ASSEMBLÉE NATIONALE - Quel est le métier de nos députés? Nous ressemblent -ils?
Viennent-ils de milieux aisés? Il y a t-il encore des députés ouvriers? Quel est
le métier qui domine à l’Assemblée? Autant de questions qui nous ont taraudé au
Huffington Post, alors que l’Assemblée comporte 40% de nouveaux
députés.
Fonctionnaires et enseignants forment le gros des
troupes
Premier constat: l’Assemblée n’a pas beaucoup changé ! Les fiches des
députés, qui viennent tout juste d’être remplies, montrent un profil à peine
différent. La nouvelle Assemblée compte surtout des fonctionnaires et des
enseignants, au total 185, à peine plus que dans l’ancienne, qui en comptait
172. On trouve aussi beaucoup de cadres, d’avocats et de médecins. Le nombre de
cadres n’a pas bougé, mais celui des médecins a chuté : 21 contre 34 dans la
précédente, et seulement 6 avocats en moins, sur un total aujourd’hui de
32.
A noter, comme le rappelle Libération, ce décompte n’est pas
définitif car il correspond à la déclaration de candidature des futurs élus
auprès du ministère de l’Intérieur.
L’Assemblée est encore loin de
refléter la population
Pourquoi tant de fonctionnaires et d’enseignants?
Cette forte proportion de députés issus du secteur public s’explique notamment,
selon une étude du chercheur Luc Rouban, parue dans les Cahiers du Cevipof,
“parce que l’absence de risques professionnels encourage davantage les salariés
du public à candidater”. Résultat : les professeurs ont toujours été nombreux,
formant jusqu’à 20% des rangs en 1981 et 17% en 1988. (mais 11% en 2007 et
entre 6 et 10% entre 1958 et 1973). Enseignants et fonctionnaires réunis
formaient même près de 52% de l’Assemblée en 1981 !
La classe moyenne a
gonflé...
En 50 ans, la physionomie de l’Assemblée a quelque peu évolué. Les
débuts de la Ve étaient marqués par une très forte proportion des catégories
supérieures d’un côté, avec un contingent de classe moyenne plus faible et
quelques ouvriers au bout de la chaîne. “On est passé d’une Assemblée où les
catégories supérieures du privé sont fortement représentées à une Assemblée
dominée par les classes moyennes”, explique Luc Rouban dans le
Figaro.
Une "démocratisation" de l'Assemblée ? Il faut apporter à cela
plusieurs nuances. Tout d'abord les "classes moyennes" de l'Assemblée sont des
classes moyennes des couches supérieures, comme le fait remarquer Louis Maurin,
président de l'Observatoire des inégalités, contacté par le Huffington
Post.
...aux dépens des ouvriers
Mais surtout, même si les bancs de
l’Assemblée n’ont jamais regorgé de cols bleus, aujourd’hui ils ont disparu. Ils
étaient 6% en 1978 et près de 5% en 1981, et cette proportion est ensuite
retombée à un pourcent en 2007, puis zéro en 2012. Alors que la population
compte, elle, près de 12,5% d'ouvriers, selon les chiffres de l'INSEE.
Il
y avait aussi bien plus de députés d’origine modeste aux débuts de la Ve
République. “Qu'ils soient gaullistes ou communistes, les premiers députés de la
Ve République étaient souvent d'anciens résistants, et donc presque tous issus
de milieux modestes. Cette génération a naturellement commencé à disparaître
dans les années 1980, pour laisser la place à des élus provenant de plus en plus
des classes moyennes”, explique le sociologue. Et même, si l'on remonte à la
première législature de la IVe République, soit entre 1946 et 1951, les
catégories populaires, ouvriers et employés confondus, représentaient près de 19
% des députés.
PRÉCISION: Comme l'a fait remarquer un de nos lecteurs, le
député Patrice Carvalho, qui regagne les rangs de l'Assemblée cette année, a
fait ses débuts dans l’hémicycle vêtu de son bleu de travail en 1997. Ouvrier
mécanicien à ses débuts, le député PCF de la 6e circonscription de l'Oise est
aujourd'hui auditeur responsable en environnement,en hygiène industrielle et en
sécurité comme l'indique sa fiche parlementaire et comme cela nous a été
confirmé par sa permanence à l'Assemblée nationale.
De moins en moins
d'agriculteurs
Pour certaines professions, l’Assemblée semble refléter
parfaitement les évolutions. Ainsi la catégorie des agriculteurs, qui n’a cessé
de baisser, avec environ 12% d’agriculteurs-députés à la fin des années 1950 et
au début des années 1960, pour seulement 3 à 4% depuis 1993, ce qui est assez
proche de la proportion d’agriculteurs dans la population active, qui est autour
de 2 à 3% aujourd’hui.
Mais pour la plupart des autres professions, il
subsite toujours un fossé important entre la population et les élus. Ce qui fait
regretter au président de l'Observatoire des Inégalités, que ces disparités ne
soient pas davantage mises en avant. "Dans le débat public, on se concentre sur
la présence des femmes à l'Assemblée, mais l'on évoque quasiment jamais
l'absence des catégories populaires. L'Assemblée actuelle ne compte quasiment
plus de représentants des couches sociales les moins favorisées, cela a des
conséquences en terme de politiques publiques.".
Aude Lorriaux
Aude.Lorriaux@huffingtonpost.fr
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1 commentaire:
Lors du débat entre Charles Gave et Etienne Chouard "Politique-Eco - Gave et Chouard : la Disputatio" sur TVLiberté (confer : https://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2019/06/politique-eco-gave-et-chouard-la.html), les deux intervenants s'interrogeaient sur la représentativité (en termes de catégories socio-professionnelles) des députés de l'assemblée nationale.
Charles Gave a comparé l'Assemblée Nationale française avec la Chambre des Communes britannique : une trentaine de professions du côté français contre plus de 270 au Royaume-Uni. Mais en omettant d'ajouter que la Chambre des Lords ne compte que des sièges héréditaires; monarchie parlementaire oblige.
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