En 1928, Sébastien Faure, dans La Synthèse anarchiste, définit quatre grands courants qui cohabitent tout au long de l'histoire du mouvement :
- l'anarchisme individualiste qui insiste sur l'autonomie individuelle contre toute autorité ;
- le socialisme libertaire qui propose une gestion collective égalitaire de la société ;
- le communisme libertaire, qui de l'aphorisme « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins » créé par Louis Blanc, veut économiquement partir du besoin des individus, pour ensuite produire le nécessaire pour y répondre ;
- l'anarcho-syndicalisme, qui propose une méthode, le syndicalisme, comme moyen de lutte et d'organisation de la société.
En 2007, l'historien Gaetano Manfredonia propose une relecture de ces courants sur base de trois modèles.
- Le premier, « insurrectionnel », englobe autant les mouvements organisés que les individualistes qui veulent détruire le système autoritaire avant de construire, qu’ils soient bakouniniens, stirnerien ou partisans de la propagande par le fait.
- Le second, « syndicaliste », vise à faire du syndicat et de la classe ouvrière, les principaux artisans tant du renversement de la société actuelle, que les créateurs de la société future. Son expression la plus aboutie est sans doute la Confédération nationale du travail pendant la révolution sociale espagnole de 1936.
- Le troisième est « éducationniste réalisateur » dans le sens où les anarchistes privilégient la préparation de tout changement radical par une éducation libertaire, une culture formatrice, des essais de vie communautaires, la pratique de l'autogestion et de l'égalité des sexes, etc. Ce modèle est proche du gradualisme d'Errico Malatesta et renoue avec « l’évolutionnisme » d'Élisée Reclus.
En 2017, Francis Dupuis-Déri cite six courants dans son livre "L'anarchie expliquée à mon père" (p.62 et suivantes) :
- l'anarcho-communisme (synonyme de "communisme libertaire")
- l'anarcho-syndicalisme
- l'insurrectionnalisme
- l'anarchisme individuel (qui est décrit dans Wikipédia comme "la libération de l’individu des
contraintes psychologiques, y compris dans l’art et dans la sexualité")
- l'anarcha-féminisme
- et l'anarcho-écologisme décliné en trois tendances (le "primitivisme" de John Zerzan selon qui on était mieux au paléolithique, "l'écologie profonde" antispéciste avec des groupes militants tels que Earth First ! et Earth Liberation Front (ELF), que les autorités aux États-Unis identifient comme des «écoterroristes», et le "municipalisme libertaire" de Murray Bookchin).
En synthèse
Personnellement, je comprends que, mis à part peut-être l'anarchisme individuel, il y a :
- un but commun : l'anarcho-communisme (que je ne distingue pas vraiment du "socialisme libertaire" ni du "municipalisme libertaire")
- et différents moyens d'y parvenir ("insurrectionnel", "anarcho-syndicalisme" et "éducationnisme") en s'attaquant globalement à toutes les formes de domination globalement ou en les ciblant plus spécifiquement (par exemple le "patriarcat" contre lequel lutte "l'anarcha-féminisme" ou les "contraintes psychologiques" dont veulent se libérer les "anarchistes individuels").
Définitions de l'anarcho-communisme
Par Francis Dupuis-Déri (p.63 de "L'anarchie expliquée à mon père") :
L’anarcho-communisme considère qu’il faut réorganiser la
société à partir des communautés locales, soit les quartiers, les villages ou
la commune, d’où l’idée de communisme. Des assemblées locales
autonomes doivent assurer l’autogestion. Le «peuple» est l’agent du
changement, dans la mesure où il s’organise pour débattre, discuter et
prendre des décisions collectivement, lors de rencontres ou d’assemblées
en face à face. Il suffit qu’il s’organise directement dans son lieu de vie
pour que survienne la révolution, et donc l’anarchie. Cette transformation
peut être violente, s’il y a une lutte armée pour réaliser l’expropriation des
propriétaires terriens, par exemple, ou la saisie des immeubles. Une fois la
révolution accomplie, les quartiers ou les communes autogérés peuvent
coordonner leurs efforts en se fédérant, mais tout en gardant leur
autonomie, c’est-à-dire que la fédération ne peut imposer de décisions aux
communautés locales. Plusieurs anarchistes trouvent ainsi très inspirante
la révolte des zapatistes au Mexique, en 1994, puisque ce mouvement a
libéré des communes paysannes, instaurant la gestion participative par des
assemblées populaires.
Par l'encyclopédique en ligne Wikipédia
Le communisme libertaire ou anarcho-communisme est une doctrine politique au croisement de deux autres :
- le communisme, entendu dans son sens le plus général, qui de l'aphorisme « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins » créé par Louis Blanc, veut économiquement partir du besoin des individus, pour ensuite produire le nécessaire pour y répondre ;
- l'anarchisme, qui a pour projet la liberté politique maximale avec le refus de toute distinction entre gouvernants et gouvernés (autogestion et démocratie directe).
Le communisme libertaire est proche du socialisme libertaire et de l'anarcho-syndicalisme.
L'association des termes « communisme libertaire » est revendiqué, dès 1876, par la Fédération italienne de l’Association internationale des travailleurs. Errico Malatesta et Carlo Cafiero en sont les figures les plus notoires. Pour ce dernier, « on ne peut pas être anarchiste sans être communiste. [...] L’anarchie et le communisme sont les deux termes nécessaires de la révolution ». Et de conclure, « Nous voulons la liberté, c’est-à-dire l’anarchie, et l’égalité, c’est-à-dire le communisme ».
Le projet des communistes libertaires est l'établissement d'un nouvel ordre social juste et émancipateur (et non pas le « désordre » social), grâce à l'abolition conjointe du capitalisme et de l’État. Les communistes libertaires proposent de substituer à la propriété privée la « possession individuelle », ne garantissant aucun droit concernant l'accumulation des biens « non utilisés »
Définition complétée par :
- celle du socialisme libertaire
Le socialisme libertaire est un courant de l'anarchisme qui vise l'instauration d'une société égalitaire et coopérative, par l'abolition de l'État et de la propriété privée des moyens de production et des institutions financières, et fondée au contraire sur l'autogestion politique et économique, la solidarité et la responsabilité individuelle. La mise en place de l'autogestion économique repose alors essentiellement sur le remplacement de l'ensemble des institutions financières par des mutuelles et sur celui des autres entreprises non individuelles par des coopératives. L'autogestion politique s'appuie quant à elle principalement sur la démocratie directe, le remplacement du mandat représentatif par le mandat impératif et, quand c'est nécessaire, la nomination d'une assemblée par tirage au sort d'un échantillon large et représentatif plutôt que par l'élection. L'organisation administrative repose sur un fédéralisme décentralisé dont la structure de base est la commune, étendue au bassin de vie d'une population.
- et celle du municipalisme libertaire
Le municipalisme libertaire désigne la mise en œuvre locale de l'écologie sociale élaborée par le théoricien communiste libertaire et écologiste politique américain Murray Bookchin. Cette dimension écologiste le distingue du communalisme traditionnel tel qu'il fut proposé par les communes insurrectionnelles en France en 1870-1871 qui est davantage restreint au changement de système politique (remplacement de la démocratie représentative par la démocratie directe) sans promotion d'une autre forme d'idéologie.
Ces termes sont utilisés pour décrire un système politique dans lequel des institutions libertaires, composées d'assemblées de citoyens, dans un esprit de démocratie directe, remplaceraient l'État-nation par une confédération de municipalités ou communes libres et autogérées.
Le projet repose sur l'idée que la commune constitue une cellule de base capable d'initier une transformation sociale radicale par propagation.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire