samedi 13 décembre 2008

Programme PISA

Le programme PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves) est un ensemble d'études de l'OCDE visant à mesurer les performances des systèmes éducatifs des pays membres. Leur publication est triennale. La première étude fut menée en 2000, en 2003 et en 2006.

Les objectifs sont :
- comparer les performances de différents systèmes éducatifs ;
- identifier les facteurs de succès ;
- et suivre l'évolution de l'enseignement dans les pays membres de l'OCDE et les pays partenaires (près d'une soixantaine de pays) en conduisant des évaluations périodiques.

Important : il s'agit plus d'évaluer la façon dont les jeunes sont capables d'exploiter leurs connaissances dans leur pratique quotidienne que leur niveau théorique dans tel ou tel domaine des sciences ou des lettres.

La Finlande arrive en tête, suivie par la Corée du Sud, le Japon et Hong Kong.

Savoir lire
1. Finlande 543
2. Corée du Sud 534
3. Canada 528
4. Australie 525
5. Liechtenstein 525
6. Nouvelle-Zélande 522

Mathématiques
1. Hong Kong 550
2. Finlande 544
3. Corée du Sud 542
4. Pays-Bas 538
5. Liechtenstein 536
6. Japon 534

Résolution de problèmes
1. Corée du Sud 550
2. Finlande 548
2. Hong Kong 548
4. Japon 547
5. Nouvelle-Zélande 533
6. Macao 532

Sciences
1. Finlande 548
2. Japon 548
3. Hong Kong 539
4. Corée du Sud 538
5. Liechtenstein 525
6. Australie 525
7. Macao 525

Et la France dans tout ça ?

Comme les concepteurs de l'étude PISA ont dû se poser la question des compétences nécessaires à des jeunes de 15 ans pour faire face au monde d'aujourd'hui, avant de mettre en place les protocoles d'évaluation, il s'avère que le Haut Conseil de l'Education Nationale a bien dû admettre que l'Education Nationale n'a jamais posé la question en ces termes, - les compétences à acquérir à 15 ans.

L'école française vise des savoirs acquis, matière par matière : ceci aboutit à enseigner par exemple les Mathématiques non comme un outil au service d'apprentissages futurs, mais comme une discipline en elle-même. D'où le malaise face aux résultats PISA d'une partie des enseignants français.

Enfin, l'étude pose la question de la culture éducative en France : la France est non seulement un des pays qui consacre les plus forts moyens à l'éducation par élève, mais c'est aussi le pays où les élèves sont 'les plus stressés', et se sentent peu soutenus par leurs enseignants. (Corpus attitudes par rapport à l'école de l'enquête).

Le dogme "socialiste" de la classe hétérogène

Je suis enseignant dans le primaire depuis une douzaine d'années; mais après avoir travaillé auparavant dans le secteur privé (banques). Je me sens, à ce titre, marginal vis-à-vis de la grande majorité du corps enseignant. J'ai, me semble-t-il, un recul, un pragmatisme, une recherche d'efficacité qui ne reflète pas l'idéologie dominante parmi mes collègues.

Voici 3 ou 4 ans, un grand débat a été organisé sur l'école. Que faudrait-il changer pour améliorer l'école ? Pour moi, il y avait deux énormes évidences :
- arrêter de s'imposer des classes hétérogènes en primaire;
- et proposer un vrai conseil à l'orientation au secondaire (en fonction des compétences de l'élève mais aussi des besoins du marché, des réels débouchés, pour éviter d'avoir des centaines de milliers de postes non pourvus et à côté de ça des millions de chômeurs).

Sur les classes hétérogènes, qui pénalisent tout le monde selon moi, j'ai récemment interrogé le responsable de la formation des enseignants spécialisés, à l'IUFM de mon académie. Je lui ai demandé ce qui justifiait le fait qu'on s'impose chaque année, au moment de la consitution des classes, un tiers de "bons élèves", un tiers "d'élèves moyens" et un tiers "d'élèves en difficultés". Passé un moment d'agacement, où il me répondit pubiquement "C'est comme ça, il faut faire avec", en aparté, il me précisa : "La justification est sociale".

Totalement insatisfait par cette réponse, que je considère "dogmatique", idéologique, à l'inverse d'une démarche scientifique (observation, hypothèse, vérification par l'expérience), j'ai cherché des articles dans les journaux pédagogiques pour comparer l'efficacité des deux systèmes : classes hétérogènes / classes homogènes.

Sans avoir poussé bien loin mon enquête, je suis tombé sur un article de référence, de juin 2007, signé Eveline Charmeux, dans les Cahiers Pédagogiques n°454 (voir à http://www.cahiers-pedagogiques.com/article.php3?id_article=3128). La même qui, avec Jean Foucambert, avait soutenu la "lecture globale" (ou "idéovisuelle") dans les années 1980; heureusement proscrite depuis 2005 par le ministre de l'Education ?

Considérant que la demande de classe homogène est une hypocrisie, et qu'elle sous-entend en réalité "se débarrasser des mauvais élèves", Eveline Charmeux commence sa démonstration par une image : le moniteur de ski ennuyé par le dernier élève, souhaite le rejeter dans la classe de niveau inférieur. Poussant la caricature à l'extrême, le moniteur se retrouve à la fin avec un seul élève.
Le problème de cette méthode d'argumentation, c'est qu'elle peut se retourner contre vous. En effet, un peu plus loin dans l'article, Eveline Charmeux affirme (je cite) que "les enfants apprennent plus de leurs camarades que des formateurs.". Dans ce cas, pourquoi demander plus de moyens !? Moins il y aura d'enseignants, plus les élèves pourront se retrouver entre eux et apprendre davantage ! En poussant à l'extrême : aucune transmission entre les générations, un apprentissage totalement basé sur l'expérience personnelle ... et nous serions encore à l'âge de pierre (au mieux !).

Arrêtons les caricatures. Cherchons un compromis.

Je partage quand même son analyse finale :
"L’hétérogénéité des élèves [...] est difficile à admettre en classe et à gérer sans une totale réorganisation du travail, sans la disparition des cours magistraux comme vecteurs essentiels de l’enseignement, sans une conception réellement participative des élèves à leurs apprentissages et l’instauration d’une solidarité sans failles parmi les élèves, l’hétérogénéité est un boulet dont l’enseignant ne peut que vouloir se débarrasser.

La clé du désaccord, c'est l'importance donnée au cours magistral ! Quand on considère que c'est l'enseignant qui détient le savoir, il faut une classe homogène pour pouvoir le transmettre efficacement. Ce qui n'empêche pas le travail de groupe lors de séances de travaux pratiques.

Par contre, si l'on considère que le savoir résulte de l'échange entre les enfants et que l'enseignant n'a d'autre fonction que celle d'animateur, l'hétérogénéité redevient crédible ... avec les bons élèves dans le rôle de "mini-enseignants".

Pour vérifier mon hypothèse (enseigner en classe homogène est plus efficace qu'en classe hétérogène), j'ai réalisé une expérience voici quelques années. Avec la complicité de deux autres enseignantes, comme par hasard issues elles-aussi du privé, nous avons officieusement échangé nos élèves de CP, prétextant la mise en place de "groupes de besoin" (pour parler politiquement correct). J'ai pris en charge la classe où tous les "élèves en difficulté" étaient rassemblés, tandis que mes deux autres collègues prenaient les "moyens" et les "bons" (en effectifs plus importants).

Les résultats ont été foudroyants ! Des élèves "en difficulté" jusque-là inhibés, sans réaction, passifs devant les obstacles, retrouvaient le sourire, prenaient du plaisir à réussir des exercices enfin à leur portée, à comprendre des leçons décortiquées, adaptées à leur rythme d'apprentissage, et en redemandaient ! ... Et, dans les autres classes ainsi reconstituées, les "bons élèves" n'avaient plus à attendre tout le temps les autres, on leur proposait enfin d'aller plus loin. Enthousiasme général !

Qu'on ne vienne pas me dire "Et la pédagogie différenciée au sein d'une classe ?". C'est du bricolage pour faire coller la réalité avec le dogme "socialiste" (au sens péjoratif) ! Si on veut de la pédagogie différenciée, de la vraie, il faut différencier les classes !

Les enseignants auront trois fois moins d'efforts à fournir, et les élèves auront trois fois plus de résultats et de bonheur à venir à l'école !