François Asselineau avait estimé, lors
d'une interview donnée en avril, que le système conduisant à corriger
symboliquement un vote permettait au leader de la France insoumise de
mener un double jeu, lorsqu'il était député européen. Ce dernier s'était
déjà défendu de tout calcul politique sur son blog en 2016.
Question posée le 17/06/2019
Vous nous avez demandé de vérifier une déclaration du président de l’Union populaire républicaine (UPR), François Asselineau, invité sur Polony.tv le 20 avril 2019, partagée sur Twitter puis reprise par le site identitaire Fdesouche.
Il affirme que le leader de la France insoumise s’est trompé de vote 266 fois au Parlement européen lorsqu’il y était député. «Monsieur Mélenchon s’est spécialisé dans les erreurs de vote, et c’est pas rien. Vous avez vu 266 erreurs de vote dans son mandat. Parce qu’il y a un truc qu’il faut savoir au Parlement européen, c’est que vous pouvez voter une chose, et puis dire je me suis trompé et faire ensuite une correction de vote. Sauf que votre correction de vote est portée au public, mais le vote initial reste valide pour tout le temps», explique-t-il.
Le détail des votes n’est pas toujours connu
D’après le site européen votewatch.eu, qui observe la vie parlementaire, Jean-Luc Mélenchon a bien indiqué s’être trompé de vote 266 fois (sur 4 424) en trois ans, c’est-à-dire lors de son deuxième mandat (il a quitté son siège après avoir été élu aux législatives de 2017). Il était «de loin en tête de cette liste lorsqu’il était encore député», précise le site. «Au total, 100 députés [sur 751] ont corrigé leur vote plus de cinquante fois» au cours de leur mandat, ajoute Votewatch. Les «erreurs de vote», comme dit François Asselineau, ou plutôt «corrections de vote», peuvent être signalées par un député européen pour être inscrites sur la liste des résultats. Cependant, elles sont symboliques, car elles ne modifient pas le résultat du scrutin, comme l’indique François Asselineau.En séance plénière, «les votes se déroulent généralement vers midi. Le rythme est alors assez soutenu : ce sont parfois des centaines d’amendements qui sont votés par les députés», explique un article sur le site du parlement. Il en va de même de même pour les votes en commission.
Les explications de Mélenchon en 2016
Pourquoi corriger son vote ? En 2016, Jean-Luc Mélenchon a donné plusieurs explications au nombre élevé de corrections de vote qu’il apporte, dans un billet de blog : «Parfois, dans l’hémicycle, je discute avec mes voisins du texte en train d’être voté et peux donc être amené à modifier ma position par rapport à ce que j’avais prévu de voter. […] Il arrive aussi que je me trompe (mon doigt peut ripper) ou même que "j’oublie de voter", ce qui signifie en fait que je n’ai pas été assez rapide pour actionner le boîtier. Car à l’heure des votes au Parlement européen […], nous votons en cadence à un rythme intensif. Un seul texte peut faire l’objet de plusieurs votes (jusqu’à une centaine) car nous votons les textes par paragraphe ou par morceau de paragraphe, par amendement et par un vote final sur la proposition législative ou la résolution. Avec en moyenne cinq votes par minute, un toutes les douze secondes. À ce rythme, les erreurs sont des plus probables.»Rester fidèle au groupe
Mais d’après François Asselineau, le recours aux corrections de vote permet «à M. Mélenchon de jouer double jeu, constamment», vis-à-vis de ses électeurs et «de l’oligarchie financière, de l’agrobusiness». Le président de l’UPR prend comme exemple le vote sur le retour des farines animales pour les poissons, en 2011. Jean-Luc Mélenchon, qui en était à son premier mandat comme député européen, avait voté en faveur du texte avant de se raviser, comme on peut le voir sur la liste des résultats.Est-ce que ce choix est calculé ? Non, avait supposé le Lab d’Europe 1, en 2013, dans un article sur le sujet. Le leader de la France insoumise n’est pas le seul à avoir rectifié son vote. Avec lui, six autres Français (sur huit rectifications) dont Elie Hoarau, pour les communistes, Patrick Le Hyaric, Jacky Hénin au Front de gauche, l’écologiste Corinne Lepage, la socialiste Pervenche Berès, et Brice Hortefeux, à droite. «Excepté Corinne Lepage [et Patrick Le Hyaric qui n’avait pas voté, ndlr], les députés mentionnés ci-dessus ont d’abord suivi l’avis de leur formation européenne, avant de se raviser. Il est donc possible de penser qu’ils ont suivi le mouvement de leur formation, avant de se rendre compte de l’objet de leur vote», observait le site d’actualité politique.
Sur le nombre parfois élevé de corrections de vote, le site Votewatch estime toutefois que ce recours peut parfois être utilisé comme stratégie politique : «Soit le système électronique du Parlement a de sérieux problèmes lorsque des décisions importantes sont prises, soit, dans certains cas, les députés peuvent abuser de ce mécanisme pour dissimuler leurs positions, parce qu’ils ont changé d’avis, ou parce qu’ils ont été convaincus entre-temps du contraire. Par exemple, les eurodéputés voudront peut-être montrer qu’ils ont voté d’une part pour leur groupe politique européen (c’est-à-dire qu’ils se sont alignés sur leurs collègues des autres pays) et d’autre part pour leur électorat dans leur pays d’origine. Dans d’autres cas [quand ils n’ont pas voté du tout], les députés se contentent d’ajouter leurs votes plus tard dans le procès-verbal afin de ne pas donner l’impression qu’ils étaient absents ou qu’ils n’ont pas prêté attention aux décisions importantes qui ont été prises», peut-on lire. A noter que lors de son second mandat, Jean-Luc Mélenchon a suivi le vote de son groupe politique, la GUE-NGL à 80,69% et à 89,15% celui de son parti.
Cordialement
Source : https://www.liberation.fr/checknews/2019/06/19/est-ce-que-melenchon-s-est-trompe-266-fois-de-vote-lorsqu-il-etait-eurodepute_1734483?fbclid=IwAR2V2SLM8sz5iETYd7-MSyl8FrO7eEB4tVFz_IzIGGGCZKKdkvCjtF-RAPM
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