Madame Bagarry,
Je vous remercie d'avoir pris la peine de me répondre et de m'exposer votre vision de la démocratie. Cela dit, votre activité législative doit être conditionnée davantage par les souhaits de vos électeurs que par votre opinion personnelle ou les directives de votre parti, puisque la souveraineté nationale appartient au peuple et qu'aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice (article 3 de la Constitution). Voter des lois qui contreviennent à la volonté générale (art. 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen) ou ne pas voter celles qui correspondent à la volonté de l'immense majorité des Français serait une usurpation de leur souveraineté, ce qui vous ôterait toute légitimité.
C'est pourquoi
j'aimerais d'abord attirer votre attention sur la définition même du mot
"démocratie" qu'on a tendance à mettre à toutes les sauces.
Du grec "demos" (le peuple) et "kratos" (le pouvoir), la démocratie est un système politique dans lequel c'est le peuple qui exerce le pouvoir, ou si vous préférez la phrase d'Abraham Lincoln reprise dans l'article 2 de notre Constitution : le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. Et le pouvoir, c'est la faculté de faire la loi. Celui qui impose sa loi, c'est celui qui a le pouvoir.
Vous écrivez : " Cette démocratie est vivante, (...) vient s’immiscer dans nombre d'espaces, (...)
Néanmoins, si les espaces et les outils sont nombreux (les associations, les syndicats, les différentes instances politiques, etc.) je ne voudrais pas pour autant qu'une forme devienne tellement proéminente qu'elle en occulte les autres.
C'est votre opinion, et je ne voudrais pas qu'elle devienne tellement proéminente qu'elle occulte celle des millions de Français qui veulent le RIC !
Malheureusement vous péchez par excès d'optimisme en disant que la démocratie est vivante : les associations et les syndicats ne font pas la loi. La liberté d'association est effectivement l'une des libertés fondamentales nécessaires à la démocratie, mais elle n'a rien à voir avec l'exercice de la souveraineté. C'est le RIC qui permettra au peuple de reprendre la parole quand il lui plaira pour porter des sujets de débat sur la place publique afin de prendre des décisions, c'est-à-dire voter des lois.
Vous pointez certains inconvénients des référendums ("ils sont lourds à organiser et onéreux,...") mais je vous répète que sans l'initiative citoyenne en matière de référendum, il n'y a pas de démocratie, de même qu'une voiture sans moteur n'est pas une voiture car la fonction d'une voiture est de vous transporter d'un point A à un point B, et sans moteur, vous n'allez nulle part ! (même si le moteur ne doit évidemment pas devenir tellement proéminent qu'il en occulterait les sièges, la carrosserie et les roues !)
Quand je relis la suite de votre lettre, j'ai la très nette impression que vous tentez de noyer le poisson : " D'autres formes de démocratie directe existent et viennent alimenter la démocratie représentative. Utilisons-les !" Je ne vois pas lesquelles... on ne doit pas vivre dans le même pays ! Vous proposez de faire grandir les corps intermédiaires. Ah bon ? La démocratie directe a besoin d'intermédiation ? Les réunions publiques ? Comme lors du "grand débat" ? Mais ça sert à blablater, pas à décider ! (même si la liberté d'expression est aussi une liberté fondamentale indispensable en démocratie, comme le volant est indispensable à la voiture, mais la voiture ne se réduit pas au volant ni aux roues...)
" Et puis, pour certaines questions de grande ampleur, ayons recours au référendum, pourquoi pas ? Il y en a eu 9 depuis l’avènement de Vème République et cela me semble un rythme correct, d'autant que les questions posées sont souvent extrêmement techniques et pointues et requièrent un niveau d'information important."
Mais ce n'est pas à vous ni à moi de décider quelles questions méritent le recours au référendum, ni quel est le "rythme" optimal, c'est à l'ensemble des Français de se prononcer ! Et s'ils décident de soumettre à référendum des questions techniques et pointues, c'est qu'ils sont prêts à s'informer sur le sujet pour prendre les bonnes décisions !
Quant à la réforme institutionnelle qui va bientôt proposer de faciliter le recours aux référendums, je suppose que vous voterez contre puisque vous estimez que le rythme actuel est satisfaisant et que de toutes façons les référendums ne sont pas "une solution absolue" et ne peuvent constituer "la seule façon de consulter les citoyens"...
Pour finir, vous me parlez d'un "Conseil de la participation citoyenne", mais à vous lire, il est clair qu'on n'envisage en aucun cas de faire participer les citoyens aux décisions, mais seulement aux délibérations. Ce qui me fait dire que la "démocratie participative" n'est que participation, mais certainement pas démocratie !
En guise de conclusion :
Vous êtes médecin. Vous savez mieux que quiconque que sans un bon diagnostic il est impossible de prescrire le traitement qui permettra au malade de guérir. Or je suis très inquiet quand je lis dans votre courriel que "notre démocratie est vivante" : il vous a donc échappé qu'elle est gravement malade pour ne pas dire agonisante ? (lisez les enquêtes du CEVIPOF, ça fait quelques années que le mal est déclaré) Et je ne parle pas seulement de l'épidémie de jaunisse de l'hiver dernier, qui n'est que le symptôme. Le mal est plus profond : avec le CETA par exemple, des tribunaux arbitraux saisis par des multinationales pourront condamner les États qui porteraient atteinte à leurs profits par une législation écologique ou sociale ! Mais avec le RIC en toutes matières nous pourrions nous opposer à la ratification de tels traités (ou dénoncer ceux qui sont déjà ratifiés). Le mal est profond, mais le RIC est l'antidote. Alors ne me parlez pas d'associations, de syndicats, de réunions publiques ou de démocratie participative : pour reprendre la métaphore médicale, c'est aussi efficace que l'homéopathie pour guérir le cancer ! Or, le gouvernement que vous soutenez a décidé de dérembourser les petits granulés sucrés... alors jetez les référendums d'initiative partagée, droits de pétition et autre conseils de la participation citoyenne dans les oubliettes de l'Histoire et donnez-nous le RIC !
Si mes arguments vous amènent à reconsidérer votre point de vue sur cette question essentielle de la démocratie, fondement de toute légitimité politique, je veux bien vous rencontrer pour approfondir le sujet. Dans le cas contraire, restons-en là.
Avec mes salutations les plus cordiales.
Du grec "demos" (le peuple) et "kratos" (le pouvoir), la démocratie est un système politique dans lequel c'est le peuple qui exerce le pouvoir, ou si vous préférez la phrase d'Abraham Lincoln reprise dans l'article 2 de notre Constitution : le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. Et le pouvoir, c'est la faculté de faire la loi. Celui qui impose sa loi, c'est celui qui a le pouvoir.
Vous écrivez : " Cette démocratie est vivante, (...) vient s’immiscer dans nombre d'espaces, (...)
Néanmoins, si les espaces et les outils sont nombreux (les associations, les syndicats, les différentes instances politiques, etc.) je ne voudrais pas pour autant qu'une forme devienne tellement proéminente qu'elle en occulte les autres.
C'est votre opinion, et je ne voudrais pas qu'elle devienne tellement proéminente qu'elle occulte celle des millions de Français qui veulent le RIC !
Malheureusement vous péchez par excès d'optimisme en disant que la démocratie est vivante : les associations et les syndicats ne font pas la loi. La liberté d'association est effectivement l'une des libertés fondamentales nécessaires à la démocratie, mais elle n'a rien à voir avec l'exercice de la souveraineté. C'est le RIC qui permettra au peuple de reprendre la parole quand il lui plaira pour porter des sujets de débat sur la place publique afin de prendre des décisions, c'est-à-dire voter des lois.
Vous pointez certains inconvénients des référendums ("ils sont lourds à organiser et onéreux,...") mais je vous répète que sans l'initiative citoyenne en matière de référendum, il n'y a pas de démocratie, de même qu'une voiture sans moteur n'est pas une voiture car la fonction d'une voiture est de vous transporter d'un point A à un point B, et sans moteur, vous n'allez nulle part ! (même si le moteur ne doit évidemment pas devenir tellement proéminent qu'il en occulterait les sièges, la carrosserie et les roues !)
Quand je relis la suite de votre lettre, j'ai la très nette impression que vous tentez de noyer le poisson : " D'autres formes de démocratie directe existent et viennent alimenter la démocratie représentative. Utilisons-les !" Je ne vois pas lesquelles... on ne doit pas vivre dans le même pays ! Vous proposez de faire grandir les corps intermédiaires. Ah bon ? La démocratie directe a besoin d'intermédiation ? Les réunions publiques ? Comme lors du "grand débat" ? Mais ça sert à blablater, pas à décider ! (même si la liberté d'expression est aussi une liberté fondamentale indispensable en démocratie, comme le volant est indispensable à la voiture, mais la voiture ne se réduit pas au volant ni aux roues...)
" Et puis, pour certaines questions de grande ampleur, ayons recours au référendum, pourquoi pas ? Il y en a eu 9 depuis l’avènement de Vème République et cela me semble un rythme correct, d'autant que les questions posées sont souvent extrêmement techniques et pointues et requièrent un niveau d'information important."
Mais ce n'est pas à vous ni à moi de décider quelles questions méritent le recours au référendum, ni quel est le "rythme" optimal, c'est à l'ensemble des Français de se prononcer ! Et s'ils décident de soumettre à référendum des questions techniques et pointues, c'est qu'ils sont prêts à s'informer sur le sujet pour prendre les bonnes décisions !
Quant à la réforme institutionnelle qui va bientôt proposer de faciliter le recours aux référendums, je suppose que vous voterez contre puisque vous estimez que le rythme actuel est satisfaisant et que de toutes façons les référendums ne sont pas "une solution absolue" et ne peuvent constituer "la seule façon de consulter les citoyens"...
Pour finir, vous me parlez d'un "Conseil de la participation citoyenne", mais à vous lire, il est clair qu'on n'envisage en aucun cas de faire participer les citoyens aux décisions, mais seulement aux délibérations. Ce qui me fait dire que la "démocratie participative" n'est que participation, mais certainement pas démocratie !
En guise de conclusion :
Vous êtes médecin. Vous savez mieux que quiconque que sans un bon diagnostic il est impossible de prescrire le traitement qui permettra au malade de guérir. Or je suis très inquiet quand je lis dans votre courriel que "notre démocratie est vivante" : il vous a donc échappé qu'elle est gravement malade pour ne pas dire agonisante ? (lisez les enquêtes du CEVIPOF, ça fait quelques années que le mal est déclaré) Et je ne parle pas seulement de l'épidémie de jaunisse de l'hiver dernier, qui n'est que le symptôme. Le mal est plus profond : avec le CETA par exemple, des tribunaux arbitraux saisis par des multinationales pourront condamner les États qui porteraient atteinte à leurs profits par une législation écologique ou sociale ! Mais avec le RIC en toutes matières nous pourrions nous opposer à la ratification de tels traités (ou dénoncer ceux qui sont déjà ratifiés). Le mal est profond, mais le RIC est l'antidote. Alors ne me parlez pas d'associations, de syndicats, de réunions publiques ou de démocratie participative : pour reprendre la métaphore médicale, c'est aussi efficace que l'homéopathie pour guérir le cancer ! Or, le gouvernement que vous soutenez a décidé de dérembourser les petits granulés sucrés... alors jetez les référendums d'initiative partagée, droits de pétition et autre conseils de la participation citoyenne dans les oubliettes de l'Histoire et donnez-nous le RIC !
Si mes arguments vous amènent à reconsidérer votre point de vue sur cette question essentielle de la démocratie, fondement de toute légitimité politique, je veux bien vous rencontrer pour approfondir le sujet. Dans le cas contraire, restons-en là.
Avec mes salutations les plus cordiales.
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