Nanshoku
Nanshoku est un terme générique qui servait à désigner l'amour d'un homme pour une personne de son propre sexe, généralement un garçon plutôt qu'un homme adulte. Au fil des siècles et en fonction des milieux dans lesquels il était pratiqué, le nanshoku put revêtir différentes formes. Il fut éradiqué durant l'Ère Meiji.
Il convient de garder à l'esprit que les catégories modernes occidentales d'orientation sexuelle, d'homosexualité ou d'hétérosexualité s'appliquent mal à la sexualité telle qu'elle était vécue et pratiquée dans le Japon féodal.
Structurées le plus souvent en terme de différence d'âge et de position sociale, certaines formes du nanshoku présentent de nombreuses similitudes avec la pédérastie en Grèce antique. La pratique du nanshoku, d'abord l'apanage des moines, de l'aristocratie et des samouraïs, se généralisa au fil des siècles à toutes les classes de la population.
Aucune source ne nous renseigne sur l'existence éventuelle de pratiques homosexuelles dans le Japon de l'Antiquité. Entre la fin du XIe siècle et la première moitié du XIVe siècle, si sont bien relatées les amours de quelques empereurs avec de beaux garçons, celles-ci n'ont donné naissance au Japon à aucune tradition homosexuelle, à la différence de ce qui avait pu avoir lieu en Chine, dès l'Antiquité.
Pédérastie chez les samouraïs
De nombreux samouraïs avaient d'abord été novices dans un monastère. Il est certain que les mœurs monacales servirent de modèle aux amours masculines qui eurent bientôt cours chez ces guerriers. La structure féodale de la société japonaise contribua de même à structurer ces relations.
Les points communs avec la pédérastie grecque sont nombreux. Les relations homosexuelles s'inscrivent dans le cadre d'une éducation élitiste. Elles sont structurées selon une différence d'âge et de statut. L'homme seul est sexuellement actif. En général, les rapports sexuels cessent une fois le cadet devenu adulte. Pas plus qu'en Grèce, ces relations de type pédérastique n'excluent les liaisons hétérosexuelles ou le mariage.
Comme entre un moine et un novice, la relation entre deux samouraïs débute par des serments fraternels, éventuellement écrits, qui constituent alors un véritable contrat. Plusieurs de ces serments contractuels ont été conservés, dont celui unissant Shingen Takeda (surtout connu en Occident comme protagoniste central du film Kagemusha de Kurosawa) et son amant Kasuga Dansuke, alors âgés de vingt-deux et de seize ans. Le jeune samouraï sert son aîné lors des campagnes militaires. En temps de paix, il joue souvent le rôle de page, à l'allure efféminée.
L'éducation archaïque spartiate
Aux VIIIe et VIIe siècle av. J.-C., l'éducation spartiate est déjà consacrée au métier des armes. Les jeunes Spartiates ne doivent plus rechercher, comme aux siècles antérieurs, leur gloire personnelle (idéal homérique), mais la gloire collective, la victoire de la cité. Le poète Tyrtée symbolise bien cette nouvelle éthique : « il est beau de mourir, au premier rang, en brave qui combat pour la patrie. »
L'éducation archaïque conserve néanmoins des traits de l'éducation homérique : l'athlétisme et les sports hippiques conservent une grande importance. Aux jeux Olympiques, de 720 à 576, sur 81 vainqueurs connus, 46 sont Spartiates. Pour la course à pied, sur 36 connus, il y a 21 Spartiates. Ensuite, la musique occupe une place d'honneur (à cette époque, Sparte est la capitale musicale de la Grèce). Les diverses fêtes (Hyacinthies, Karneia ou encore Gymnopédies) sont prétexte à des concours de danse d'un haut niveau de raffinement, nécessitant un entraînement spécialisé.
L'agôgè
À partir du VIe siècle (vers 550 av. J.-C.), l'éducation change de nature. Elle devient l'ἀγωγή / agôgế — le nom lui-même ne datant que de l'époque hellénistique. Théoriquement mise en place par Lycurgue, mais attestée uniquement à partir du début du IVe siècle, chez Xénophon (Constitution des Lacédémoniens), elle est :
- obligatoire : elle est indispensable -mais pas suffisante- pour être pleinement citoyen. Pour Xénophon, les non-participants sont des citoyens diminués, qui ne peuvent pas accéder aux magistratures ni aux corps d'élite ; pour Plutarque, ils sont tout bonnement privés des droits civiques. Inversement, des individus non-citoyens subissant l'agôgè peuvent devenir libres : ce sont les μόθακες / móthakes (voir Hilotes) ;
- collective, par tranche d'âge ;
- organisée par la cité, ce qui lui attire les louanges de Platon et Aristote.
La pédérastie
L'éducation spartiate a pour effet de couper le jeune de son milieu familial et de remplacer cette solidarité par une autre, également naturelle, celle de la classe d'âge. Cependant, Sparte permet aux adolescents de nouer également des liens de type vertical avec des jeunes adultes, par le biais d'une relation pédérastique.
Le couple pédérastique est composé d’un « inspirateur » (ἐισπνήλας / eispnêlas, de ἐισπνέω / eispnéô, « souffler sur, inspirer ») et d’un « auditeur » (ἀΐτας / aïtas, de ἀΐω /aïô, « entendre, écouter »). La nature sexuelle de leurs relations est discutée abondamment par les Anciens, mais n'est plus guère contestée aujourd'hui[4]. Plutarque et Xénophon assurent que, si les beaux garçons sont explicitement recherchés (contrairement aux traditions crétoises), le couple pédérastique reste chaste. Dans la République des Lacédémoniens (II, 13), Xénophon déclare même qu’un éraste désirant son éromène aurait été aussi honteux qu’un père désirant son fils. Cependant, le caractère sexuel de la pédérastie spartiate est un sujet de plaisanterie courant chez les auteurs comiques attiques. Le verbe λακωνίζω / lakônízô (« imiter les Lacédémoniens ») signifie chez eux « sodomiser ». Dans un registre plus sérieux, Platon dénonce dans les Lois (I, 636b–c) ce qu'il juge être des amours contre nature.
Il est certain qu'il existe à Sparte un idéal de l'amour « platonicien » liant un adolescent et un jeune, à l'instar de l'idéal de la « belle mort » au combat. Sans doute ces relations devaient-elles également respecter l’aidos, la décence et la discrétion : Plutarque cite le cas d'un adolescent honteux d'avoir rencontré quelqu'un alors qu'il se promenait avec son éraste (Apophtegmes laconiens, 222b). Selon l'idéal pédérastique, l'éraste doit en quelque sorte remplacer auprès du jeune l'autorité paternelle, en lui apprenant à bien se comporter et élevant son âme. Pour cette raison, les liaisons sont contrôlées par l'État spartiate : selon Élien, les éphores frappent d'amendes le jeune préférant un éraste riche à un éraste pauvre mais valeureux. Inversement, l'éraste subit une amende quand son éromène montre de la faiblesse.
Enfin, la liaison pédérastique permet de nouer des liens politiquement précieux par la suite. Ainsi, Agésilas est aidé par son éraste, Lysandre, à monter sur le trône. En retour, le fils d'Agésilas use de son influence auprès de son père pour faire acquitter Sphodrias, le père de son éromène.
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