A la fin de la dernière glaciation (12000-10000 av. JC), l'élévation de la température entraîne d'importantes modifications de la surface terrestre. Dans l'hémisphère nord, les glaces, qui se sont retirées vers le pôle, ne persistent que sur les sommets des plus hautes montagnes. Avec la toundra, les grands troupeaux de rennes, ces animaux qui, pendant tout le Paléolithique supérieur avaient fourni aux hommes l'une de leurs principales ressources alimentaires, se déplacent aussi peu à peu vers le nord.
En Europe, l'aire de diffusion des conifères et des bouleaux diminue au profit de celle des forêts de latifoliés (arbres à larges feuilles) des climats tempérés. Y vivent des animaux de grande taille : cerfs, sangliers, chevaux et urus. On les chasse, mais ce n'est pas aussi fructueux qu'au temps des rennes et des mammouths, désormais disparus !
L'élévation de température entraîne également le développement des graminées et des légumes, riches en protéines et en calories, mais aussi celui des mollusques marins, sources de protéines et de sels minéraux. Dans beaucoup de sites, on a découvert d'énormes dépôts de coquilles d'escargots, ce qui témoigne de l'importance qu'avaient les mollusques dans l'alimentation de nombreuses populations.
Vers la sédentarité
Pour se nourrir, bien que le schéma classique de la préhistoire (chasse-cueillette) prévale encore largement, on assiste à une grande diversification des cultures, avec une préférence pour les produits des récoltes qui viennent suppléer la viande, plus difficile à trouver. Cette période est caractérisée par une amélioration générale des conditions de vie. On assiste à des mutations plus profondes encore avec la civilisation natoufienne, florissante du Xème au VIIIème millénaire avant J-C en Syrie et en Palestine. Son régime alimentaire, complété par la chasse et la pêche, est généralement fondé sur la récolte de céréales et de légumineuses. Des installation, de bonnes dimensions (de 3000 à 9000 m²), révèlent l'existence de zones collectives destinées au stockage des graines comestibles. La tendance à demeurer longtemps dans un même lieu révèle une certaine "sédentarité". C'est à l'époque natoufienne qu'apparaissent les premiers villages permanents construits en plain air sur des sites tout à fait nouveaux.
Ce type de civilisation, dit pré-agricole, implique une attitude différente face à l'environnement : il s'agit alors de comprendre les cycles naturels des saisons ainsi que les vies végétale et animale, de façon à accroître ses chances de survie et à améliorer les conditions d'existence. Tous les villages sont implantés en plaine, mais au pied des montagnes, au bord des lacs ou des fleuves, afin qu'aux céréales et aux ongulés, propres à l'ensemble de leur zone, s'ajoutent l'eau et les poissons, et les gibiers forestiers.
Tous ces éléments durent constituer la base d'où allait émerger la culture agricole - "synonyme" de Néolithique - même si le stade pré-agricole persista longtemps sans qu'aucune forme d'agriculture véritable ne se développât.
Il est aussi probable que, dans certaines zones d'activité pré-agricoles, on se soit efforcé d'intervenir dans les cycles de vie des végétaux. A cet égard, et en raison de son ancienneté, le cas de groupes semi-sédentaires de la région d'Assouan (Haute-Egypte) est intéressant : entre 16000 et 15000 avant J-C, ils recueillaient systématiquement des graminées, ce qui, semble-t-il, répondait à une volonté de domestication par le biais de la sélection des plantes (en conservant les graines des plantes qui présentaient les meilleurs caractères).
L'évolution foudroyante de l'agriculture
Les première activités réellement agricoles voient le jour autour du VIIème millénaire avant J-C dans al région dite du Croissant fertile: Palestine, Syrie, Zagros et Sud-Est de l'Anatolie. Cette région est également la zone de plus grande diffusion des graminées sauvages, parmi lesquelles Triticum dicoccoides (souche de différents types de froment) et Horleum spontaneum (ancêtre de l'orge), dont le rôle fut sans doute déterminant dans la réussite des premières pratiques agricoles.
Dès lors, l'agriculture connait une diffusion et un développement extraordinaires : deux ou trois millénaires passent, et elle est présent de l'Inde aux plaines des grands fleuves d'Europe orientale, ainsi que le long des côtes de l'Afrique et du Sud de l'Europe.
Les techniques agricoles font des progrès remarquables : pendant la même période, des espèces domestiques nouvelles, dues à la sélection et à l'hybridation, apparaissent, qui correspondent mieux aux exigences de l'agriculture. L'épeautre, le blé tendre, l'orge présentent des graines particulièrement grosses, renfermées dans un grand nombre d'épis qui se détachent plus difficilement. Ces caractéristiques sont très avantageuses pour l'agriculteur, car il peut obtenir de meilleurs rendements : avec le grain semé, on court moins vite le risque que les graines ne se dispersent ou que de nouvelles espèces ne se répondent n'importe où.
La domestication des espèces animales
La sédentarisation transforme aussi le monde animal. Des témoignages attestent qu'au Proche-Orient, dès le IXème millénaire avant J-C, des animaux sont domestiqués : les ovins d'abord (chèvre et mouton, fin du IXème millénaire), puis les porcs (VIIème millénaire), les bovins (VIème millénaire) et les ânes (Vème millénaire). La domestication du cheval, elle, n'intervient que plus tard, vers la moitié du IIIème millénaire avant J-C, en Russie méridionale. Dans les villages néolithiques de quelque importance, ce sont les animaux de ferme qui semblent fournir la plus grande partie de l'alimentation carnée, le reste étant dû à la faune sauvage : chevreuil, cerf, sanglier, bœuf, quelques bisons, castor, lapin, lièvre.
Grâce à la sédentarisation, l'homme put établir de nouveaux rapports avec la nature. Il apprit à comprendre la vie et la reproduction des plantes et des animaux; ces connaissances allaient donner une tout autre valeur aux cycles des saisons, au soleil, à la lumière, à l'eau et à la chaleur. L'homme est désormais un peu plus maître de l'Univers, et sa conscience du mystère de la vie et de la mort s'affine : le monde surnaturel commence à l'envahir.
Source : éditions Delagrave, encyclopédie La traversée du temps - La vie des hommes , tome A travers la préhistoire, pages 28-29
vendredi 25 mars 2016
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Natoufien
Le Natoufien est le nom donné à une culture de l'Épipaléolithique final, attestée au Levant entre 12 500 et 10 000 av. J.-C. et caractérisée par les premières expériences de sédentarisation.
Aire géographique
Le Natoufien est une culture du Proche-Orient dont les sites ont été découverts dans les régions bordant la côte méditerranéenne de l'Asie (notamment près du Mont Carmel et dans le Néguev). Plus précisément dans la région s'étendant au sud du Taurus jusqu'au Sinaï.
Le site éponyme est Ouadi en Natouf en Cisjordanie. Les premiers témoignages de la culture natoufienne y ont été découverts par l'archéologue britannique Dorothy Garrod, en 1928.
Chronologie
Dans l'aire géographique qui est la sienne, le Natoufien marque la transition entre la fin de l'Épipaléolithique et le début du Néolithique. La culture natoufienne y succède au Kébarien et précède le Khiamien.
Les datations par le carbone 14 donnent des résultats compris entre 14 500 et 11 500 ans BP ("Before Présent", "Avant le Présent").
Cette période est divisée en 2 sous-périodes :
Natoufien ancien (14 500 à 12 800 BP)
Natoufien récent (12 800 à 11 500 BP)
L'industrie natoufienne
Les sites natoufiens ont notamment permis de trouver des lames de faucille en silex et des outils de broyage (meules, molettes, pilons et mortiers).
La technique du polissage de la pierre apparaît à cette époque et est d'abord réservée aux objets de parures avant d’être parfois utilisée pour l'outillage.
Par rapport à la période précédente, le Natoufien se caractérise aussi par un usage plus important de l’os, notamment dans l'outillage et comme support éventuel de représentations figurées, humaines ou animales.
Les villages natoufiens et les débuts de la sédentarisation
Les Natoufiens semblent avoir été à l'origine des premiers villages occupés de manière permanente. On y trouvait de petites maisons de plan circulaire ou ovale (de 3 à 4 mètres de diamètre), plus ou moins creusées dans le sol et généralement construites en bois et en terre, parfois ce sont des grottes aménagées ou des villages de plein air. Le périmètre des fondations pouvant atteindre 30m. Chacun disposait d'un foyer et souvent d'un billot de pierre servant probablement à la préparation de certains aliments. Un village pouvait comporter en moyenne une cinquantaine d'habitations, ce qui laisse estimer la population à environ 200 ou 300 habitants.
Cet habitat édifié en dur paraît témoigner d'une volonté de continuité dans l’installation incompatible avec le nomadisme permanent, mais pas forcément avec le semi-nomadisme : ces populations reviennent régulièrement.
Les villages natoufiens connurent des temps difficiles à partir de 10 800 av. J.-C.. Les températures de la région chutèrent soudain de 7 °C. Une mini-glaciation dura 1 200 ans. Elle imposa des conditions climatiques plus sèches dans tout le Croissant fertile. Les habitats des animaux et les terres cultivables se rétrécirent. Certains villages devinrent tout à coup trop peuplés au regard de la nourriture disponible localement. Nombre de villageois redevinrent des chasseurs-cueilleurs semi-nomades, parcourant de nouveau la région à la recherche de nourriture.
À proximité des grands sites, on en a découvert de plus petits, éloignés d’une trentaine de kilomètres, ressemblant à ceux du Kébarien et au niveau desquels aucun matériel lourd n'a été retrouvé.
Chasseurs-cueilleurs ou premiers agriculteurs ?
La présence de lames de faucilles en assez grand nombre montre que les Natoufiens avaient coutume de couper des plantes. On pense qu'ils ont participé aux prémices de la néolithisation du Proche Orient.
On perçoit plutôt aujourd'hui les Natoufiens comme des chasseurs-cueilleurs pratiquant abondamment la récolte de céréales sauvages comme l'amidonnier (ou blé emmer). Outre ces céréales, les Natoufiens se nourrissaient aussi des produits de la chasse (gazelles, bœufs, sangliers) et de la pêche (les villages étaient souvent proche de plans d'eau).
Les sépultures natoufiennes
Les Natoufiens avaient pour coutume d’ensevelir séparément les crânes, à côté ou à l'intérieur de silos.
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