. Depuis 1958, il n’a cessé de s’étendre. On distingue différents types de lois : les lois parlementaires ou ordinaires sont des lois de droit commun ; les lois de finances qui déterminent les ressources et les charges de l’Etat qui respectent une procédure spécifique et un calendrier précis ; les lois de programme ou d’orientation déterminent les objectifs de l’action économique et sociale de l’Etat (par exemple la loi pour la refondation de l’Ecole) ; les lois organiques sont des mesures d’application de la Constitution et sont soumises au Conseil constitutionnel ; les lois référendaires ont pour auteur le peuple. Les textes réglementaires (décrets, arrêtés, circulaires, règlements...) émanent du pouvoir exécutif ou des autorités administratives qui lui sont rattachées ; Les ordonnances permettent au Parlement d’étendre temporairement par une loi la compétence réglementaire du gouvernement. Le gouvernement peut alors, par ordonnance, modifier des lois existantes (article 38). Tous les textes doivent être conformes à la Constitution qui est la Loi fondamentale. La loi, votée par le Parlement et promulguée par le Président de la République, vient, dans la hiérarchie des normes juridiques, après la Constitution et les normes internationales et communautaires.
 
9.2 Histoire

Depuis qu’ils vivent en société, les hommes ont établi des règles, ont codifié les rapports entre les individus. Le recueil de lois le plus ancien de l’histoire de l’humanité connu à ce jour est le Code d’Hammourabi. Il s’agit d’une stèle qui comprend un recueil de 282 arrêts en écriture cunéiforme et qui a été découverte à Suse au début du XXe siècle. Ce recueil de lois, rédigé vers 1730 avant JC, pendant le règne d’Hammourabi, roi de Babylone, qui confirme ou modifie une jurisprudence antérieure en matière de droit criminel (principe du talion avec quelques adoucissements), de droit commercial, de droit familial (statut de l’épouse, héritages) manifeste un souci d’équité individuelle. Même s’il n’est pas un véritable « code », il exerce une grande influence sur tout l’Orient ancien.
Les Romains ont sans doute « inventé » le droit. On sait aussi que c’est autour du citoyen que le droit s’est organisé à Rome. Ce que nous désignons aujourd’hui sous le terme de droit romain est réuni dans le Corpus Iuris Civilis (littéralement recueil de droit civil) qui a été élaboré au VIe siècle sous les ordres de l’empereur Justinien et qui est le fondement de notre droit civil moderne.
A partir du Moye Age, les rois de France ont rédigé leurs décisions par écrit. C’est à la fin du XIIIe siècle que les juristes, appelés à l’époque les légistes, se réfèrent au droit de façon plus systématique. Parmi eux, on distingue les Actes royaux qui sont des écrits officiels sont signés du Roi et ont force de loi. On distingue les édits qui traitent d’un sujet en particulier comme l’édit de Villers-Cotterêts ou l’Edit de Nantes, les ordonnances qui sont des textes de portée plus générale comme l’ordonnance de Saint-Louis sur la Réformation du royaume de 1254 ou le Code noir de 1685, les lettres comme les lettres de cachet qui étaient la manifestation de la justice du roi et les arrêts qui sont les décisions du Conseil du roi.
La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 définit la loi dans sa conception moderne.Elle énonce que la loi s’applique à tous et met en évidence les notions de protection et de sanction. L’article 16 insiste sur l’idée que la loi permet de mieux garantir les droits en définissant la liberté, l’égalité et en permettant le recours. Tous les actes illégaux, c’est à dire contraires à la loi, doivent être sanctionnés, que leurs auteurs soient des individus ou l’Etat. En 1800, Napoléon Bonaparte, s’inspirant d’un travail décidé par l’Assemblée Constituante, charge un groupe de juristes de rédiger un projet de code unifiant le droit pour tout le pays. Ce recueil qui comprend 36 lois est promulgué le 21 mars 1804 sous le nom de Code civil des Français. Il est resté, tout au long du XIXe et de la première moitié du XXe siècle, la base de nos lois en matière de droit civil.
 
9.3 Les enjeux actuels

L’initiative des lois, c’est à dire la faculté de pouvoir proposer un texte de loi, appartient conjointement au gouvernement et au Parlement. S’il s’agit du gouvernement, c’est un projet de loi. S’il s’agit des députés ou des sénateurs, c’est une proposition de loi. On distingue trois étapes dans l’élaboration de la loi. Le projet ou la proposition est examiné(e) par l’une des 6 commissions permanentes et spécialisées de l’Assemblée. En général, le texte est adopté par la commission qui l’examine mais avec des amendements c’est à dire des modifications. Il est ensuite inscrit à l’ordre du jour, discuté d’une manière générale, puis discuté article par article ainsi que, le cas échéant, les amendements qui s’y rapportent. La navette commence entre les deux assemblées. En cas de désaccord, après la médiation d’une CMP (commission mixte paritaire), c’est finalement l’Assemblée qui a le dernier mot car elle est l’émanation du suffrage universel direct et, à ce titre, représente la Nation. Le texte doit être promulgué par le Président de la République et publié au journal officiel. Il est ensuite complété par des décrets d’application. Cette procédure peut paraître complexe. Mais il faut souligner que le fonctionnement de la démocratie nécessite le débat, la discussion, et que le respect de règles, d’une procédure, participe également de la vie démocratique.
La loi est souvent critiquée, détournée. On la trouve quelquefois incomplète, injuste. On parle aussi très souvent de « vide juridique » ou au contraire on dénonce la dérive du juridisme. En fait, la loi est le résultat de compromis, elle doit convenir à tous, envisager tous les cas de figure. La société évolue et la loi doit également évoluer sous peine de ne plus être appliquée. Elle doit répondre aux besoins de la société, à la demande sociale. Malgré ses limites, la loi est inséparable de l’idée d’Etat de droit.

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