UN REPORTER DE 14 ANS MET EN PLS TOUS LES MÉDIAS DOMINANTS
Source : https://www.youtube.com/watch?v=qCzyv08VnxQ&t=339s
L’erreur fondamentale
Dans le métro, un jeune homme angoissé dévisage les
passagers en se demandant ce qu’ils pensent de lui. L’insistance
étrange de ses regards fait que la plupart des passagers le
remarquent et l’observent. Intrigué, il change de voiture et
fait le même constat, qu’il répète ensuite sur toute la rame. Il
est alors convaincu que tous ces gens attendent de lui quelque
chose, probablement un acte grandiose et salvateur. Il va donc à
l’Elysée afin de parler au président et comme les vigiles ont
l’habitude de ces psychoses naissantes, le jeune homme délirant
se fait vite embarquer vers les urgences psychiatriques. Son
délire d’interprétation consiste à s’imaginer que tout le monde
est très intéressé par sa personne et que c’est cela qui
explique l’attention extraordinaire dont il a fait l’objet. Il
s’agit d’un délire parce qu’en réalité, ce sont ses regards
anormalement insistants qui ont suscité l’attention des
personnes qu’il croisait.
Attribuer des dispositions, bienveillantes ou malveillantes, à
des personnes sans tenir compte de leur situation est ce que les
psychologues appellent « l’erreur fondamentale » tant elle est
générale et tant elle fausse, quasi systématiquement, notre
perception sociale.
Un exemple à peine caricatural est celui du voleur qui fait
brutalement effraction dans un domicile et suscite une violente
réaction de légitime défense de la part du propriétaire.
Invoquer son origine ethnique pour expliquer la violence subie
suite à son intrusion serait, de la part du voleur, un complet
déni de réalité consistant à faire comme si ce n’était pas son
agression qui avait motivé l’acte de légitime défense. Ce serait
donc un propos délirant à force de mauvaise foi et il serait
même comique s’il n’était à craindre que certains le prennent au
sérieux.
Un autre exemple pourrait probablement provenir de la manière
dont Israël dénonce les attaques palestiniennes. Car en écartant
la longue et terrible situation d’annexion et/ou de colonisation
qui serait pourtant l’explication la plus logique de cette
violence et en attribuant plutôt des dispositions antisémites
aux Palestiniens, les autorités israéliennes ne
laisseraient-elles pas à penser qu’elles ont succombé à cette
fameuse « erreur fondamentale » ? Comment résister, il est vrai,
à l’adoption d’une perspective qui innocente les Israéliens en
même temps qu’elle justifie la violence de leurs interventions
armées contre des... antisémites ?
L’incident survenu récemment à Amsterdam — au cours duquel, au
sortir du match, des supporters du Maccabi Tel Aviv ont été
attaqués par des supporters propalestiniens — vient à l’appui de
cette hypothèse, à savoir, l’idée que le pouvoir sioniste serait
tenté d’attribuer à ses adversaires une disposition à
l’essentialisation haineuse des juifs afin de mieux passer sous
silence la situation rivalitaire engendrée par ses propres
violences.
En effet, on voit à cette occasion qu’Israël, par la voix de son
premier ministre, a dénoncé un “pogrom”, ce qui veut dire des
violences à caractère antisémite, donc des violences gratuites,
sans autre cause que la haine des juifs. Or, cette présentation
passe sous silence le fait que lesdites agressions sont
intervenues après de nombreuses provocations, dégradations et
violences de la part des supporters en question, qui n’étaient
donc pas des anges, loin s’en faut. Par exemple, la veille du
match, vêtus de noir et cagoulés, ils ont arraché des drapeaux
palestiniens sur des habitations privées néerlandaises en
scandant « va te faire foutre Palestine » et ils ont aussi
attaqué des chauffeurs de taxi néerlandais d’origine arabe. Ils
n’ont pas, non plus, respecté la minute de silence pour les
victimes des inondations en Espagne. Ainsi, au final, on voit
mal comment, après le match, le fait de s’être trouvés dominés
par les supporters propalestiniens de l’Ajax pourrait relever
des dispositions antisémites de leurs agresseurs plutôt que d’un
antagonisme suscité par l’état actuel du conflit en Palestine et
exacerbé par les provocations des supporters israéliens.
Je me demande si la morale de toute cette histoire ne pourrait
pas venir de la fable d’Esope évoquant un petit garçon qui
criait au loup alors qu’il n’y en avait pas. Mais dans le cas
présent, le problème ne serait pas qu’à la fin plus personne n’y
croit. Le problème serait qu’à la fin tout le monde saurait
qu’il s’agit d’un mensonge.
Luc-Laurent Salvador
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire