Le Monde | 03.09.2014 à 11h37
Par Frédéric Platon
Contre
toute attente, le chef de l'état a annoncé ce matin sa démission et sa
volonté de mettre en place une assemblée constituante avant son départ.
C'est
une véritable tempète politique qui a secoué l'Elysée ce matin. Durant
une conférence de presse extraordinaire, le chef de l'état s'est adressé
à une vingtaine de journalistes convoqués au préalable par l'Elysée.
Dans un discours fleuve de plus de 2h, le président, visiblement ému par
les circonstances, a longuemement justifié son départ.
François
Hollande a donc annoncé son intention de renoncer au pouvoir et de
composer une assemblée de citoyens tirés au sort, chargée de réécrire la
Constitution Française. Le Président se donne six mois pour mener a
bien cette ultime mission. Sa démission sera effective en avril 2015.
Sa
légitimité, dejà attaquée par les résultats aux dernières élections
européennes et par des sondages historiquement bas, n'aura pas résisté
au désavoeu massif de sa propre classe politique après son revirement à
droite et la démission du gouvernement. S'avouant incapable de
constituer une majorité cohérente, François Hollande préfère se retirer
du pouvoir, tout en initiant une refonte historique des institutions
françaises.
Avec Charles de Gaulle, François Hollande devient ainsi
le deuxième président de la 5e république à démissionner au cours de son
mandat.
«Une impossibilité structurelle de s'opposer aux pouvoirs de l'argent et de la finance en France»
Au
cours de son discours, le Président tente d'expliquer ses errements
politiques récents par une «impossibilité structurelle de s'opposer aux
pouvoirs de l'argent et de la finance en France»
«Le système
politique actuel est miné par les luttes d'égo et les calculs des partis
politiques. Le pouvoir est noyauté par les puissances de l'argent et
leur collusion avec les médias qu'il détiennent. En l'état, nos
institutions n'assurent pas la souvernaineté du peuple et ne me
permettent pas non plus de mettre en place la politique pour laquelle
j'ai été élu.»
Le Président détaille ensuite les motivations et
modalités de la formation d'une assemblée constituante. L'intonation de
son discours, engagé et exhalté, tranche avec le ton neutre et mesuré de
ses interventions passées.
Aucun mouvemement politique ne peut s'imposer s'il s'oppose frontalement aux logiques néo libérales
«Les
Français doivent comprendre que le suffrage universel n'est pas la
démocratie. Les élections préselectionnent des hommes et des femmes
politiques de carrière, motivés pour la plupart par des démarches
arrivistes et égocentriques. Ils investissent davantage de temps et
d'énergie dans leur réelection prochaine que dans la recherche du bien
commun. Issus pour la plupart de classes aisées, sortant des mêmes
écoles, ils ne sont pas représentatifs de la diversité de la population
française, sont déconnecté des réalités économiques et ne partagent pas
le sentiment d'urgence du plus grand nombre. En outre, de par le coût
exhorbitant des campagnes et le nécessaire concours des grands médias,
aucun mouvemement politique ne peut s'imposer s'il s'oppose frontalement
aux logiques néo libérales, à la finance, à l'austérité, aux lobbys
industriels.»
François Hollande évoque alors le tirage au sort comme alternative souhaitable au suffrage universel
«Le
tirage au sort d'assemblées de citoyens», affirme t'il, «protège de la
plupart de ces dérives et assure une représentativité idéale du peuple
francais.»
Citant Rousseau et donnant la Suisse et l'Islande en
exemple, François Hollande appèle les Français à reprendre eux même leur
avenir en main .
«Les Français ne doivent plus attendre de
changement de cap d'aucun parti élu. Ils ne doivent plus déléguer leur
pouvoir à des représentants. Les citoyens doivent réinvestir eux même la
politique. Pour ce faire, il faut un changement de nos institutions.
Elles doivent garantir l'indépendance des médias, mettre en place une
assemblée de citoyens, instaurer des référundums d'initiative populaire,
comme en Suisse. Ces évolutions passent nécessairement par la
réécriture de la Constitution Française. La Constitution est la base de
notre Contrat Social, tel que décrit par Rousseau. Pour être légitime,
son écriture ne saurait émaner du pouvoir politique en place : Les
Français doivent écrire eux même leur contrat social. Le peuple
Islandais nous a montré la faisabilité d'un tel projet en 2012, au
lendemain d'une crise fincancière sans précédent.»
François Hollande clos enfin son discours sur une note d'ambition personnelle :
«Je
ne veux pas laisser à l'Histoire l'image d'un président qui aurait
trahi son peuple. J'ai découvert au cours de mon mandat les forces qui
dirigent réellement au sommet de l'état. Ces forces n'ont rien de
démocratiques. En l'état, je me sens aussi impuissant que le peuple
Français à tenir front aux puissances libérales qui attaquent de toutes
parts notre modèle social. Je souhaite léguer à la nation le cadeau
inestimable de la souveraineté populaire et de l'autonomie politique.
J'ai pleinement confiance en la capacité des Français à faire les bons
choix pour leur propre avenir, mieux qu'aucun expert auto-proclamé ne
saurait le faire. C'est avec émotion et bienveillance que je leur lègue
mes pouvoirs, comme un père mettrait sa confiance entre les mains de ses
enfants.»
Le Conseil Constitutionnel se réunira demain matin pour
entériner la démission du Président et organiser le tirage au sort de
l'assemblée constituante.
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