La gauche dénonce une fausse ouverture, les syndicats s'interrogent
Article du LEMONDE.FR 18.05.07 13h18 • Mis à jour le 18.05.07 17h12
A gauche, M. Ayrault dénonce une équipe "dans la continuité des années Chirac"
A droite, M. Accoyer salue "un gouvernement d'action, d'ouverture et de réforme"
Les syndicats et associations s'interrogent sur la répartition des ministères économiques et sociaux.
Au Parti socialiste, Jean-Marc Ayrault, président du groupe PS à l'Assemblée nationale, a estimé que le gouvernement de François Fillon "s'inscrit dans la continuité des années Chirac" et n'est qu'"une simple rotation". "C'est un gouvernement de campagne électorale qui vise à obtenir les pleins pouvoirs pour mettre en œuvre la politique de continuité en pire, annoncée par Nicolas Sarkozy", a-t-il expliqué dans un communiqué. Avant d'inviter les Français à "donner la représentation la plus forte à la gauche" lors des élections législatives des 10 et 17 juin, pour assurer "un contrepoids".Lors d'un point-presse au siège du parti, Benoît Hamon, député européen, a estimé que Bernard Kouchner "a rejoint un gouvernement qu'il comparait il y a quelques semaines à celui de Silvio Berlusconi. (...) Il n'est plus membre du Parti socialiste. Je n'ai qu'un mot, c'est lamentable. Ceux qui se sont prêtés [à cela] ont fait le choix d'affaiblir le camp auquel (...) ils devaient tout". "Nous, nous sommes dans l'opposition, en tous cas jusqu'aux législatives où, j'espère, nous aurons une majorité de gauche", a-t- il ajouté.Claude Bartolone, député PS, a estimé sur LCI qu'"on continue dans l'Etat-spectacle", filant la métaphore avec le Festival de Cannes. "Depuis quarante-huit heures on a eu la bande-annonce du film de Sarkozy : la jeunesse, l'amour, l'émotion. Aujourd'hui, les acteurs, quelques nouveaux pour masquer le retour de l'Etat RPR, les traîtres qui sont toujours nécessaires dans un film à suspense. Mais les Français ne se laisseront pas avoir, ils savent très bien qu'après la bande-annonce, il y a la réalité", a-t-il affirmé.
Selon le Parti communiste, "l'ouverture annoncée avec fracas" se révèle "un simple rideau de fumée destiné à faire oublier l'essentiel, une équipe gouvernementale à l'image de la droite dure et décomplexée incarnée par le nouveau président de la République". Le PCF pronostique dans ce communiqué la mise en place d'une "politique extrêmement régressive, avec comme feuille de route le programme ultra-libéral du candidat de l'UMP".
Olivier Besancenot, ex-candidat de la LCR à la présidentielle, a jugé que "l'ordre moral et sécuritaire est au pouvoir", avec "des hommes déterminés à appliquer le programme de rupture du président de la République : remise en cause du droit de grève et du code du travail, nouvelles privatisations, expulsions de familles sans-papiers".
Noël Mamère, député Vert de la Gironde, a estimé sur France Info qu'il y a "parmi les ministres les plus importants, tous ceux qui ont déjà participé aux gouvernements de Villepin et de Raffarin" et que "comme par hasard", "les ministres dit d'ouverture sont nommés à la défense et aux affaires étrangères, domaine réservé du président". "Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles et j'espère qu'ils vont se réveiller à l'occasion des législatives, a-t-il ajouté. C'est un gouvernement-vitrine, avant les législatives."
Bernard Accoyer, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale,"salue la nomination d'un gouvernement d'action, d'ouverture et de réforme (...). Composé de ministres d'expérience et de nouveaux talents, ce gouvernement a tous les atouts pour répondre aux attentes des Français. Les missions confiées aux nouveaux ministres indiquent clairement que la priorité sera donnée à la réforme et à la modernisation de l'Etat pour plus d'efficacité au service des Francais", estime-t-il dans un communiqué.
Patrick Ollier (UMP), président de l'Assemblée nationale, a qualifié la nouvelle équipe par les termes "ouverture, parité, efficacité", et salué ses "personnalités jeunes, compétentes et déterminées". "Je souhaite que ces signes forts, actes de respect des engagements pris, conduisent les Français à être cohérents aux élections législatives", ajoute-t-il.Le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, Gilles Carrez (UMP), a salué dans un communiqué "la pertinence" du redécoupage des ministères économiques, estimant que "lier le développement économique et l'emploi, c'est avoir une vision dynamique de l'emploi qui dépend de la bonne santé et de la compétitivité des entreprises. La baisse du chômage est liée à leurs bonnes performances". Il se félicite aussi de la création d'un ministère des comptes publics, estimant que "la stratégie de redressement de nos finances publiques et de désendettement passe par une meilleure coordination, tant en dépenses qu'en recettes, des finances de l'Etat, de la Sécurité sociale et des collectivités locales".
Jean-Christophe Lagarde (UDF) a salué sur i-télé l'ouverture, et dit croire que "c'est une équipe différente, un élément de modernisation politique". Il a estimé que "les débuts de Nicolas Sarkozy comme président de la République tranchent avec le candidat".
Jean-Marie Le Pen a fustigé un gouvernement composé des "adjoints de campagne" de Nicolas Sarkozy, dont "ils seront non des ministres, mais des exécutants". "Ce gouvernement, composé selon la technique de la macédoine de légumes, n'est pas souverain, il n'est que l'exécutif d'un conseil régional européen", a estimé le président du Front national dans un communiqué. "Les Français qui ont cru aux accents patriotiques de Nicolas Sarkozy vont commencer à déchanter", a-t-il ajouté, regrettant que les ministères des affaires étrangères et de la défense soient confiés à des "européistes", dont Bernard Kouchner,"soixante-huitard emblématique, icône de la pensée unique [qui] symbolise à lui seul ce que fustigeait Nicolas Sarkozy pendant sa campagne". "Quant au ministre d'Etat (Alain Juppé), c'est un homme qui a été récemment condamné à un an d'inéligibilité et 14 mois de prison avec sursis. Telle est l'exigence de morale et d'ordre de Nicolas Sarkozy", a-t-il ajouté.
La CGT s'est défendue de tout "procès d'intention" mais a dénoncé "la forte concentration des pouvoirs autour du président de la République et de son cabinet", qui consacre "une présidentialisation de fait sans contre-pouvoirs nouveaux". Elle affirme également que "l'organisation 'resserrée' du gouvernement annonce une réorganisation administrative des services de l'Etat qui n'a fait pour le moment l'objet d'aucune concertation". Jean-Christophe Le Duigou, un des secrétaires confédéraux, a ajouté que la centrale s'interroge sur "la création d'un ministère des comptes publics [qui] va prendre le dessus sur les autres ministères, avec d'un côté l'emploi [et] l'économie nationale et de l'autre le travail et les affaires sociales".
Le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, s'est dit "satisfait qu'il y ait un ministère du travail de plein exercice dans un gouvernement resserré, avec à sa tête un homme de dialogue", Xavier Bertrand. Selon lui, "mettre ensemble l'économie et l'emploi" dans un ministère dirigé par Jean-Louis Borloo "n'est pas forcément négatif, car si on fait les politiques d'emploi à part, ce sont toujours des politiques d'aide, d'exonération, etc." Il a espéré que le ministère des comptes publics sera "au service de la politique économique et de l'emploi" et n'imposera pas une "vision comptable à l'ensemble du gouvernement". Le numéro un de FO a enfin martelé qu'il fallait éviter toute "confusion entre le budget de la Sécurité sociale, qui est alimenté par les cotisations sociales, et le budget de l'Etat, qui est alimenté par les impôts".
La CFTC s'est étonnée "que le dossier de l'emploi apparaisse surtout 'économique' et déconnecté de celui des relations sociales", échoyant à Jean-Louis Borloo, chargé de l'économie, des finances et de l'emploi, alors que Xavier Bertrand devient ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. La confédération chrétienne se félicite cependant que MM. Borloo et Bertrand aient "une bonne connaissance des dossiers et de la pratique des relations sociales". Et escompte "un dialogue social maximum".
L'Union professionnelle artisanale (UPA) "salue le choix qui a été fait de rationaliser l'organisation gouvernementale. La réduction du nombre de ministères traduit une volonté d'efficacité et répond à la nécessité de faire des économies budgétaires". Dans un communiqué, elle "invite d'ores et déjà le premier ministre et l'ensemble du gouvernement à prendre appui sur les 900 000 entreprises artisanales françaises pour développer des politiques favorables à la croissance et à la création d'emplois".
La CFE-CGC "souligne la volonté d'associer étroitement économie et emploi, la bonne marche de l'une favorisant l'autre en quantité et en qualité", tout en rappelant "sa volonté de voir les Français travailler tous et travailler mieux. Des conditions de travail équilibrées et saines sont un facteur de motivation et de compétitivité des entreprises".
Nicolas Hulot s'est dit "à ce stade, content que quelqu'un qui ait l'expérience, l'envergure d'Alain Juppé, prenne le poste" de ministre d'Etat chargé de l'écologie, du développement et de l'aménagement durable, conformément à ce que prônait son Pacte écologique. L'animateur de télévision s'est félicité qu'un ancien premier ministre soit chargé du développement durable, "numéro deux dans un gouvernement de droite, qui n'était pas très spontané sur ces sujets". Il estime néanmoins que la tâche va être "très difficile, parce qu'il y a des logiques qui risquent d'apparaître contradictoires". Sa fondation a été conviée, avec les autres ONG environnementalistes, à rencontrer lundi le président de la République et M. Juppé, notamment afin de "définir les grands objectifs" du "Grenelle de l'environnement" annoncé.
samedi 19 mai 2007
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