vendredi 27 mars 2020

Dans l'Europe du virus, les bombardiers US nucléaires d'attaque arrivent


Le quotidien italien Il Manifesto a publié le 17 mars 2020 (https://ilmanifesto.it/nelleuropa-del-virus-i-bombardieri-usa-da-attacco-nucleare/) un article soulignant la contradiction entre l'annonce officielle du retrait des troupes américaines des gigantesques manœuvres de l'Otan Defender Europe 20 et l'envoi de bombardiers US nucléaires d'attaque.

«Officiellement, à cause du Covid-19 les compagnies aériennes des Etats-Unis ont supprimé de nombreux vols pour l'Europe. Mais il y a une «compagnie» étasunienne qui, au contraire, les a augmentés, c'est l’US Air Force», écrit le journaliste italien.

Ces derniers jours, l’US Air Force a déployé en Europe une task force de bombardiers furtifs (stealth) B-2 Spirit. L’annonce vient du «US European Command» de Stuttgart, le commandement européen des États-Unis. Il est sous les ordres du général Tod D. Wolters de l'US Air Force qui est en même temps à la tête des forces de l'Otan en tant que commandant suprême allié en Europe (SACEUR). L' «US European Command» précise que la «task force», composée d’un nombre non précisé de bombardiers provenant de la base de Whiteman au Missouri, «est arrivée le 9 mars à Lajes Field dans les Açorres, au Portugal», écrit le quotidien, information confirmée par le site de l'armée US.

Le bombardier stratégique B-2 Spirit, l’avion le plus cher du monde dont le coût dépasse les deux milliards de dollars, est l’avion des Etats-Unis le plus évolué pour mener une attaque nucléaire. Chaque appareil peut transporter 16 bombes thermonucléaires B-61 ou B-83, avec une puissance maximale totale équivalente à plus de 1.200 bombes d’Hiroshima. Du fait de sa voilure, de son revêtement et de ses systèmes électroniques, le B-2 Spirit est difficilement repérable par les radars ce qui en fait, comme la presse le dit, un «avion invisible».

Même s’il a déjà été utilisé dans une guerre, par exemple contre la Libye en 2011, mais avec des bombes non-nucléaires de grande puissance -il peut en transporter 80- à guidage satellitaire, il est employé pour pénétrer à travers les défenses ennemies  et pour effectuer une attaque nucléaire par surprise. L'US European Command précise dans un communiqué publié le 9 mars que ces bombardiers vont opérer «depuis diverses installations militaires sous la zone d'action se trouvant sous la responsabilité du Commandement européen des États-Unis». Cette zone d'action comprend toute la région européenne et toute la Russie, la partie asiatique incluse. Ceci signifie que les bombardiers US nucléaires d'attaque nucléaire, les plus avancés, opéreront, depuis des bases en Europe et, donc, à proximité des frontières avec la Russie. «Si l’on inverse le scénario, c’est comme si les bombardiers russes d’attaque nucléaire, les plus avancés, opéraient depuis des bases situées à Cuba à proximité des États-Unis», met en garde le journaliste italien.

L’objectif poursuivi par Washington est évident. Il s'agit d' accroître la tension avec la Russie en utilisant l’Europe comme première ligne de confrontation. Cela permet à Washington de renforcer son leadership sur les alliés européens et d’orienter la politique étrangère et militaire de l’Union européenne dans laquelle 22 des 27 membres appartiennent à l’Otan sous commandement des Etats-Unis.

Cette stratégie est facilitée par l'immense crise provoquée par le Coronavirus. Aujourd’hui plus que jamais, dans une Europe en grande partie paralysée par le virus, les Etats-Unis peuvent faire ce qu’ils veulent. «Ce transfert de bombardiers, employés pour une attaque nucléaire surprise en temps de crise sanitaire XXXL dans le plus grand silence médiatique, dévoile le consensus existant entre tous les gouvernements et parlements européens et de l'UE», dénonce Il Manifesto. «On a pu, d'ailleurs, assisté dans les média au même silence concernant Defender Europe 20 qui est le plus grand déploiement de forces américaine en Europe depuis la fin de la Guerre Froide».

En effet, les média ont parlé seulement de cette grande opération militaire alliant les forces de l'Otan quand l’US European Command a publié des communiqués sur la menace liée au Coronavirus où celui-ci expliquait devoir réduire le nombre de ses soldats américains participant à cet exercice: «Depuis le 13 mars, tous les mouvements de personnel et d'équipement des États-Unis vers l'Europe ont cessé. La santé, la sécurité et l'état de préparation de nos militaires, civils et membres de nos familles sont notre principale préoccupation».

Dans le cadre d’une véritable opération psychologique militaire réalisée par de nombreux média, y compris en Italie, il a été expliqué aux lecteurs que l’exercice Defender Europe 20 était quasiment annulé à cause de la pandémie. Le commandement américain basé en Europe répandait une information rassurante faisant croire que la priorité était de protéger la santé des soldats américains et celle des autres membres de l'Otan et des populations civiles. Cette annonce de retrait du déploiement Defender Europe 20 se heurte à l'annonce de l'arrivée de bombardiers américains d'attaque nucléaire ayant chacun une puissance de destruction équivalente à plus de 1.200 bombes que celle d'Hiroshima. A l'heure de la catastrophe sanitaire en Italie, lourdement relayée par les média comme dans un exercice militaire de communication de guerre, on peut se poser des questions sur cet envoi d'avions en Italie.

Olivier Renault

Source https://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=1476

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