Mais de toute façon, la démocratie est mal posée. Ses trois pouvoirs sont attribués de façon incohérente et leurs limites sont mal définies.
L'exécutif, dont le chef (le Président de la République) est désigné au suffrage universel, empiète sur le judiciaire puisque le(la) Garde des Sceaux est désigné(e) par ce Président comme n'importe quel ministre.
Le pouvoir judiciaire s'obtient par des nominations et ne dépend pas d'élections.
Le pouvoir législatif, pourtant attribué par des élections, ne représente pas vraiment le peuple français puisque deux partis politiques (UMP et PS) y sont sur-représentés et que des millions, pour ne pas dire des dizaines de millions de citoyens, n'y sont absolument pas représentés.
Faut-il essayer d'améliorer la démocratie :
- en imposant a minima aux candidats aux élections d'avoir un casier judiciaire vierge et en les soumettant à des examens publics, face à des jurys de professionnels du droit, de l'économie, etc.,
- et en exigeant que les électeurs aient suivi une formation voire aient obtenu un permis de voter ?
Ou faut-il abandonner l'idée même de démocratie ?
D'autres options existent en effet. La technocratie/méritocratie par exemple.
On attribuerait les mandats en fonction des compétences. Pour l'exécutif qui, au sens littéral, se bornerait à exécuter, il faudrait les meilleurs administrateurs, les meilleurs hauts fonctionnaires, en un mot : les ENArques. Le Président et les ministres seraient des majors de promotion. Tous ceux qui vont à la Cour des Comptes, celle qui donne de si précieux conseils, mais des conseils qui sont rarement écoutés, et bien ceux-là passeraient du rôle de conseillers au rôle d'exécutants.
Pour le judiciaire, on resterait quasiment comme aujourd'hui. Des diplômes, une carrière pour étoffer son expérience, et une progression dans la hiérarchie au mérite, selon des critères internes, propres aux juristes.
Reste le législatif. Ceux qui font les lois ... Hum, là, c'est quand même l'expression de la volonté du peuple. Peut-être que c'est là que résiderait le dernier bastion de la vraie démocratie. Un suffrage universel, à la proportionnelle totale : un seul tour aux élections, avec des listes pour l'ensemble de la nation. Chaque liste recevant 100 000 votes aurait un député à l'Assemblée nationale.
Aux élections présidentielles de 2012, il y avait 46 millions de Français inscrits sur les listes électorales (46 028 542 très exactement). En appliquant cette donnée au suffrage universel que j'imagine dans le présent article, cela nous ferait donc 460 sièges de députés à pourvoir.
Voici quels ont été les résultats globaux en 2012 : 35 883 209 suffrages ont été exprimés, 701 190 bulletins ont été blancs ou nuls et 9 444 143 électeurs se sont abstenus. Dans ma simulation de politique-fiction, cela signifierait que seuls 358 sièges ont été attribués et donc que ... 102 resteront vides !
- La liste du Parti socialiste, soutenu par le Parti radical de gauche, le Mouvement républicain et citoyen, Génération écologie et Cap21, dirigée par François Hollande, avec 10 272 705 suffrages exprimés, obtiendrait 102 sièges.
- La liste de l'Union pour un mouvement populaire, soutenu par le Parti radical, le Nouveau Centre, le Parti chrétien-démocrate et Chasse, pêche, nature et traditions, dirigée par Nicolas Sarkozy, avec 9 753 629 suffrages exprimés, obtiendrait 97 sièges.
- La liste du Front national, dirigée par Marine Le Pen, avec 6 421 426 suffrages exprimés, obtiendrait 64 sièges.
- La liste du Front de gauche, dirigée par Jean-Luc Mélenchon, avec 3 984 822 suffrages exprimés, obtiendrait 39 sièges.
- La liste du Mouvement démocrate, dirigée par François Bayrou, avec 3 275 122 suffrages exprimés, obtiendrait 32 sièges.
- La liste d'Europe Écologie Les Verts, dirigée par Eva Joly, avec 828 345 suffrages exprimés, obtiendrait 8 sièges.
- La liste de Debout la République, dirigée par Nicolas Dupont-Aignan, avec 643 907 suffrages exprimés, obtiendrait 6 sièges.
- La liste du Nouveau Parti anticapitaliste, dirigée par Philippe Poutou, avec 411 160 suffrages exprimés, obtiendrait 4 sièges.
- La liste de Lutte ouvrière, dirigée par Nathalie Arthaud, avec 202 548 suffrages exprimés, obtiendrait 2 sièges.
- La liste de Solidarité et progrès, dirigée par Jacques Cheminade, avec 89 545 suffrages exprimés, n'obtiendrait pas de siège car sous la barre des 100 000. A moins que ...
En additionnant les sièges obtenus directement par toutes ces listes, j'obtiens le nombre 354 au lieu des 358 annoncés avec la règle simple de "100 000 suffrages exprimés = 1 siège à l'Assemblée nationale". On devrait donc ajouter une règle complémentaire pour que plus de 400 000 électeurs français ne soient pas lésés. Cette règle serait : "un siège supplémentaire pour les listes avec le surplus de votes le plus proche de la centaine de milliers de suffrages exprimés" :
- PS : 72 705
- UMP : 53 629
- FN : 21 426
- Front de Gauche : 84 822
- MoDem : 75 122
- Europe Ecologie : 28 345
- Debout la République : 43 907
- NPA : 11 160
- LO : 2 548
- Solidarité et Progrès : 89 545
Ceux qui obtiendraient ces sièges supplémentaires seraient ainsi :
- Solidarité et Progrès (un siège unique pour sa tête de liste Jacques Cheminade), 89 545,
- Front de Gauche, 84 822,
- MoDem, 75 122,
- et PS, 72 705.
5 commentaires:
Pour qu'une loi soit votée, il faudrait au moins la moitié des sièges occupés (en rappelant que 102 resteront vides puisque le peuple français en a décidé ainsi en s'abstenant ou en votant blanc ou nul).
La moitié des 358 sièges occupés, c'est 179 sièges.
Aucune liste, aucun parti politique n'aurait eu cette majorité en 2012 puisque le PS et ses alliés (inclus dans al liste) n'ont obtenu que 103 sièges.
Toutefois, on l'a vu ensuite, cette liste a reçu le soutien (certains diraient la soumission) d'Europe Écologie Les Verts. Mais cela ne lui apporterait que 8 sièges supplémentaires. Soit un total de 111. Pas encore les 179 nécessaires.
Difficile me direz-vous ? Bloquant insisterez-vous ? Moi je dis : c'est la volonté du peuple ! Qu'elle soit respectée dans sa diversité et aux députés de trouver le meilleur compromis !
Dans cette configuration, ce serait aux députés de l'Assemblée nationale de proposer les lois, de les adapter pour qu'elles reflètent l'opinion, et reçoivent l'aval d'au moins la moitié de l'Assemblée.
L'exécutif se contenterait d'exécuter.
Une autre option que je n'ai pas évoquée dans cet article car je n'étais pas convaincu par elle à l'époque de la rédaction de l'article est : le tirage au sort pour désigner un échantillon représentatif de la population.
Cette représentativité statistique est généralement admise pour les sondages d'opinion au-delà de la barre des 1000 personnes.
Au lieu des 460 sièges évoqués dans l'article ci-dessous, on pourrait adopter ce nombre rond de 1000 députés non pas élus mais tirés au sort. Ou alors un nombre intermédiaire entre 460 et 1000; par exemple le double de 460 : 920.
Après tout, les citoyens d'Athènes, inventeurs de la démocratie, s'appuyaient sur la Boulê, un Conseil de 500 personnes seulement pour s'auto-gouverner (mandats de un an non renouvelables).
Au début de l'article, j'écrivais ceci
Faut-il essayer d'améliorer la démocratie :
- en imposant a minima aux candidats aux élections d'avoir un casier judiciaire vierge et en les soumettant à des examens publics, face à des jurys de professionnels du droit, de l'économie, etc.,
- et en exigeant que les électeurs aient suivi une formation voire aient obtenu un permis de voter ?
Ou faut-il abandonner l'idée même de démocratie ?
Mon erreur en 2014 était de confondre "démocratie" (où le peuple s'exprime directement) et "régime représentatif" (avec des décideurs désignés par l'élection).
Avec le recul (nous sommes en 2020 et j'ai beaucoup appris en écoutant Étienne Chouard), il fallait donc comprendre : Faut-il abandonner l'idée même de république c'est-à-dire de système "représentatif" ?
J'ajoute que la proportionnelle totale que j'ai décrite (y compris en laissant des sièges vides pour les bulletins blancs et l'abstention) ne correspondrait pas à la réalité de la population. En effet, les chiffres annoncés (le partage des sièges occupés) sont la distribution de ces sièges entre des partis politiques. Or, il y a au moins trois problèmes majeurs avec les partis politiques :
- très peu de Français sont membres de partis politiques (moins d'1% des adultes en âge de voter) et donc ils ne sont pas représentatifs de la population
- ce sont des organisations hiérarchiques et, très souvent, les députés votent les lois sans même prendre connaissance de leur contenu juste en écoutant le chef du parti
- enfin, par nature, les partis sont partisans. Ils auront toujours tendance à privilégier les intérêts du parti avant ceux de l'ensemble de la population.
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