Par Vincent Collen
Publié le 2 déc. 2019 à 16h30Mis à jour le 2 déc. 2019 à 16h41
« Le robinet est ouvert », a lancé Alexeï Miller, le patron du groupe gazier russe Gazprom
, à l'adresse de son ami Vladimir Poutine. Le gazoduc Power of Siberia a
été inauguré ce lundi. Il s'étirera à terme sur quelque 3.000
kilomètres, de l'est de la Sibérie aux provinces du nord-est de la
Chine. Le nouveau pipeline permettra d'exporter jusqu'à 38 milliards de
mètres cubes de gaz russe par an vers la Chine lorsqu'il arrivera à
pleine capacité en 2025. Le contrat, signé pour trente ans, s'élève à
400 milliards de dollars. C'est le plus gros jamais remporté par
Gazprom, la compagnie proche du Kremlin qui détient le monopole des
exportations de gaz par pipeline depuis la Russie.
Pour
la Chine, c'est une infrastructure cruciale qui répondra à la demande
croissante en gaz, une source d'énergie poussée par Pékin pour le
chauffage et l'industrie en remplacement du charbon
, plus polluant. La demande a déjà triplé en moins de dix ans mais le
gaz ne représente encore que 8 % de la consommation d'énergie du pays,
contre 23 % en moyenne dans le monde. Le potentiel est donc énorme. La
Chine produit elle-même du gaz, mais pas assez : les importations
représentent plus de 40 % des besoins, une proportion qui ne cesse
d'augmenter.
Guerre commerciale
Le
président chinois Xi Jinping cherche à diversifier le plus possible les
approvisionnements pour ne pas trop dépendre d'un pays étranger. La
Chine est déjà reliée par gazoduc au Turkménistan, au Kazakhstan et à la
Birmanie. Elle importe aussi massivement du gaz sous forme liquéfiée
(GNL) d'Australie, d'Indonésie, du Qatar et… des Etats-Unis.
Cette dernière source s'est
tarie avec la guerre commerciale entre Washington et Pékin car le
gouvernement chinois applique désormais des taxes douanières sur le GNL
américain. Pour Vitaly Yermakov, chercheur associé à l'Oxford Institute
for Energy Studies, le nouveau gazoduc ne devrait cependant pas se
substituer au GNL, consommé majoritairement dans les régions côtières de
la Chine. « Il n'y a pas de concurrence directe entre les deux sources d'approvisionnement », dit-il.
Poutine regarde vers l'Asie
Pour
Gazprom, ce pipeline est un précieux débouché pour le gaz extrait du
sous-sol de la Sibérie orientale, une région éloignée des zones de
consommation. « Il n'est aujourd'hui pas viable économiquement de l'acheminer vers l'Europe, explique Michael Moynihan, analyste chez Wood Mackenzie. Le nord de la Chine est le marché le plus évident ».
Cela permet aussi à Gazprom de diversifier sa clientèle. Le groupe
exporte aujourd'hui l'essentiel de sa production vers l'Europe. Or les
flux de gaz russe vers l'Union européenne sont incertains à long terme,
pour des raisons à la fois environnementales -l'Europe cherche à réduire
sa consommation d'énergies fossiles- et politiques - de nombreux
Etats-membres, à commencer par la Pologne, critiquent cette dépendance
vis-à-vis de Moscou. Le gazoduc s'inscrit plus largement dans la réorientation de la diplomatie de Vladimir Poutine vers l'Asie . La moitié du gaz liquéfié produit en Russie est déjà exportée vers le Japon et la Corée.
1 commentaire:
A l'époque, le contrat a été libellé en dollars us (400 milliards). Est-ce que Vladimir Poutine et Xi Jingping ont eu l'idée de changer de devise entre temps ? Ce serait un motif de Troisième Guerre mondiale aux yeux des États-Unis d'Amérique et de la FED.
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