lundi 11 mars 2013

Comparatif de revenus entre deux familles de cinq personnes

Le tableau comparatif


Puis l'article (critique)  d' Elsa Ferreira | Rue89

Mieux vaut être au RSA que travailler, selon un tableau posté sur Facebook et partagé 100 000 fois en une journée. Sauf que le tableau est truffé d’erreurs

L’auteur du tableau, « Reynald Pais », précise qu’il l’a réalisé « à partir d’infos brutes trouvées sur le site du gouvernement ».
Il compare la situation financière d’une famille de cinq personnes gagnant un très petit salaire à une autre famille de même taille vivant du RSA. Sa conclusion : la seconde famille, celle qui vit du RSA, s’en tire mieux, avec 500 euros par mois de plus.

"Une connerie pour faire rire les copains"

Le tableau a été fait sans réfléchir, il est donc complètement faux, comme on va le voir plus loin. Mais apparemment tout le monde s’en fiche : les idées reçues sur le RSA se sont offertes une belle pub grâce à « une connerie destinée à faire sourire quelques amis Facebook », selon l’auteur de cette campagne de désinformation, premier surpris de son succès.

L’idée qu’on peut mieux s’en sortir « sans travailler » n’est pas nouvelle. Il y a deux ans déjà, Laurent Wauquiez déclarait sur BFM :

« Aujourd’hui, un couple qui ne travaille pas, qui est au RSA, en cumulant les différents système des minima sociaux, peut gagner plus qu’un couple dans lequel une personne gagne un smic. Ce n’est pas logique, c’est la société française qui tourne à l’envers. »

Et ça énerve Martin Hirsch, le papa du RSA, auquel nous avons soumis le tableau :

« Ce sont toujours les mêmes conneries. Ça marche parce que les gens ont envie d’entendre ce genre de choses. Ça arme leur aigreur. »

Ça ne pas fait rire non plus Jean-Christophe Sarrot, de l’association ATD Quart-Monde. Il estime que l’on « tape sur les pauvres », leur infligeant ainsi une « double peine » :

« Ça fait souffrir beaucoup de gens. Ils n’arrivent pas à joindre les deux bouts à partir du 15 du mois et on leur dit qu’ils gagnent plus que les gens qui travaillent. »

Jean-Christophe Sarrot prévient : il n’est pas facile de calculer le montant du RSA. C’est d’ailleurs un problème pour les familles. Mais il a essayé quand même, et nous aussi. Et sans surprise, les résultats ne sont pas les mêmes que ceux qui ont été partagés sur des dizaines de milliers de pages Facebook.

1 Les revenus

• L’oubli du RSA activité
Première ligne, première erreur. Et elle est de taille : avec un salaire de 1 200 euros par mois pour un ménage de cinq personnes, la famille est en droit de toucher le RSA activité. Un revenu créé justement « pour que dans tous les cas, on ait un intérêt à travailler », explique Jean-Christophe.

La famille gagnerait donc 18 132 euros par an au lieu de 14 400.

• Le RSA prend en compte les allocations familiales et logement
Les allocations, dans l’esprit de l’auteur, ce seraient donc le RSA + les allocations familiales. A noter aussi que l’allocation au logement entraîne une réduction de 143 euros du RSA.

La famille touchera donc 1 065 euros par mois de RSA , soit 12 780 par an au lieu de 14 496.

• La prime de Noël est plus élevée que prévue
Il faut croire que la famille de fainéants a été sage, puisque ce n’est pas 154 euros qu’elle touchera à Noël mais 380 euros...

• Allocations logement : un peu plus pour les uns, un peu moins pour les autres
L’allocation logement est relativement difficile à calculer, et d’autant plus lorsqu’il s’agit d’une famille hypothétique dont on ne connaît ni le lieu d’habitation, ni la superficie du logement. Jean-Christophe Sarrot a quand même fait son estimation sur le site de la CAF, avec un logement en province au loyer de 500 euros (comme dans le tableau Facebook).

Pour la famille au RSA, ce serait donc 450 euros d’allocations logement (au lieu de 500 euros) et pour les salariés, 350 euros (au lieu de 200).

• Au total, les revenus annuels de la famille salariée seront de 25 812 euros (au lieu de 20 280) et ceux de la famille au RSA de 18 560 euros (au lieu de 20 650).

2 Les dépenses

• Loyer : 500 euros chacun. Pour cette donnée arbitraire, pas d’erreur.
• La complémentaire universelle pour tous
Selon l’auteur du tableau, la famille de salariés payerait 50 euros par mois pour leur mutuelle santé. Pour la seconde famille, on leur offre la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), et donc, c’est gratuit.

Mais là encore, il n’a pas bien fait ses devoirs : la famille de salariés est en droit de demander la CMU-C puisqu’elle se trouve en dessous du plafond de 19 835 euros pour un foyer de 5 personnes (tous les revenus n’étant pas pris en compte).

C’est donc 0 euro pour les deux familles pour l’assurance complémentaire.

• Impôts locaux et redevance télé
La famille qui touche un smic plus le RSA activité peut être exonérée de ces frais, puisqu’elle se situe en dessous du plafond de revenus.

0 euro encore, pour les deux familles.

• Cantine des enfants et transports
Pas de frais de cantine, ni de frais de transport (« pas de boulot ! », précise l’auteur), pour la famille au RSA.

Là encore, les données sont arbitraires, et pas forcément justes. L’exonération des frais de cantine dépend non pas de l’attribution du RSA mais de la volonté d’une commission académique. Les deux familles sont donc susceptibles ou non de bénéficier d’un tarif. Pour notre exemple, nous avons donc gardé l’hypothèse d’une exonération totale de cantine pour les deux familles.

Quant au transport, même sans travail, il faut se déplacer : pour chercher du travail, pour accompagner ses enfants à l’école, pour faire ses courses... Nous avons donc rétabli une dépense transport pour la famille RSA.

• Electricité, eau, gaz
Les tarifs sociaux pour l’énergie sont calés sur l’éligibilité à la CMU-C. Les deux familles en bénéficient de la même façon.

3 Conclusion

La famille vivant du smic et du RSA activité gagne 25 812 euros et ses dépenses contraintes (en considérant qu’elle ne paye pas la cantine) sont de 8940 euros environ par an. Il lui reste donc, après paiement des factures, 16 872 euros par an (1406 euros par mois) pour se nourrir, se vêtir et de divertir.

Pour celle vivant uniquement du RSA, le revenu annuel est de 18 560 euros pour les mêmes dépenses contraintes. Il lui reste donc 9620 euros (soit 801 euros par mois) pour les autres dépenses.



O/20 !

7 commentaires:

Je a dit…

Connaissant l'orientation très à gauche du site d'information Rue89, on ne s'étonnera pas des choix opérés lors du calcul :

"L’exonération des frais de cantine dépend non pas de l’attribution du RSA mais de la volonté d’une commission académique. Les deux familles sont donc susceptibles ou non de bénéficier d’un tarif. Pour notre exemple, nous avons donc gardé l’hypothèse d’une exonération totale de cantine pour les deux familles."

Ce qui change les dépenses de la famille avec un travailleur salarié pour un montant évalué à 1800 €.

"Quant au transport, même sans travail, il faut se déplacer : pour chercher du travail, pour accompagner ses enfants à l’école, pour faire ses courses... Nous avons donc rétabli une dépense transport pour la famille RSA."

Sauf que l'auteur du tableau précise bien : "pour aller bosser". Les autres dépenses sont en plus, à égalité pour les deux familles.
Montant estimé de l'erreur dans la correction : 1440 €.

Conclusion :

La famille vivant du smic et du RSA activité gagne 25 812 euros. Après après paiement des factures (y compris 1800 € et 1440 €), il lui reste 13 632 euros par an (1136 euros par mois) pour se nourrir, se vêtir et de divertir.

Pour celle vivant uniquement du RSA, le revenu annuel est de 18 560 euros pour les mêmes dépenses contraintes. Il lui reste donc 9620 euros (soit 801 euros par mois) pour les autres dépenses.

La différence est faible : 335 € par mois, en faveur de celle/celui qui travaille; en considérant que tout ce que la famille au smic et RSA activité est en droit de demander soit accepté !

Franchement, cela reste très peu motivant.

Sans compter, qu'hélas, certaines personnes sans activité déclarée utilisent leur temps libre pour travailler "au noir" ...

Je a dit…

D'ailleurs l'économiste Jacques Marseille, s'appuyant sur les travaux de Denis Anne et Yannick L'Horty, démontrait qu'un couple inactif avec trois enfants, cumulant les aides locales et nationales, gagnait autant qu'un couple avec trois enfants travaillant entre 25 heures et 40 heures au smic.

Source : http://justemonopinion-jeronimo.blogspot.com/2012/11/a-quoi-bon-travailler.html

Anonyme a dit…

Il est bien connu qu'en France le maquis des aides sociales (et des conditions d'imposition) met spontanément en place ce qu'on appelle des "trappes à pauvreté", c'est-à-dire des situations où ne rien faire rapporte plus que travailler - il y a de façon comparable des "effets de seuil" sur l'imposition ou les effectifs des entreprises, où la croissance a brutalement des conséquences telles sous l'effet d'un différentiel très faible que l'intérêt objectif des agents économiques consiste à rester en-dessous des seuils concernés…

Le RSA avait justement comme objectif, en remplaçant plusieurs dispositifs préexistants, de limiter les cas de figure où cette situation de "trappe à pauvreté" était susceptible de se présenter ; mais comme en France, les intérêts particuliers prévalent à peu près systématiquement sur l'intérêt collectif, nombre d'aménagements sont venus perturber ce noble principe !

Quant au tableau diffusé et aux contre-argumentaires, aucun n'est pleinement objectif, tant les paramètres sont nombreux : il est toujours possible de trouver une situation à l'appui de ce qu'on veut démontrer, quel qu'en soit le sens !

Anonyme a dit…

Reynald Pais a raison de comparaître les revenus malgré quelques erreurs de sa part ! Il est vrai qu'en France que quand on a un petit salaire il vaut mieux être au RSA à rien faire de ses journée puisque ceux qui touchent le RSA touchent aussi les allocations familiales et il y aucune contradiction possible à cette chose puisque tous ceux qui côtoient ce qui profitent du système le sache ! De plus une mutuelle à 50 €/mois pour une famille de 5 personnes est impossible à trouver! Ceux qui bénéficient de la CMU n'hésite pas à en abuser avec des RDV plus 3 fois/semaines! Sans compter que ceux qui touchent le RSA en plus ont des vacances tout rais payer donc même s'ils ont un peu moins d'argent pour le loisir au final ça fait toujours plus !! Sans compter que pour la nourriture ils ont différents bon d'achats d'aide de la part des assistantes sociales et en plus se jettent sur les entrées pour les restos du coeur ! Sans compter que ceux qui touchent le RSA ont des tarifs réduit pour tout : cinéma, EDF( voir pas payer du tout avec toutes leurs aides!), internet, téléphone... Donc au final ils gagnent plus d'argent et dépenses moins que les familles qui osent se bouger pour les nourrir et leurs offrir tout !!

Brulé Parlesilluminés a dit…

Les pauvres esclaves qui tapent sur les esclaves encore plus pauvres... c'est malheureux.

C'est là-dessus qu'il faudrait taper :

http://www.argent-salaire.com/salaire-carlos_slim-343750000.php#.UffNOG1SPQs

ANDRE a dit…

Bonjour

Reynald Pais a raison de comparaître les revenus malgré quelques erreurs de sa part! Mais je rajouterai ce 2 points:
1/ La famille qui travaille cotise pour sa retraite alors que la famille au RSA ne cotise pas
2/ La dimension du temps libre en RSA n'est pas évoqué, alors qu'elle est fondamental.. Pourquoi de lever le matin, prendre les transports en commun (45 mns * 2), obéir à son patron, subir des cadences folles etc, etc alors qu'on peut rester chez soi pour 335€ de moins par moi à pratiquer des activités avec ses enfants, prendre soin de son corps par de l'exercice physique, travailler au black et toute chose qu'on peut faire quand on a pas de contrainte d'horaire...

Je a dit…

Je rejoins l'analyse de "Brulé Parlesilluminés" (site : http://bruleparlesillumines.e-monsite.com/) qui prend du recul par rapport aux calculs et à l'opposition/la comparaison entre travailleurs pauvres et allocataires pauvres.

Voilà bien une division qui sert les puissants, les oisifs riches, les rentiers, les grands propriétaires, les actionnaires capitalistes qui spolient les travailleurs en ponctionnant des dividendes.

Il faut lire Proudhon et plus particulièrement "Qu'est-ce que la propriété ?".
https://books.google.com/books/about/Qu_est_ce_que_la_propri%C3%A9t%C3%A9.html?id=Eqg0AQAAMAAJ&printsec=frontcover&source=kp_read_button#v=onepage&q&f=false