vendredi 5 mai 2017

Critique de la méthode

Pourquoi l'UPR a échoué ?

Le 23 avril 2017, à l'issue du premier tour du scrutin des élections présidentielles françaises, ce sont des dizaines de milliers de sympathisants et militants de l'UPR qui ont été sonnés par la sanction sévère des électeurs à l'égard de leur candidat François Asselineau. A peine 0,92 % des votes exprimés ont profité à l'UPR, malgré un programme de rétablissement de notre indépendance nationale aux accents quasi-révolutionnaires. François Asselineau déclarera alors à l'issue du scrutin : "j'ai fait ce que j'ai pu". Et c'est ici que je compte débuter mon analyse, car le président de l'UPR n'a pas fait ce qu'il a pu, mais ce qu'il a voulu...

Qu'on s'entende bien ici : j'ai moi-même voté pour l'UPR, et je connais parfaitement son fonctionnement et les idées défendues. Je ne blâme pas M. Asselineau d'être la personne qu'il est. Je lui dois - je resterai toujours honnête à ce sujet - mon éveil sur les questions de souveraineté et mon intérêt pour le droit de façon générale. Ses conférences ultra pédagogiques sur l'histoire et le fonctionnement de l'U.E et l'euro ainsi que sa volonté d’interagir avec son public en font un homme politique remarquable qui méritait sincèrement un peu plus de reconnaissance des électeurs. Même M. Mélenchon accorde moins d'importance au peuple qu'il prétend défendre, en se bornant à donner des meetings avant de s'éclipser laissant ses partisans sur leur faim (ou leur enthousiasme religieux).
Une fois cela dit, quelles sont les raisons de l'échec de l'UPR ? Il n'y en a qu'une à un premier niveau d'observation : la censure.
Une censure qui sévit désormais depuis 10 années (l'UPR a été fondée le 25 mars 2007) et qui n'a jamais cessé d'indigner profondément les sympathisants de cette formation politique, aujourd'hui plus solide en nombre d'adhérents que la plupart de ses concurrents, excepté le F.N, le P.S et L.R.

En mai 2014, l'UPR revendiquait déjà 5000 adhérents et clôturait l'année 2015 avec le double encore de ce chiffre. A la veille du scrutin, plus de 25.000 personnes adhéraient à l'UPR. Ce n'est donc pas une petite formation politique, mais au contraire, une puissante organisation militante. En témoigne le fameux trolling des sympathisants d'Asselineau sur à peu près tout ce que la toile dispose de pages consacrées au débat politique, autant que le nombre d'affiches de propagande qui ont fleuri partout en France ces dernières années. Même en se désintéressant de la personnalité, du parcours et des idées de M. Asselineau, il est difficile pour tout observateur un peu honnête de le ranger dans la très commode case de "petit candidat". Il n'en était pas un du tout.
Mais alors, comment se fait-il qu'une telle organisation, forte d'un puissant moteur militant et idéologique, ne soit jamais parvenue à renverser le climat de censure (et de calomnies) qui sévissait contre elle ? C'est là que nous devons creuser vers un deuxième niveau de réflexion pour comprendre que M. Asselineau n'a pas fait " tout ce qu'il a pu" comme il le prétend, mais bien ce qu'il a voulu
Puisque le problème principal se situait dans l'accès à une médiatisation minimale des propositions de François Asselineau afin d'obtenir une notoriété suffisante pour rassurer l'électorat (et pour le moins, le réinformer correctement sur la question européenne), le seul objectif qui aurait dû être celui de l'UPR depuis sa création (où disons depuis courant 2012-2013 où le réservoir militant commençait à offrir des perspectives), aurait dû être de briser cette censure. 
Bien entendu, M. Asselineau n'a évidemment jamais souhaité subir cette omerta médiatique, mais pour autant, a-t-il réellement fait tout ce qu'il pouvait pour l'enrayer ?

S'il est manifeste que la communication de l'UPR s'est profondément améliorée dans les formes au fil des années, elle est restée cantonnée aux réseaux sociaux sur internet, ainsi que sur des médias alternatifs ou de petites radios communautaires. Cependant, au vu des millions de Français qui restaient ignorants de ses propositions, car restant cantonnés au ron-ron du "mainstream médiatique", les passages radio et web de l'UPR étaient insuffisants. L'enjeu, rappelons-le, n'était pas la promotion de François Asselineau ou même de l'UPR, mais bien de renverser l'establishment politico-médiatique qui asservit le peuple français dans l'U.E et l'euro par voie de propagande essentiellement.
La question éthique, morale, et en fin de compte politique sous-jacente, n'est pas légère. Soit nous sommes en Démocratie, et dans ce cas, il n'est pas nécessaire de se dépasser dans sa communication pour faire entendre ses idées à l'ensemble de la population (surtout pour une organisation politique aussi bien structurée que l'UPR), soit tout indique que nous subissons exactement les mêmes phénomènes de propagande qu'ont connu les allemands ou les russes dans leur histoire récente, et dans ce cas, il n'y a aucun doute sur la nature totalitaire du régime auquel nous sommes assujettis. Et c'est dans ce cadre que la Légitimité d'une authentique Révolution peut intervenir (si tant est qu'elle vise à assainir profondément les choses sur le plan démocratique).
Seulement pour M. Asselineau (et cela malgré son éducation sur l'Histoire), la révolution est forcément violente et sanglante. Je n'ai pas retrouvé le passage, mais c'est bien un propos qu'il tient dans une vidéo qu'il publiera quelques jours après le premier tour des présidentielles. 
Sans aller jusqu'à dire que ces bouleversements insurrectionnels n'attisent pas des comportements irrationnels ou violents d'une partie des insurgés (comme il en va des forces qui s'y opposent), il y a eu dans l'Histoire récente, des épisodes qui méritent notre attention. Le dernier en date est le renversement de la présidente de la Corée du Sud, Park Geun-hye grâce à une mobilisation puissante, durable et pacifique des citoyens coréens. Si l'on remonte dans le temps encore un peu, la Thaïlande a connu aussi un réel épisode révolutionnaire il y'a quelques années, avec des sit-in récurrents organisés dans la Capitale au point que l'Armée (pratiquant volontiers l'ingérence politique dans ce pays) a fini par réprimer durement (mais sans succès durable) ces mobilisations populaires. Si l'on remonte encore un peu dans le temps, la révolution tunisienne n'a pas pris à proprement parlé, de détours sanglants. Bien entendu, la répression autant que la contestation était forte, mais au final, malgré le fait que 338 Tunisiens ont perdu la vie durant ce moment, la révolution tunisienne reste considérée comme essentiellement non-violente. Il en va de même pour la Marche du Sel initiée en 1930 par Mohandas Karamchand Gandhi. Si elle n'aboutira pas à l'expulsion du colon britannique dans un premier temps, elle n'en restera pas moins un remarquable exercice de protestation politique non-violente avec des accents profondément révolutionnaires. D'autres épisodes de l'Histoire du Monde, chaque fois différents dans leur contexte propre, témoignent que la Révolution n'est pas forcément synonyme de sang versé. 

Sit-In à Bangkok en 2013
Tout dépend de ce que l'on veut et comment l'on s'organise. 
Une organisation politique très structurée peut jouer de tout un arsenal de moyens de pression profondément populaires pour mettre en sérieuse difficulté un gouvernement félon au pouvoir. 
Mais M. Asselineau, pour des raisons très diverses, ne tient absolument pas à ce que l'UPR soit une "Union Populaire Révolutionnaire". L'UPR est ainsi l'un des rares partis politiques qui ne publie aucun journal pour se faire connaître des citoyens et susciter des adhésions. Il n'y a pourtant rien de fondamentalement "révolutionnaire" à une telle démarche, mais c'est tout de même un minimum quand les médias nous ferment leur porte, que de répondre par son propre organe de presse militant. 
M. Asselineau n'a pas non plus souhaité s'inspirer de M. Mélenchon sur sa communication de plein air. C'est pourtant excessivement astucieux. Rien de mieux pour se faire connaître du plus grand nombre que de conférencer directement sur les places publiques. Même le Général de Gaulle (pourtant cité à maintes reprises par François Asselineau) avait produit son célèbre discours de Bayeux en plein air. Est-il nécessaire d'ajouter que le président de l'UPR, répugne à organiser des manifestations ou des "buzz" (pourtant très attractifs pour les journalistes), qui pourraient de très loin permettre à ses partisans de se réunir et démontrer qu'ils existent ? J'ajoute pour être précis (et certains m'accuseront sans doute de vouloir faire un rattrapage quelconque) avoir envoyé un sms à M. Asselineau quelques jours avant la fin de sa campagne, pour lui proposer en tant qu'activiste indépendant, d'organiser un sit-in sous les fenêtres de la Maison de la Radio ou sévissent nombre de chiens de garde (comme Patrick Cohen), où, à n'en pas douter, nombre de de ses sympathisants auraient été ravis de venir faire une petite démonstration de force... dans le calme républicain. J'attends encore aujourd'hui sa réponse à mon message.
Nous pourrions ajouter que lorsque certains de ses partisans ont eu l'audace de décrocher symboliquement des drapeaux européens et les restituer à la gendarmerie la plus proche pour démontrer l'absence de soustraction frauduleuse, François Asselineau s'est montré excessivement critique. Oublie-t-il, lui, l'homme féru d'Histoire que toutes les Révolutions ont besoin de symboles ? Que l'on décrochait des emblèmes nazis ou soviétiques en d'autres époques ?
Je pourrais ajouter un certain nombre d'exemples concernant sa difficulté à sortir du bois de lui-même, comme le fait qu'il ne se soit jamais rendu à des mouvements populaires relativement spontanés (comme Nuit Debout), ce qui lui aurait permis de se faire connaître de nombreux réseaux militants et associatifs, pas forcément hostiles du reste. De même, en tant qu'opposant ultra légaliste du Régime, il pouvait tout à fait instituer une pression judiciaire et médiatique sur les traîtres et les criminels en col blanc ayant contribué à des intelligences contre les intérêts fondamentaux de la nation, au financement du terrorisme ou encore à des crimes contre l'Humanité. C'est une façon de se montrer agressif vis à vis de l'oligarchie, tout en restant sur le terrain de la Loi. 
Il n'y a donc eu en 10 années d'existence, aucun mouvement populaire initié par l'UPR. Aucun organe de presse interne, aucune attaque judiciaire en règle contre les responsables de crime de sang ou de haute trahison, aucun "buzz", rien qui n'ait permis à ce parti politique d'exister en-dehors d'internet et des conférences données par M. Asselineau dans quelques salles municipales ou privées. C'est le niveau zéro de la communication politique. Ce ne sont pas quelques minutes cumulées d'espace médiatique sur les grands médias qui pouvaient rattraper des années de censure... consentie indirectement. De même qu'un tel score électoral écarte d'entrée de jeu la faute imputée au "vote utile" de certains de ses sympathisants.
Alors bien sûr, M. Asselineau maintiendra qu'il a fait ce qu'il a pu et trouverait sans doute à tous les exemples cités, de quoi nuancer voire s'opposer à ma grille de lecture de la communication de l'UPR. Et bien sûr, il n'existe aucune Révolution ou même communication militante qui soit parfaite. Mais bien que je sois de ceux qui reconnaissent au président de l'UPR d'exceller dans ses qualités de pédagogue et d'homme d'Etat potentiel, je lui refuse une quelconque autorité sur les questions de militantisme. Ça n'est pas son domaine, que ce soit dans sa personnalité, son regard éthique sur la question (n'oublions pas qu'il aspire au pouvoir), ou encore son expérience de vie. Et ce ne sont pas ses bras droits choisis pour leur discipline qui changeront quoi que ce soit à ce problème structurel de l'UPR. Enfin, comme M. Asselineau aime à qualifier les initiatives qui sortent un peu des sentiers battus comme "farfelues" et de nature à nuire au sérieux de son discours, je rappelle à titre d'exemple, que des gens aussi sérieux que Lénine ou Charles de Gaulle lui-même, ont soutenu toutes les formes de résistance qui se réclamaient d'eux, encore une fois dans des époques et circonstances très différentes. Certes, les militants du quotidien ne sont pas tous des Pic de Mirandole, mais mépriser leurs initiatives, c'est quelque part, s'écarter de ce qui est souvent bien plus audible pour le Peuple.
Les partisans de l'UPR ont fait ce qu'ils ont pu et ont donné beaucoup de cœur à l'ouvrage. Et quelque part, je suis autant déçu pour mes espérances de prompte Libération de la France au regard des résultats du premier tour (et sans nul doute du second à venir) de l'élection présidentielle 2017, mais aussi finalement pour la douche glaciale que tous ces fervents militants ont reçu après tant d'efforts pour interpeller les Français. Coller des affiches, tracter, et bien plus encore, j'ai donné. J'ai par conséquent un immense respect pour ceux qui donnent de leur temps et leur motivation à un tel militantisme.
M. Asselineau n'évoluera jamais sur ces questions de communication populaire. Son Bureau National restera aussi à l'image du président de l'UPR, c'est à dire timorée lorsqu'il s'agit de faire monter la pression d'un cran jusque dans l'espace public. Il n'y a donc rien à attendre des instances dirigeantes de cette formation politique. Comme d'autres avant et après moi, j'ai quitté l'UPR en 2012 justement parce que j'ai vite compris les limites de ce parti. Cela ne m'a pas empêché de voter pour François Asselineau et de lui renouveler mon soutien en tant qu'électeur pour son chemin de croix et les sacrifices qu'il a consenti dans le but de libérer notre pays, mais j'adresse tout de même une mise en garde aux partisans de l'UPR :
N'attendez rien du chef, faites tout ce qu'il désapprouve tant que cela n'a rien de criminel, violent ou mensonger sur le plan idéologique. Si votre objet est bien de Libérer la France (et non défendre votre boutique comme une nouvelle Eglise parmi tant d'autres), alors la voie de la Révolution reste la meilleure option. A plus forte raison quand nous savons quel sera notre pain blanc durant les cinq prochaines années. La Révolution suppose mobilisation populaire réelle (soit loin des réseaux sociaux), créativité et spontanéité. Elle exige que les symboles de la Dictature tombent, et une désobéissance assumée à toutes les forces (même en apparence au service de la France) qui vous intimeraient de vous borner à coller des affiches et distribuer des tracts pour faire valoir votre liberté d'expression. Se faire entendre suppose d'aller bien au-delà de ce militantisme à papa.
Quoi qu'il arrive, la Révolution commencera le jour où les grands médias publics seront assiégés pacifiquement par des milliers de citoyens en colère. François Asselineau s'interdit même d'y songer, faut-il que ses militants s'interdisent aussi cette option ?
Avec mes amitiés résistantes à tous ceux qui maintiennent la lutte contre la tyrannie,
Sylvain Baron

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