« Le système fédératif est l’opposé de la hiérarchie ou
centralisation administrative et gouvernementale par laquelle se
distinguent, ex aequo, les démocraties impériales, les monarchies
constitutionnelles et les républiques unitaires.
Sa loi fondamentale, caractéristique, est celle-ci : Dans la
fédération, les attributs de l’autorité centrale se spécialisent et se
restreignent, diminuent de nombre, d’immédiateté, et, si j’ose ainsi
dire, d’intensité, à mesure que la Confédération se développe par
l’accession de nouveaux Etats.
Dans les gouvernements centralisés, au contraire, les attributs du
pouvoir suprême se multiplient, s’étendent et s’immédiatisent, attirent
dans la compétence du prince les affaires des provinces, communes,
corporations et particuliers, en raison directe de la superficie
territoriale et du chiffre de la population. De là cet écrasement sous
lequel disparaît toute liberté, non seulement communale et provinciale,
mais même individuelle et nationale.
Une conséquence de ce fait c’est que, le système unitaire étant
l’inverse du système fédératif, une confédération entre grandes
monarchies, à plus forte raison entre démocraties impériales, est chose
impossible. Des Etats comme la France, l’Autriche, l’Angleterre, la
Russie, la Prusse, peuvent faire entre eux des traités d’alliance ou de
commerce ; il répugne qu’ils se fédéralisent, d’abord, parce que leur
principe y est contraire, qu’il les mettrait en opposition avec le pacte
fédéral ; qu’en conséquence il leur faudrait abandonner quelque chose
de leur souveraineté, et reconnaître au-dessus d’eux, au moins pour
certains cas, un arbitre. Leur nature est de commander, non de transiger
ni d’obéir. »
(P. J. PROUDHON, Du principe fédératif, 1863, chapitre VII)
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Pierre-Joseph Proudhon préconise l'association et adopte le terme de mutualisme pour son genre d’anarchisme, qui implique le contrôle des moyens de production par les travailleurs. Dans sa vision, des artisans indépendants, des paysans, et des coopératives échangeraient leurs produits sur un marché. Pour Proudhon, les usines et autres larges lieux de travail seraient dirigés par des syndicats fonctionnant par démocratie directe. L'État serait aboli ; à la place la société devrait être organisée par une fédération de « communes libres ». Proudhon se fait théoricien du fédéralisme.
Le fédéralisme, du latin fœdus, « renvoie à l'ensemble des caractéristiques et des pratiques institutionnelles des systèmes politiques fédéraux ainsi qu’aux théories politiques qui ont été construites pour en rendre compte ou pour les promouvoir ».
Le fédéralisme est un système d’organisation, d’administration et de gouvernement dans lequel l’État est organisé en fédération et partage avec les États fédérés les diverses compétences constitutionnelles : législatives, juridictionnelles et administratives (ex. à des degrés différents : Comores, Suisse, Allemagne, États-Unis, États fédérés de Micronésie, Émirats arabes unis, Brésil, Argentine, Nigeria).
Lorsqu'il concerne une forme d'organisation de l'État, il s'oppose à l'État unitaire. La séparation des pouvoirs se fait alors entre États fédérés et État fédéral, selon les modalités organisées par une constitution fédérale.
Une fédération peut naître de la réunion de plusieurs États au sein d'un même État fédéral ou par la scission d'un État unitaire en plusieurs entités fédérées. La dualité étatique ainsi créée renvoie à une double loyauté des citoyens : l'une à l'égard de la Fédération, l'autre à l'égard de l'État membre comme l'expliquèrent les intellectuels américains à l'origine de la conception moderne du fédéralisme tel Alexander Hamilton, dont la tâche consista justement à dépasser le dogme de l'unité absolue de l'État qui demeure valable pour les États unitaires.
Fédération et confédération
La distinction entre les deux notions est parfois délicate par exemple le cas de la Suisse qui a conservé le nom de "Confédération suisse" alors même que c'est un État fédéral.
D'un point de vue juridique,
- une confédération d'États répond à une logique horizontale. Les États confédérés, tous égaux, vont s'associer pour des raisons précises par le biais d'un traité international. Ces États unitaires conservent toute leur souveraineté ;
- un État fédéral répond à une logique verticale, qui peut être :
* descendante, c'est-à-dire qu'un État unitaire va se scinder en plusieurs entités fédérées (fédéralisme par désagrégation);
* ascendante, c'est-à-dire que des États unitaires vont créer, par le biais d'une constitution, un État qui leur est supérieur, l'État fédéral (fédéralisme par agrégation).
NB : Le pacte défensif permanent entre les cantons de Uri, Schwyz et Unterwald, conclu en 1291 est à l'origine de la Confédération suisse La Suisse adopte une constitution fédérale en 1848.
Le fédéralisme a été soutenu par : Althusius, Montesquieu, Kant, Tocqueville, Proudhon, Maurras, Joseph Paul-Boncour. Il était également une des bases du projet de société Girondin pendant la révolution française.
On distingue deux grandes conceptions du fédéralisme :
- Le fédéralisme institutionnel, dit "hamiltonien", se centre sur l'organisation et le fonctionnement des institutions fédérales, sans s'immiscer dans des idéologies et programmes politiques lesquels relèvent du libre choix des citoyens par le biais de ces institutions.
- Le fédéralisme intégral est une conception du fédéralisme qui dépasse la seule théorie de l'État fédéral mais qui en fait une philosophie politique à part entière, dérivée des écrits de Pierre-Joseph Proudhon, de la pratique des organisations issues des courants du syndicalisme révolutionnaire et de l'anarcho-syndicalisme, et aussi du personnalisme et du christianisme social.
Emmanuel Kant pose en 1795 dans Vers la paix perpétuelle les bases d'une philosophie du fédéralisme à l'époque même où se constitue en Amérique le premier État fédéral. La paix ne peut selon lui exister véritablement que si une organisation de type fédéral encadre les États, les privant ainsi du pouvoir de déclencher des guerres.
Pierre-Joseph Proudhon étend l'idée de fédéralisme aux domaines économique et social. Il prône l'appropriation des moyens de production par les individus qui les utilisent et non pas leur collectivisation par l'État. Il reconnait en effet la propriété comme un frein à la toute-puissance étatique et donc une force garantissant les libertés pour autant que l'on ne puisse s'attribuer le fruit du travail d'autrui. Le principe fédératif s'oppose donc essentiellement pour Proudhon au centralisme et comme un moyen de faire prévaloir le droit sur la force.
Friedrich Hayek, dans La route de la servitude, institue le fédéralisme comme « seule forme d'association... permettant de créer un ordre international sans mettre obstacle [au] légitime désir d'indépendance ».
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