jeudi 29 janvier 2009

Yahvé, dieu du monothéisme, dieu unique des Hébreux ?

Israël Finkelstein, archéologue de renom, auteur du best-seller "La Bible dévoilée", répondait à la journaliste Bernadette Arnaud pour le magazine Sciences et Avenir, dans son numéro de janvier 2009. Ce chercheur prône un travail de reconstitution scientifique, malgré les contreverses, affirmant que les textes sacrés ne sont pas des références historiques.

Voici quelques extraits de cet entretien.

Bernadette Arnaud : Et le monothéisme ?
Israël Finkelstein : A Jérusalem, ce sera principalement Yahvé. Mais les auteurs bibliques connaissent l'existence d'autres dieux mineurs, auxquels des cultes sont rendus : par exemple Milkom, le dieu des Ammonites, ou Kemosh, dieu des Moabites. A ce stade, on doit donc plutôt parler de monolâtrie que de monothéisme. La lutte a dû être âpre pour le clergé du temple de Jérusalem, qui ne souhaitait voir qu'un culte rendu à Yahvé. Là, on assiste à une centralisation du culte, que l'on peut regarder aussi comme un choix politique pour renforcer le pouvoir royal.
[celui des rois Manassé puis Josias, du royaume de Juda, au VIIème siècle avant J-C]

Bernadette Arnaud : Yahvé n'aurait été auparavant qu'une divinité locale ? [avant l'édification du second temple de Jérusalem]
Israël Finkelstein : Longtemps, les divinités sont en effet territoriales. Yahvé n'a de pouvoir que sur le territoire d'Israël. Or, après la destruction du premier temple [en 587 avant J-C], il y a une véritable crise théologique : si Babylone a détruit Jérusalem, serait-ce parce que son Dieu est plus puissant que Yahvé ?
Dans la réponse réside tout le génie des auteurs judéens [du royaume de Juda où se réfugient les habitants d'Israël]. C'est un tour de passe-passe magistral. Du point de vue de Juda, Yahvé n'a fait que châtier le peuple d'Israël qui a violé ses commandements. Les Babyloniens ont en fait été manipulés par le Dieu d'Israël ! Donc, c'est à cet instant, aux VI-Vèmes siècles avant J-C, que Yahvé est investi d'un pouvoir universel et que débutent le judaïsme [religion créée au royaume de Juda] et le monothéisme. Tout cela se constate d'ailleurs à travers l'étude fine des niveaux archéologiques. Dès ce moment, on ne trouve plus aucune figurine ni représentation d'autres cultes !

Bernadette Arnaud : Existe-t-il des preuves archéologiques de pratique d'autres cultes ?
Israël Finkelstein : Aux temps monarchiques, il y avait des pratiques païennes. Il suffit pour cela de lire attentivement les prophéties de Jérémie et Ezéchiel. Sur le terrrain, même à Jérusalem, à quelques centaines de mètres du Temple, nous avons découvert des figurines de terre cuite ou encore des vases à libations. Elles prouvent des pratiques religieuses variées et le fait qu'au départ, il n'y avait pas qu'un culte exclusif à Yahvé. Au VIIème siècle avant J-C, il est sans doute la divinité principale d'un panthéon. Il est écrit comme le plus puissant.
Il existait aussi des rites envers d'autres divinités empruntées aux peuples voisins. Des inscriptions retrouvées dans le nord-est du Sinaï datées du VIIIème siècle avant J-C font même référence à une certaine "Ashéra, épouse de Yahvé" ... Mais après le tournant du VI-Vème siècle et le retour d'exil de Babylone, tous ces détails disparaissent.

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