Cet article a été qualifié de "meilleur article sur les Gilets Jaunes" par un internaute sur un forum de discussion ; avant de m'être à nouveau proposé personnellement dans un groupe de discussion.
Je vais simplement intercaler quelques commentaires personnels (en italique et en couleur) pour exprimer mon ressenti spontané, si possible argumenté.
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Le mouvement des Gilets jaunes ne cesse d’embarrasser le pouvoir, ses défenseurs et ses interprètes médiatiques privilégiés. Porté par des personnes entrées par effraction dans l’espace public, il met sur le devant de la scène des questions gênantes. Non pas qu’elles soient nouvelles, mais les gouvernants en ont perdu depuis longtemps les réponses. Ou plutôt, les institutions par lesquelles ils gouvernent se sont largement fondées sur le refoulement de ces questions, leur oubli. Hier, c’était la question de l’impôt, du juste prix des choses, des moyens de vivre décemment, de l’économie morale trahie avec fierté par le président de la République[1]. Aujourd’hui, c’est cette vieille question de la démocratie [...]
Ah ! La "démocratie" ! Sommes-nous en démocratie ?
L'utilisation de ce mot était péjoratif dans la bouche des pères-fondateurs de nos États modernes; tant chez les fondateurs des États-Unis d'Amérique que ceux de la République française. Il faut attendre 1828 aux États-Unis, avec Andrew Jackson, puis 1848 en France avec la IIème République de Louis-Napoléon Bonaparte, pour que le mot "démocratie" soit utilisé à nouveau positivement; non pas pour changer les institutions républicaines oligarchiques, mais pour capter les voix des électeurs pauvres. Par pure démagogie électorale donc, lors d'un élargissement de l'électorat à l'ensemble des hommes (blancs) et pas seulement aux hommes riches.
[...] qui revient : pourquoi, au fond, faudrait-il que ce soit toujours les mêmes qui décident, ces professionnels de la politique, au langage en bois, aux jeux obscurs et au mépris du peuple affiché ? Pourquoi donc le peuple ne pourrait-il pas faire ses affaires lui-même, de temps à autre, au moins pour les choses importantes ? Refleurissent alors, à côté des revendications de justice économique, les propositions de justice politique : contre les privilèges des élu.e.s, pour un contrôle étroit par le peuple, et surtout pour le référendum d’initiative citoyenne (RIC).
Il faut se souvenir que le RIC a été inventé en France, en 1793, par Condorcet, pour qu'un peu de "démocratie directe" co-existe avec le régime "représentatif" que les Révolutionnaires bourgeois voulaient mettre en place pour remplacer la monarchie absolue. Ce RIC n'a jamais été appliqué en France et il faudra attendre 1848 pour que la Confédération Helvétique s'en empare puis, deux décennies plus tard, quelques États des États-Unis d'Amérique (surtout pour l'aspect révocatoire).
Deux conceptions de la politique
Le référendum était l’une des multiples revendications du mouvement, c’est devenu en quelques jours son nouveau symbole, un aboutissement. Le samedi 15 décembre, alors que le mouvement est présenté comme s’essoufflant (il a bien plutôt été étouffé par une répression d’une ampleur inédite[2]), [...]
A tel point que l'ONU et le Conseil de l'Europe (à ne pas confondre avec l'Union Européenne qui compte encore 28 membres, tandis que le Conseil de l'Europe réunit tous les pays d'Europe, Russie comprise) ont tardivement demandé à Emmanuel Macron et au gouvernement français de respecter les droits de l'homme et d'arrêter les violences contre son peuple.
[...] un texte est lu devant la salle du Jeu de paume. Les initiateurs du mouvement demandent que soit inscrit dans la Constitution le référendum d’initiative citoyenne. La machine médiatique alors s’emballe, donnant lieu à un déferlement d’agoraphobie politique, cette peur d’un peuple supposé inconstant, incapable et dangereux, un des multiples avatars de la haine de la démocratie[3]. [...]
L'agoraphobie (entre autres choses) est bien expliquée par l'historien et docteur en sciences politiques Francis Dupuis-Déri dans son récent entretien sur Thinkerview : https://www.youtube.com/watch?v=1wF5FMUtHDM
[...] A croire que tout le monde a oublié que lors de la dernière campagne présidentielle, pas moins de six candidat.e.s sur onze avaient promis la création d’un tel référendum, sans que cela ne fasse scandale. [...]
Preuve supplémentaire que les candidat-e-s n'avaient pas l'intention de le mettre en place; que c'était une n-ième promesse électorale non tenue. Non tenue parce que le mandat impératif (obligation d'appliquer le programme) n'existe pas en France. Non seulement il n'existe pas mais en plus il est anticonstitutionnel (depuis la toute première Constitution française en 1791). De nos jours, l'article 27 de la Constitution de la Vème République dit encore : "Le mandat impératif est nul".
[...] Oui mais voilà : la démocratisation, lorsqu’elle est octroyée par les professionnel.le.s de la politique, est acceptable. Qu’elle devienne revendication populaire, et la voici séditieuse. Pire, ne voit-on pas un député, François Ruffin, attribuer cette proposition, pourtant portée par le chef de son groupe parlementaire, Jean-Luc Mélenchon, à un certain Étienne Chouard, petite célébrité d’Internet aux amitiés sulfureuses, y compris à l’extrême-droite ? [...]
Soit l'auteur de l'article est mal informé, soit il contribue volontairement à la désinformation orchestrée par les médias de masse. Étienne Chouard, parce qu'il est démocrate, discute avec tout le monde y compris avec ceux qui ne sont pas d'accord avec lui. A ce titre, il a débattu une fois (en 2014 je crois) avec Alain Soral, sans être son ami, sans être son clone. Étienne Chouard a maintes fois expliqué que les analyses d'Alain Soral sur "l'empire" étaient pertinentes mais que ses solutions (le recours à un homme fort façon Vladimir Poutine) n'étaient pas du tout celles qu'il préconisait (puisque Chouard lui-même est démocrate, voire anarchiste).
[...] D’une proposition anodine noyée au milieu des programmes, le RIC devient le signe du fascisme en marche.
"Le RIC c'est le fascisme" !? Quelle ironique inversion des mots ! C'est une méthode digne de la novlangue du roman dystopique "1984" écrit en 1948 pour dénoncer le totalitarisme soviétique de l'époque stalinienne mais aussi, de façon plus générale, tous les totalitarismes.
Il ne s’agit pas là d’une simple inconstance des médias et des politicien.ne.s. Si le RIC s’est imposé si aisément et si le conflit autour de lui a pris des proportions si grandes, c’est que cette polémique touche à quelque chose de fondamental. Elle est révélatrice d’un affrontement, présent de manière plus ou moins ouverte depuis le début du mouvement, mais qui a ses racines dans une histoire bien plus longue, entre deux conceptions de la politique. L’une, la politique partisane, est centrée sur la compétition électorale entre professionnel.le.s du champ politique pour accéder au pouvoir. Elle fonctionne par la production de visions du monde antagonistes (des idéologies), objectivées dans des programmes entre lesquels les citoyens sont sommé.e.s de choisir, sous peine de se condamner à l’invisibilité politique[4]. [...]
Les partis politiques sont des groupes de militants (racine latine "miles" pour militaire) qui entrent dans une compétition électorale avec des stratégies très similaires à la guerre. Ces groupes partisans veulent le pouvoir pour leurs chefs mais ils ne veulent pas changer les institutions, c'est-à-dire le système républicain. Ils veulent conquérir un territoire : l'assemblée législative. De gauche, de droite, d'extrême-gauche ou d'extrême droite, en passant par le centre, tous ces partis sont : républicains !
[...] Cette conception partisane de la politique est en apparence hégémonique, ceux qui la refusent se trouvant rejetés aux marges de l’espace public. Elle est le sens commun, la manière naturalisée de penser la politique, de ceux et celles qui vivent de la politique partisane, les politicien.ne.s d’abord, mais aussi les salarié.e.s des partis, les journalistes politiques, les sondeurs, [...]
Les journalistes politiques travaillent pour des sociétés privées et obéissent donc à leur propriétaire. En France, moins de dix personnes possèdent quasiment toute la presse écrite nationale et les chaînes de télévision (exemple TF1 Bouygues, BFMTV Patrick Drahi, Canla + Bolloré ...). Même chose pour les instituts de sondage qui appartiennent à des Bolloré à des Laurence Parisot, etc. En plus, ces journaux et journalistes sont subventionnés (le journal Le Monde reçoit 18 millions d'euros de subvention par an alors qu'il est la propriété de deux milliardaires Xavier Niel et le banquier Pigasse) et les journalistes exemptés d'impôt jusqu'à 7500€. Voilà de quoi transformer des journalistes d'investigation potentiellement lanceurs d'alerte en chiens de garde du système ...
[...] les chercheur.e.s en science politique dont l’auteur de ces lignes, tout un milieu social sinon homogène, en tout cas très peu représentatif, au sens statistique, de la population. Toutes ces personnes savent comment les institutions fonctionnent, qui est de quel parti et où ces partis se situent sur l’axe gauche-droite, bref ils maîtrisent les codes de la politique professionnelle. Et c’est à travers ces codes qu’ils interprètent toute la réalité politique, d’où leur obsession, depuis le début du mouvement, à le situer politiquement, c’est-à-dire à le faire entrer dans leurs schémas d’analyse issus de la politique professionnelle.
Mais le mouvement des Gilets jaunes, en particulier depuis que le RIC est devenu son cheval de bataille, a mis sur le devant de la scène une autre conception de la politique, que l’on peut qualifier de citoyenniste[5]. [...]
Je me méfie beaucoup des nouveaux mots se terminant par -iste ou -isme car c'est un suffixe dépréciatif. Ces néologismes ont une connotation péjorative comme par exemple "conspirationnisme" qui est apparu vers 1963-64 juste après l'assassinat de John F. Kennedy ou "complotisme" qui est apparu vers 1992-93 juste après la signature du Traité de Maastricht et l'effacement de l'alinéa "Complot contre la sûreté de l'Etat" dans la Constitution française. Ici, "citoyennisme" est utilisé pour affirmer que le citoyen, individu du peuple, ne saura pas mieux gérer la politique que les politiciens professionnels. C'est l'argument de l'incompétence. Argument auquel je réponds que les politiciens, les élus n'ont d'autre compétence que celle de se faire élire. Or, pour être élu, il faut :
- dire ce que les électeurs veulent entendre (être le meilleur menteur)
- et être diffusé le plus largement possible, en recevant le soutien financier et médiatique le plus large possible. Cela implique d'être redevable des riches et "généreux" donateurs qui attendront des contreparties en retour. En un mot : être le plus corrompu.
[...] Elle repose sur la revendication d’une déprofessionnalisation de la politique, [..]
Déprofessionnalisation partielle, très minime. Yvan Bachaud lui-même (fondateur de l'association Article 3) estime que 95% des lois continueront à être écrits par les législateurs élus et donc que le RIC en toutes matières n'impacterait que 5%.
[...] au profit d’une participation directe des citoyens, visant à faire régner l’opinion authentique du peuple, sans médiation. [...]
Démocratie directe, sans intermédiaires ("représentants" élus) y compris pour la rédaction de la question; en effet.
[...] Le peuple, ici, est un peuple considéré comme uni, sans divisions partisanes, sans idéologies, une addition d’individus libres dont on va pouvoir recueillir la volonté par un dispositif simple, en leur posant une question, [...]
Cette conception d'homogénéité est, bien entendu, fausse. Le peuple n'a pas une opinion unique sur chacun des sujets. Encore faudrait-il qu'il soit correctement informé ... Une preuve de l'hétérogénéité est que le peuple est séduit par les discours de partis politiques différents sans oublier qu'une part de plus en plus importante du peuple ne se reconnait dans aucun des discours partisans et préfère s'abstenir ou ne même pas s'inscrire sur les listes électorales.
[...] ou en tirant au sort parmi eux un certain nombre d’individus libres qui vont pouvoir délibérer en conscience. [...]
Là, par contre, c'est prouvé, mathématiquement, statistiquement. Sur une grande population, un échantillon d'un peu plus de 1000 personnes s'avère être représentatif de l'ensemble de la population. De nombreuses expériences ont été menées pour montrer que des groupes tirés au sort correctement informés et à qui l'on laisse suffisamment de temps pour délibérer, réfléchir collectivement, prennent d'excellentes décisions (confer les travaux de Jacques Testart ou d'Yves Sintomer). Et puis il existe l'exemple des jurés d'assises, tirés au sort.
[...] Il s’agit d’une politique du consensus, appuyée sur une conception essentiellement morale de la situation actuelle, avec d’un côté les citoyens et leur bon sens, et de l’autre les élites déconnectées, souvent corrompues, surpayées et privilégiées.
Au moins le peuple n'est ni corrompu, ni surpayé, ni privilégié ! Cela aide à réfléchir pour le bien commun !
[...] Et de même que l’on ne peut comprendre les Gilets jaunes avec les seuls outils d’analyse de la politique professionnelle (sont-ils de droite ou de gauche ?), un.e citoyenniste n’accorde guère d’importance aux engagements politiques partisans : qu’importe à Chouard que Soral soit d’extrême droite, puisqu’il se dit contre le système oligarchique et qu’il partage ses vidéos ? [...]
Étienne Chouard a également débattu avec Dominique Strauss-Kahn ce qui ne fait pourtant pas de Chouard un sioniste ou un banquier international.
[...] Qu’importent aux Gilets jaunes que la « quenelle » soit un signe de ralliement antisémite si ça peut signifier l’opposition au système ? [...]
La quenelle n'est pas un signe de ralliement antisémite; c'est ridicule. Cela signifie simplement et grossièrement: "Tu peux te mettre ça où je pense !". C'est la même chose qu'un bras d'honneur ou un doigt d'honneur.
[...] Bien sûr, les militant.e.s d’extrême droite qui participent au mouvement savent très bien ce qu’ils et elles font et politisent leur action dans un sens partisan[6] ; mais ce n’est pas nécessairement le cas des Gilets jaunes qui observent ces actions et peuvent tout simplement ne pas y voir de problème. La conception citoyenniste de la politique, par son refus principiel des schémas de la politique partisane, n’est pas seulement ouverte à la « récupération », terme clé de la politique des partis : elle cherche à être reprise, diffusée, réappropriée, par qui que ce soit. En cela, elle est bien plus ouverte que la politique partisane, elle n’a pas de coût d’entrée, pas de langage spécifique à manier, pas de jeu à saisir – elle est, disons le mot, éminemment démocratique.
Je vais plus loin que l'auteur de l'article. En refusant toute récupération et tout chef/représentant, le mouvement des Gilets Jaunes est anarchiste !
La démocratie contre l’oligarchie
Le mot "oligarchie" est enfin lâché. Notre république, à l'image de la République romaine (qui en est le modèle historique) est une oligarchie. C'est aussi le cas dans toutes les républiques et les monarchies parlementaires/constitutionnelles du monde. Aucun des pays du monde n'est une démocratie.
[...] C’est cette question que le pouvoir n’arrive même pas à entendre : le mouvement des Gilets jaunes puise sa force dans la revendication démocratique. Alors que la politique professionnelle s’appuie sur la monopolisation du pouvoir par un petit groupe, une oligarchie, la politique citoyenniste entend, par le référendum, donner le pouvoir à n’importe qui, c’est-à-dire à tout le monde à égalité. C’est le sens qu’avaient les termes démocratie et aristocratie en Grèce antique, et qu’ils ont gardé jusqu’au XVIIIe siècle : la démocratie, c’est le règne du peuple agissant directement, ou bien par des citoyens tirés au sort ; l’élection, quant à elle, est la procédure aristocratique par excellence, elle donne le pouvoir à une élite[7]. [...]
Aristote l'écrivait dans son ouvrage "Les Politiques" il y a déjà 2300 ans. Montesquieu et Rousseau ne feront que le répéter au XVIIIème siècle. Dans la conception d'Aristote, l'élection permettait de choisir les "meilleurs" (aristos en grec); aujourd'hui, on pourrait parler de "méritocratie" (mais un concours, un examen, est peut-être plus pertinent pour sélectionner "les meilleurs" puisque l'élection ne permet de faire triompher (à grande échelle surtout) que les plus menteurs et les plus corrompus des candidats.
[...] Or le triomphe du gouvernement représentatif et de ses institutions, en premier lieu l’élection, s’est fait sur le refoulement de cette possibilité politique, sur l’oubli de ce que la démocratie pouvait vouloir dire, oubli renforcé par la récupération, pour qualifier le gouvernement représentatif, du vocabulaire de la démocratie. [...]
Le gouvernement "représentatif" est, dès l'origine, antidémocratique. Il suffit de lire le discours de l'abbé Sieyès pour s'en rendre compte.
« Les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie (et la France ne saurait l’être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants. » (Discours du 7 septembre 1789, intitulé précisément : « Dire de l’abbé Sieyes, sur la question du veto royal : à la séance du 7 septembre 1789 » cf. pages 15, 19…)
Ce n'est qu'en 1828, aux États-Unis, avec Andrew Jackson, puis en France en 1848, lorsque le suffrage n'a plus été réservé aux hommes riches mais étendu à tous les hommes, que les candidats démagogues ont utilisé le mot "démocratie" sans connotation péjorative. Mais avec beaucoup d'hypocrisie.
La politique démocratique s’est trouvée ainsi escamotée au profit d’une forme aristocratique de gouvernement, rebaptisée progressivement « démocratie représentative ». [...]
Alors qu'il n'y a pas de démocratie; juste une forme particulière de l'oligarchie : la ploutocratie; c'est-à-dire l'oligarchie des plus riches
[...] C’est pour cela qu’en temps normal, cette conception citoyenniste de la politique, refoulée, est peu audible – mais elle n’a jamais entièrement disparu. L’aspiration démocratique refait régulièrement surface, en 1848, en 1871, en 1936, en 1968, en 2018, chaque fois qu’a lieu un mouvement de contestation générale des gouvernants et de leur jeu, au nom du peuple. [...]
Il faut faire le tri entre toutes ces dates ! En 1848, dans une France monarchique, c'est une aspiration à la république (donc à l'oligarchie) pas à la démocratie. En 1871, lors de la Commune de Paris, c'est une aspiration à la démocratie dans sa forme la plus pure : anarchiste. En 1936, c'est plus de justice sociale, avec le Front Populaire mais sans remise en cause du régime républicain. Même chose en 1968. Enfin, en 2018, cela commence avec des revendications sociales (refus d'une nouvelle taxe) mais cela s'oriente rapidement vers une aspiration démocratie avec l'exigence du RIC en toutes matières.
[...] Et chaque fois, les cadres d’analyse manquent aux professionnel.le.s pour comprendre ce qui a lieu, eux qui vivent par et pour le refoulement de ces aspirations démocratiques. Le mouvement des Gilets jaunes donne donc à voir une possibilité claire : déprofessionnaliser la politique, aller vers un règne des citoyen.ne.s, au nom de l’idéal qui forme désormais le sens commun du plus grand nombre, la démocratie.
Face à ce mouvement citoyenniste, qui ira défendre la vieille politique, celle des partis et des élu.e.s ? A part ceux qui sont payés pour, gageons qu’il y aura peu de monde. C’est que la politique partisane se trouve déjà fortement affaiblie, et ce de longue date. D’abord, le conflit partisan s’est émoussé : vu du dehors du monde des professionnel.le.s, il n’y a plus, depuis longtemps, de différence significative entre la droite et la gauche, qu’il s’agisse de l’origine sociale des candidat.e.s ou de la nature des politiques menées. Partout, avec quelques nuances indéchiffrables pour le plus grand nombre, on trouve la même marchandisation des services publics, les mêmes manœuvres de séduction adressées aux capitalistes pour attirer leurs précieux investissements, le même zèle à limiter les libertés publiques, surarmer les forces de l’ordre, enfermer les pauvres et expulser les étranger.e.s. A cette neutralisation du conflit politique s’ajoute le dépérissement des partis comme moyens d’inclusion de la masse des citoyen.ne.s dans la politique partisane : le nombre d’adhérent.e.s des partis ne cesse de chuter, comme celui des syndicats ou de tous les outils habituels (comme la presse militante) de socialisation à la politique partisane. [...]
Tous ces gens-là ont été achetés par le ploutocrates.
[...] Dans ces conditions, qu’est-ce qui pourrait s’opposer à la démonétisation de cette conception de la politique ? Les tenants mêmes du pouvoir, les professionnel.le.s de la politique, semblent ne plus croire aux possibilités de l’action politique, et répètent avec diverses modulations qu’il n’y a pas d’alternative au néolibéralisme. [...]
Les corrompus affirment cela car ils sont confortablement installés et ne veulent pas changer le système de gouvernance.
[...] Pourquoi alors défendre leur jeu, si de leur propre aveu, il n’a plus d’enjeu ? Cette perte de sens de la politique partisane a permis à un simple conseiller économique, un technicien ignorant des usages de la politique partisane, Emmanuel Macron, de devenir ministre puis président, en répétant à l’envi transcender les clivages et en refusant de s’appuyer sur les partis existants – il préfère en créer un, portant ses initiales, un artifice marketing bouffon qui aurait dû immédiatement lui enlever tout crédit si le système partisan avait gardé un tant soit peu de sens de sa dignité. Comment Emmanuel Macron pourrait-il, lui qui s’enorgueillissait hier d’avoir mis à genoux l’ancien système, le vieux monde, en appeler aujourd’hui à la mobilisation pour sauver ce même système et ses affrontements désormais vides de sens ? D’où son silence, la position impossible dans laquelle il est, et l’usage disproportionné de la répression face à un mouvement qui lui doit tant et qui, par bien des aspects, en est comme le reflet inversé[8].
Emmanuel Macron incarne la corruption, la duplicité, l'avidité à son paroxysme et l'instrument de la répression pour protéger la grande bourgeoisie financière nationale et internationale. Face à lui, effectivement, se trouve le peuple des travailleurs français pauvres. C'est un conflit de classe, au sens typiquement marxiste, mais sans chef pour guider les "Gilets Jaunes", donc anarchiste au sens étymologique. C'est un conflit qui risque de sombrer dans la guerre civile.
Citoyennisme et néolibéralisme
Car c’est bien là qu’est le problème : la politique citoyenniste puise sa force dans le mécontentement justifié vis-à-vis de la politique partisane et dans une longue histoire de l’aspiration démocratique, mais aussi dans la montée en puissance des cadres de pensée du gouvernement des expert.e.s, de tous ceux qui veulent remplacer la politique (politics) par une série de mesures techniques (policies), néolibéraux en tête. [...]
Les oligarques, les grands possédants, les banquiers internationaux ne voient en effet plus d'intérêt au système de l'élection. C'était juste pour "donner l'illusion". Quand ils croient avoir gagné la lutte de classe (confer les propos du milliardaire Warren Buffet), ils ne s'embarrassent plus de faux-semblants. Des technocrates, leurs employés, vont gérer leurs biens par simple nomination (comme les Commissaires de l'Union Européenne) ; et les peuples seront/sont assimilés à des marchandises au même titre que les territoires sous leur contrôle, les sous-sols, la vie (avec la privatisation du vivant), l'eau, etc.
[...] Le mouvement des Gilets jaunes s’oppose aux technocrates, mais il en reprend largement la conception péjorative de la politique partisane et la manière de penser l’action publique. Le citoyennisme est le pendant démocratique du macronisme qui nous disent tous les deux qu’il faut en finir avec les idéologies : l’un comme l’autre réduisent la politique à une suite de problèmes à résoudre, de questions auxquelles répondre. [...]
L'employé de banque/la marionnette Macron et les marionnettistes de l'Union Européenne et au-dessus encore de la BCE et de la FED, considèrent qu'il faut concentrer le pouvoir de décision au sommet de la pyramide sociale. A l'inverse, les Gilets Jaunes (consciemment ou pas) veulent que ce pouvoir de décision revienne à la base, au peuple dans son ensemble, sans chef.
Clairement, c'est : la dictature d'un côté (le Nouvel Ordre Mondial) contre la démocratie directe/l'anarchie.
[...] Certes, il n’est pas équivalent de dire que ces questions doivent être résolues par des experts ou par les citoyens, au moyen de référendums ; le citoyennisme propose bien une démocratisation, mais c’est la démocratisation d’une conception de la politique qu’il partage avec les néolibéraux. Le monde des citoyennistes est un monde homogène, peuplé d’individus qui ressemblent à s’y méprendre à ceux des économistes néoclassiques : on les imagine aller lors des référendums exprimer leurs préférences politiques comme les économistes imaginent les consommateurs aller sur le marché exprimer leurs préférences, sans considération pour les rapports de pouvoir dans lesquels ils sont pris, les antagonismes sociaux qui les façonnent. [...]
Encore l'usage du "citoyennisme" péjoratif. Le peuple n'est pas homogène ! Les décisions éclairées seront prises quand les informations les plus complètes possibles seront accessibles (d'où l'impérative nécessité de médias d'information indépendant de la finance et des multinationales marchandes), et au terme de délibérations relativement longues (plusieurs mois). L'avantage par rapport au système de prise de décision actuel (élus et/ou technocrates), c'est que les décideurs (citoyens) ne seront ni corrompus, ni surpayés, ni privilégiés. Pas de conflits d'intérêt.
[...] Mais comme chez les économistes, cette représentation de la citoyenneté est un mythe – agissant mais trompeur, agissant parce que trompeur. L’image du peuple décidant par référendum ou par le biais de délégué.e.s tiré.e.s au sort vient recouvrir l’aspect irréductiblement conflictuel de la politique, sa possibilité guerrière. [...]
C'est la raison pour laquelle les institutions doivent être progressivement modifiées. Le RIC en toutes matières n'en est que la première étape.
[...] Il n’y a rien ici de nouveau : l’historienne Nicole Loraux a déjà montré comment ce type de discours, dans l’Athènes démocratique, glorifiant l’unanimité du peuple et le caractère réglé de ses institutions, venait masquer l’autre aspect de la politique démocratique, le conflit (statis), faisant toujours courir le risque de la guerre civile et devant par là être oublié, refoulé[9].
Erreur ! L'Athènes démocratique ne visait pas l'unanimité mais la majorité ! C'était un peuple de fantassins, chaque homme libre possédant son propre équipement militaire (léger). Ainsi, quand le rapport de force était établi (par exemple 3500 contre 2500 lors des assemblées de citoyens), il était inutile de se battre : les plus nombreux gagneraient. Alors, la minorité se pliait à la décision de la majorité.
L'unanimité ou le consensus n'est visé que dans les sociétés ou les communautés anarchistes quand il n'y a pas de pouvoir coercitif pour que la minorité obéisse à la majorité. Cela va au-delà de la démocratie athénienne, selon la classification des régimes politiques par Francis Dupuis-Déri.
[...] Loin d’être une anomalie de la démocratie, le conflit en était une possibilité toujours présente, et s’il apparaissait, il était obligatoire pour les citoyens de choisir un parti – l’abstention, signe de passivité et d’indifférence, valait retrait de ses droits politiques. [...]
Il n'y avait pas de partis politiques à Athènes ! Les partis politiques n'ont d'utilité que dans le cadre des élections. Or, à Athènes, on votait pour des lois; on n'élisait pas des chefs/des maîtres !
[...] En voulant se débarrasser des partis, au sens des organisations en compétition pour le pouvoir, le citoyennisme met aussi à mal la possibilité d’expression des divisions au sein de la cité. Or l’antagonisme politique, le conflit, est aussi nécessaire à la démocratie, même authentique et déprofessionnalisée, que ne l’est l’inclusion directe de tou.te.s les citoyen.ne.s. [...]
L'antagonisme, les oppositions, les divisions existeront toujours mais sur le plan des arguments, des débats d'experts. Puis les citoyens trancheront, thème par thème, loi par loi.
[...] Il s’agit alors de sauver ce qui, dans la politique partisane, est nécessaire à la démocratie, et que la politique citoyenniste oublie : son organisation durable de la division du corps politique. [...]
Faux ! La politique partisane, les partis politiques n'ont d'autre fonction que de faire élire leur chef ! S'il n'y a plus d'élection, nul besoin de partis politiques ! Les partis politiques sont complètement liés au système représentatif, au système parlementaire avec des "maîtres" élus (c'est-à-dire ayant un mandat "représentatif" et non un mandat "impératif" qui feraient d'eux des porte-parole sans pouvoir de décision).
[...] Cette division est nécessaire car sans elle, les antagonismes qui traversent la société ne trouvent pas d’expression, de mise en visibilité. [...]
Faux ! Sur chaque sujet, il y aura des antagonismes qui seront portés par les experts aux avis contradictoires. Comme des jurés d'assises qui écoutent avocat et procureur, les citoyens construiront leur opinion en écoutant ces experts puis en débattant entre eux.
[...] Il est significatif que le mouvement des Gilets jaunes, dans ses revendications, ne donne rien à voir de ces antagonismes, qu’il s’agisse des rapports de genre, de race, ou même de classe, la question de la production des inégalités et du rapport salarial étant absente, au profit de revendications consensuelles d’économie morale[10]. [...]
Les sujets clivants sont évités par les "Gilets Jaunes" puisque l'exigence première est de réformer les institutions en mettant un outil de démocratie directe dans une Constitution qui exclue jusque là toute forme de démocratie.
[...] Il met en lumière, de la manière la plus crue, l’inanité du système partisan, et dénonce avec raison la dépossession politique que le gouvernement représentatif institue. Mais la voie qu’ouvrent les citoyennistes qui se sont engouffrés dans la brèche, Chouard en tête, en se concentrant sur le RIC, est profondément ambiguë. Certes, ils proposent une démocratisation reposant sur la déprofessionnalisation de la politique, vieille aspiration populaire qui n’a cessé d’animer les résistances au gouvernement représentatif et à la monopolisation du pouvoir par une caste. (En ce sens, on peut reconnaître et appuyer les innovations que le mouvement propose[11]. [...]
Cette revendication ne repose pas que sur Etienne Chouard et n'a rien d'ambigu. Elle remonte à Condorcet et à la Constitution qu'il a co-écrite (jamais appliquée) de 1793 !
[...] Mais cette démocratisation, telle qu’elle est ébauchée dans la pratique et les revendications du mouvement des Gilets jaunes, est une démocratisation du consensus : elle met en jeu le peuple contre les gouvernants, au risque de l’oubli complet d’une autre figure démocratique, celle du peuple contre lui-même. Et au risque de faire le jeu du néolibéralisme, dont les citoyennistes partagent le refus des idéologies et de la politique partisane. [...]
Le néo-libéralisme ne refuse pas toutes les idéologies puisqu'il est lui-même une idéologie ! Il refuse les autres idéologies et les partis politiques qui ne portent pas son idéologie néo-libérale. La société néo-libérale sera (est ? avec LREM) une société à parti unique. Les similitudes entre l'Union Européenne néo-libérale et l'Union Soviétique, avec le Parti Communiste comme seule idéologie autorisée, sont de plus en plus criantes.
[...] Face à cette opposition entre une conception partisane professionnalisée et une conception citoyenniste consensuelle de la politique, une autre voie existe, même si les moyens de l’arpenter restent incertains. Il s’agit de chercher à déprofessionnaliser la politique sans en éliminer le caractère conflictuel, c’est-à-dire de démocratiser le dissensus. C’est ce qu’ont essayé de faire, en 1848, les défenseurs de la République démocratique et sociale : faire entrer les masses en politique, non pour les faire voter sur telle ou telle mesure, mais pour réaliser une politique de classe, le socialisme, dans l’intérêt des prolétaires et contre la bourgeoisie[12].
En 1848, le suffrage est passé de censitaire (réservé aux hommes riches) à masculin (ouvert aux hommes pauvres mais pas encore aux femmes). Ce n'était pas du tout une réforme des institutions républicaines; juste une illusion. Et en pus, le premier président élu, Louis-Napoléon Bonaparte, s'est peu après auto-proclamé empereur Napoléon III (autocrate, dictateur militaire).
[...] Il s’agissait alors de donner une visibilité aux clivages sociaux, et non de les dissimuler derrière tel dispositif participatif, aussi démocratique fût-il. Aujourd’hui, loin d’avoir disparu, les antagonismes sociaux se sont pluralisés, ce qui constitue à la fois une ressource et un défi pour une politique émancipatrice. Les vieilles solutions socialistes, centrées sur la question de classe, participaient déjà en 1848 à l’invisibilisation de la question des femmes et de celle de la race, alors même que les voix existaient pour les mettre sur le devant de la scène[13]. [...]
On sent derrière ces propos, la volonté de diviser le peuple en catégories et sous-catégories. Diviser pour mieux régner.
[...] La nouvelle politique émancipatrice qui reste à inventer devrait s’appuyer sur la visibilisation de l’ensemble des rapports de domination, sans hiérarchisation et en restant ouvert et réactif aux nouveaux antagonismes qui ne manqueront de se faire jour. En l’état, le mouvement des Gilets jaunes, ancré dans une conception citoyenniste de la politique, ne semble pas prendre la voie d’une visibilisation de ces antagonismes, tout en ouvrant de nouvelles possibilités démocratiques.
"Les genres", "les races" et autres critères sous-entendus ici par l'auteur sont des instruments de division de la population en sous-catégories soit-disant homogènes. La seule réelle distinction qui mériterait d'être prise en compte dans une société capitaliste n'est pourtant que :
- qui possède le capital et en tire des dividendes
- et qui doit travailler pour percevoir un salaire.
Le renouvellement d’une politique de l’émancipation devra alors penser à la fois avec et contre ce mouvement, pour la démocratie contre l’oligarchie, mais aussi pour l’expression du conflit contre le consensus – qu’il soit technocratique ou citoyen.
Les "Gilets Jaunes" ne militent pas pour le consensus; c'est de la caricature ! Ils militent pour un outil démocratique permettant aux citoyens (pauvres et riches) de décider directement des lois qui vont structurer leur vie quotidienne. Les conflits (pacifiques, rhétoriques) viendront après l'obtention de ce début de démocratie. Il n'y aura pas de consensus; il y aura des votes majoritaires.
Samuel Hayat
Notes de renvoi
[1] Ce texte fait suite à un précédent post de blog. Il doit encore plus que ce dernier à mes échanges constants avec l’historienne Célia Keren que je remercie vivement.
[2] Voir entre autres Fabien Jobard dans le Monde (https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article47286) et Mathieu Rigouste dans Les Inrockuptibles (https://www.lesinrocks.com/2018/12/12/actualite/violences-policieres-il-y-derriere-chaque-blessure-une-industrie-qui-tire-des-profits-111151464/)
[3] Jacques Rancière, La haine de la démocratie, Paris, la Fabrique, 2005 ; Francis Dupuis-Déri, La peur du peuple : Agoraphobie et agoraphilie politiques, Montréal, Qc, Lux, 2016
[4] Pierre Bourdieu, « La représentation politique – éléments pour une théorie du champ politique », Actes de la recherche en sciences sociales, n°36‑37, 1981, p. 3‑24
[5] On reprend ici le terme de citoyennisme à la critique libertaire de la croyance dans les possibilités émancipatrices des procédures démocratiques fondées sur la figure abstraite du citoyen. Voir par exemple « L’impasse citoyenniste. Contribution à une critique du citoyennisme » (2001) et les analyses d’Alternative libertaire (http://www.alternativelibertaire.org/?Reformisme-De-quoi-le-citoyennisme)
[6] lSur l’extrême droite dans le mouvement des Gilets jaunes, voir les textes de La Horde, notamment http://lahorde.samizdat.net/2018/12/19/un-point-de-vue-antifasciste-sur-les-gilets-jaunes/
[7] Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif, Paris, Flammarion, 1996
[8] Ce point a déjà été souligné par l’historienne Danielle Tartakowsky : https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0600272685469-danielle-tartakowsky-les-gilets-jaunes-un-phenomene-miroir-du-macronisme-2227416.php.
[9] Nicole Loraux, La cité divisée : l’oubli dans la mémoire d’Athènes, Paris, Payot, 1997
[10] Voir ce qu’en dit Stefano Palombarini, qui analyse les Gilets jaunes comme un bloc anti-bourgeois : https://blogs.mediapart.fr/stefano-palombarini/blog/211218/les-gilets-jaunes-le-neoliberalisme-et-la-gauche
[11] Voir par exemple la tribune collective du GIS démocratie et participation, ou les prises de position d’Yves Sintomer et Julien Talpin. Un article de Fabien Escalona sur Mediapart (réservé aux abonné.e.s) propose un point de vue nuancé sur le RIC comme innovation démocratique https://www.mediapart.fr/journal/france/211218/le-referendum-d-initiative-citoyenne-un-outil-utile-mais-partiel-pour-enrichir-la-democratie?onglet=full
[12] Samuel Hayat, Quand la République était révolutionnaire. Citoyenneté et représentation en 1848, Paris, Seuil, 2014
[13] Michèle Riot-Sarcey, La démocratie à l’épreuve des femmes : trois figures critiques du pouvoir, 1830-1848, Paris, A. Michel, 1994 ; Silyane Larcher, L’autre citoyen : l’idéal républicain et les Antilles après l’esclavage, Paris, Armand Colin, 2014
Source de l'article (sans les commentaires personnels) : https://samuelhayat.wordpress.com/
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