vendredi 21 décembre 2012

Pythagore de Samos, grec, -560?/-480?


Astronome, philosophe, musicologue, ce célèbre savant, disciple de Thalès, nous est connu par ses disciples et successeurs, les Pythagoriciens (également dits Pythagoréens ou Pythagoristes).
Aucun écrit ne nous est parvenu. Pour plus d'objectivité, on doit se fier principalement aux historiens de l'Antiquité tels Hérodote, Proclus, Diogène Laërce. Personnage mythique (il laisse se propager la rumeur selon laquelle il serait le fils d'Apollon), Pythagore créa son école à Crotone, laquelle devint rapidement une secte aux règles de vie très sévères. Devenant alors dérangeant, persona non grata, il mourra assassiné dans des conditions obscures, certains historiens avançant l'incendie de son école.

On attribue à Pythagore, en son école, l'origine du terme mathématiques au sens grec de mathematikos = celui qui veut apprendre (scientifiquement), forgé sur mathêma = ce qui est enseigné, la connaissance.
Pythagore est le premier théoricien de la technique des nombres, en un mot : l'arithmétique, sur laquelle il fonda sa philosophie : l'harmonie du Monde est régie par les nombres entiers, le pair, l'impair et la décade : la dizaine.
Les Pythagoriciens annoncent là une rupture avec le système sexagésimal des Chaldéens dont l'usage se perpétuera cependant en astronomie.

Selon certains auteurs ( ci-après), Pythagore, ou plus certainement ses disciples de l'école de Crotone, auraient affirmé la sphéricité de la Terre tournant, ainsi que les autres astres (soleil compris), autour d'un feu central invisible (Hestia = le Foyer).
Cette vision pyrocentrique de l'univers fut en fait introduite par Philolaos de Crotone, philosophe et disciple direct de Pythagore, et annonce la théorie héliocentrique (le Soleil est au centre de notre système planétaire) hélas mise à l'écart par Eudoxe et Aristote. Bien que défendue par le grand astronome Aristarque un siècle et demi plus tard, le non moins célèbre Ptolémée prôna le géocentrisme (la Terre est au centre de l'Univers, le Soleil tourne autour) et plongea le monde dans l'erreur pendant 2000 ans jusqu'à l'entrée en scène de Galilée et de Copernic.

Pythagore et les Pythagoriciens (que sais-je n° 2732) de J.-F.- Mattei (1993) :
"Nous pouvons admirer cet étrange système de Philolaos qui eut peu de succès en son temps et dont les trois hardiesses prophétiques attendront 2000 ans avant de se réaliser : 1) la Terre et tous les astres sont sphériques 2) la Terre est un corps céleste de second plan 3) la Terre n'est pas en repos et n'occupe pas le centre du monde, comme ce sera le cas chez Platon et Aristote."

Nouveau Larousse illustré en 7 volumes (1906, sous la dir. de Paul Augé), vol. 1, au titre Astronomie :

"Pythagore enseignait les deux mouvements de la Terre sur elle-même et autour du Soleil; il avait des vues élevées sur les systèmes planétaires mais elles manquaient de preuve, et leur vérité  fut complètement méconnue."

Dictionnaire Hachette encyclopédique (1997) :
"il entrevit le mouvement de la Terre sur elle-même et enseigna qu'elle était sphérique".

Astronomie moderne de R. Tocquet, préface de Louis Leprince-Ringuet (1965) :
"(...) il est difficile de préciser parmi les doctrines pythagoriciennes, celles qui appartiennent en propre au  Maître? Quoi qu'il en soit, les Pythagoriciens enseignaient que la Terre et le Soleil sont sphériques, que le Soleil décrit sur la sphère céleste un grand cercle, l'écliptique, dont le plan est incliné sur celui de l'équateur et il y a tout lieu de penser qu'ils enseignaient également que les planètes et les comètes tournent autour du Soleil."

Pythagore et les Pythagoriciens (que sais-je n° 2732) de J.-F.- Mattei (1993) :
"Pythagore enseignait la sphéricité de la Terre et du Monde non pour des raisons empiriques (comme les contours de l'ombre durant les éclipses) mais pour des raisons théoriques d'ordre harmonique, le plus beau des solides étant la sphère." : Pythagore parlait de la musique des sphères (les astres) que nous n'entendions pas car notre oreille, trop habituée, ne parvenait pas à les discerner...

Le célèbre théorème de Pythagore et les relations métriques dans le triangle rectangle :
Plimpton 322 Il affirme que dans un triangle ABC rectangle en A, le carré du côté qui sous-tend l'angle droit (hypoténuse) est égal à la somme des carrés des deux autres côtés :    cliquer sur la tablette pour l'agrandir
BC2 = AB2 + AC2
 
Ce résultat, que Pythagore ne semble pas avoir prouvé, est en fait antérieur au célèbre philosophe : on le retrouve 2000 ans avant J.-C. dans une tablette babylonienne cunéiforme (Plimpton 322, Université de Columbia, New York, USA).
Réciproquement :          
Si, dans un triangle ABC, le carré d'un côté est égal à la somme des carrés des deux autres, alors ce triangle est rectangle (en le sommet opposé au plus grand côté qui est alors son hypoténuse).
Le plus beau triangle de l'histoire des mathématiques est, sans conteste, le triangle de côtés 3, 4 et 5 : il est rectangle et est parfois nommé triangle d'or mais cette appellation est plutôt réservée à Roger Penrose. Pour ce triangle 3, 4, 5, on parle plutôt de triangle égyptien.

Les démonstrations du célèbre théorème, et de sa réciproque, sont présentes dans les Eléments d'Euclide et font l'objet des deux dernières propositions 47 et 48, du livre I. Selon certains auteurs, Pythagore aurait sacrifié, pour fêter sa découverte, entre 1 boeuf et tout un troupeau de 100 bœufs (soit une hécatombe, du grec hékaton = cent et boûs = boeuf) selon une tradition festive et religieuse de l'époque. Curieux cependant pour une secte végétarienne dont Pythagore était le ''gourou''...

1. Le triangle ABC est rectangle en C. AB = 20 et BC = 10. Calculer AC.  Rép : 103

2. Le triangle isocèle en A vérifiant AB = 9,99 et BC = 14,14 est-il rectangle ?
Rép : non.
  on ne dira pas qu'il est presque rectangle ou qu'il est rectangle à 0,01 près !!! Il n'est pas rectangle. Point !..

3. Le triangle ABC vérifie BC = 7 cm, AC = 6 cm et ACB = 31°. Construire avec soin ce triangle. Est-il rectangle ? Rép : non car si ABC est rectangle, on doit avoir cos31° = 6/7, or...
Autres relations métriques dans le triangle rectangle :
De cette relation fondamentale découle d'autres égalités fort utiles, dites relations métriques dans le triangle rectangle comme (H désignant le pied de la hauteur issue de l'angle droit) :
 
   AB2 = BH x BC
   AC2 = CH x CB
   AH x BC = AB x AC ,  AH2 = HB x HC  ,  1/AH2 = 1/AB2 + 1/AC2
Preuves : la première relation (donc aussi la seconde) peut être exprimée au moyen de la propriété de Thalès en remarquant que les triangles rectangles ABC et ABH sont semblables (mêmes mesures d'angles), donc quitte à modifier la figure en remplaçant ABH par AB'A' (ci-dessus) afin d'obtenir une configuration de Thalès avec AB' = BH et (B'A')//(BC), on a :
AB'/AB = B'A'/BC, soit BH/AB = AB/BC, soit AB2 = BH x BC.
La troisième relation indiquée AH x BC = AB x AC, est évidente si on la considère en tant qu'égalité d'aires : ABC est un triangle d'aire (AH x BC)/2  mais aussi la "moitié d'un rectangle d'aire (AB x AC)/2.
La quatrième relation s'obtient en élevant au carré la 3ème et en utilisant la 1ère et la seconde pour remplacer AB2 et AB2. La dernière est conséquence de AH x BC = AB x AC : réduire au même dénominateur le membre de droite, utiliser ensuite que AB2 + AC2 = BC2...

Orthographe : un seul h à hypoténuse! Ne pas confondre avec hypothèse qui a deux h... : du grec hypothesis avec un sens étymologique proche, il est vrai :
  • hypoténuse : du grec hupo = sous et teinein = tendre : côté qui sous-tend l'angle droit.
  • hypothèse : du grec hupo = sous et theînai = poser , thesis = action de poser, dans le sens d'un propos que l'on place à la base de son discours et sur lequel on développe sa pensée (thèse).
 Une preuve élémentaire utilisant les aires se comprend aisément par la figure de gauche : on considère un carré de côté a + b; on prouve facilement que le quadrilatère intérieur (en vert) est un carré de côté noté c. Dans ces conditions :
4 x ab/2 + c2 = (a + b)2 = a2 + b2 + 2ab. Soit : c2 = a2 + b2
Cette preuve n'est pas sans rappeler celle du mathématicien indien Bhaskara.

4 commentaires:

Je a dit…

Pendant son adolescence, comme tous les aristocrates grecs, Pythagore est un athlète ( confer : Augustin d'Hippone, Lettres, III, 137, 3. Lucien de Samosate, Le coq, 8.).

Selon une tradition, Pythagore participe aux Jeux olympiques à l'âge de 17 ans. Ce serait entre la 57e olympiade (-552) et la 48e (-588) selon Ératosthène. Il remporte toutes les compétitions de pugilat (sport de l'Antiquité comparable à la boxe).

Il est donc olympionique (vainqueur olympique) chez les "paides" (catégorie d'âge inférieure aux "andres", hommes adultes).

Bien plus tard, lorsque Pythagore aura fondé son école de philosophie et de mathématiques à Crotone, il aura un gendre qui lui aussi sera un athlète extrêmement célèbre.

Les sources divergent sur le nombre d'enfants que Pythagore aurait eus de Théanô : deux ou quatre. Les noms cités sont : Télaugès (qui succéda à son père et qui, selon certains, enseigna à Empédocle), Mnésarque, Myïa (qui épousa Milon de Crotone), Arignotè.

Je a dit…

Milon fils de Diotimos de Crotone était un aristocrate d'une cité de la "Grande Grèce", au sud de l'Italie. Couronné une première fois à Olympie alors qu'il n'était qu'un adolescent (en 540 av. JC), il ajouta ensuite 5 nouvelles couronnes consécutives de 532 à 516 av. JC. Il complétera ces 6 titres olympiques par 7 victoires aux Jeux Pythiques (épreuves presque aussi prestigieuses qui se déroulaient à Delphes tous les 4 ans).

Milon ne connaîtra sa première défaite qu'en 512 av. JC, pas parce qu'il était moins puissant que son adversaire mais parce que celui-ci l'épuisa à force d'éviter ses attaques, alors que Milon avait largement dépassé la quarantaine.

Cet homme doté d'une force surhumaine aimait à l'exhiber en tenant dans sa main une grenade et en défiant quiconque de lui ouvrir les doigts ou d'écraser le fruit en les serrant. Pour s'entraîner, il soulevait un veau tous les matins et le portait jusqu'à ce qu'il devienne adulte.

Il fut 5 fois periodonique à l'âge adulte après l'avoir été enfant, ce qui n'arriva plus à un jeune athlète avant Moschos de Colophon (en 200 av.JC).Une épigramme attribuée à Simonide attribue une septième victoire olympique à Milon : "Milone Olympioniko Eptakis", quand Timasithéos de Crotone avait refusé de se mesurer à lui. Milon était non seulement imbattable à la lutte debout (orthopale) mais aussi à la lutte de soumission, discipline non olympique (nommée kato pale "lutte totale" ou alyndisis "lutte allongée").

A la fin de sa carrière sportive, sa cité reconnaissante érigea une statue en son honneur et Milon la posa lui-même sur son socle. On estima le poids de la statue à 900 kg !

Mais Milon n'était pas qu'un lutteur. Disciple du philosophe et mathématicien Pythagore, dont il avait épousé la fille Myïa, il était prêtre d'Héra du Lakinion et il aurait combattu revêtu d'une peau de lion, lors de la guerre contre Sybaris. C'était un cavalier réputé et il excellait dans l'art de la guerre.

Source : https://le-meilleur-de-tous-les-temps.blogspot.com/2007/07/1-en-lutte-orthopale.html

Je a dit…

La "Fondation du Monde Hellénique" fournit, dans ses archives, une base de données avec tous les vainqueurs olympiques antiques (voir le détail à l'adresse suivante : http://www.fhw.gr/olympics/ancient/en/db.html ).

C'est une base de données incontournable : http://www.fhw.gr/olympics/ancient/classical/. On y trouve la plupart des vainqueurs connus jusqu'au IIIème siècle après J.C. Il s'agit peut-être de la liste de Sextus Julius Africanus (du IIIème siècle de notre ère) qui nous fut transmise par Eusèbe Pamphile, évèque de Césarée, ou une copie du fameux papyrus d'Oxyrrhynchos (datant de la même époque, le IIIème siècle). Ils ont fourni aux archéologues modernes les résultats fragmentaires de 263 olympiades (sur les 293 qui eurent lieu de 776 av. JC à 393 ap. JC), dans 32 disciplines, pour plus de 170 cités, plus de 600 vainqueurs, et un total de 941 victoires répertoriées.Le chercheur italien Luigi Moretti réussira à porter le nombre de vainqueurs connus à 1029; décrit dans son mémoire de recherche : Olympionikai, I vincitori negli antichi agoni olimpici

Source : https://le-meilleur-de-tous-les-temps.blogspot.com/2007/04/principales-sources-dinformations.html

Je a dit…

Dans le premier commentaire, j'écrivais : "Il est donc olympionique (vainqueur olympique) chez les "paides" (catégorie d'âge inférieure aux "andres", hommes adultes)."

Mais, après consultation de la base de données de la Fondation du Monde Hellénique, j'ai pu voir que la catégorie "enfants" ("paides") n'avait été introduite qu'en 540 avant J.-C. lors de la 60ème olympiade; et c'est un certain Leokreon de Keos qui l'emporta.

Pythagore de Samos s'est donc imposé à 17 ou 18 ans chez les hommes adultes (toutes catégories d'âge confondues) tout comme l'a fait Cassius Clay (futur Mohamed Ali) lors des Jeux Olympiques de Rome en 1960.

La Fondation du Monde Hellénique a choisi la date de 588 avant J.-C. (celle énoncée par Diogène Laërce) pour placer la victoire de Pythagore de Samos. L'autre date (552 avant J.-C., hypothèse d’Ératosthène) est laissée vacante dans la base de données.

A noter qu'à la quatrième édition après celle de Pythagore de Samos, c'est le règne de plus de Tisandros de Naxos en Sicile qui commence. Ce pugiliste a le plus gros palmarès de l'Antiquité en pugilat avec notamment quatre titres olympiques : 572 avant J.-C. puis 568, 564 et 560.