Voici ce que dit la loi :
La loi française du 24 janvier 1984 précise que
les établissements de crédit sont des personnes qui effectuent à titre
de profession habituelle des opérations de banque. Celles-ci
comprennent la réception de fonds du public, les opérations de crédit,
ainsi que la mise à disposition de la clientèle ou la gestion de moyens
de paiement. Sont considérés comme fonds reçus du public les fonds
qu’une personne recueille d’un tiers, notamment sous forme de dépôts,
avec le droit d’en disposer pour son propre compte, mais à charge pour
elle de les restituer. Constitue une opération de crédit pour
l’application de la présente loi tout acte par lequel une personne
agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la
disposition d’une autre personne….
Il est stupéfiant de constater que dans cette définition, mêlant
indistinctement les établissements de crédit, les autorités éludent
totalement le principe de la création monétaire qui est à la base du
métier de prêteur d'argent des banques de dépôts et ne font aucune
distinction entre les banques qui créent la monnaie et les autres
établissements qui se bornent à la faire circuler. Pour créer la monnaie, les banques doivent remplir les conditions suivantes :
1 - elles doivent être banques de dépôts, puisqu'elles émettent de la monnaie scripturale en créditant le compte de dépôt à vue (DAV) de leur client, c'est pourquoi l'on dit que "les crédits font les dépôts",Les établissements financiers ne peuvent que faire circuler la monnaie, car ils sont sous la dépendance d'un compte de banque approvisionné pour effectuer leurs opérations : d'emprunts pour se fournir en monnaie qu’elles destinent à des prêts d'argent à la clientèle. Ainsi, peut-on dire que "les dépôts font les crédits" chez les établissements financiers. Ils ne remplissent en principe aucune des conditions exposées ci-dessus pour créer la monnaie.
2 - elles mettent des moyens de paiement à la disposition de leurs clients,
3 - elles sont domiciliataires, c'est-à-dire que leurs clients peuvent tirer sur leurs caisses (leur domicile),
4 - tout comme elles peuvent tirer sur elles-mêmes, ou sur leurs caisses ce qui revient au même [1],
5 - elles ont accès à la compensation du fait qu'elles sont domiciliataires des transactions de leurs clients, et par abus de position elles se servent de la compensation pour régler leurs opérations pour propre compte, ce qui revient à tirer sur elles-mêmes,
6 - elles ne sont donc pas dans l'obligation d'utiliser leur compte ouvert à la Banque Centrale, et ne se privent pas de cette liberté chaque fois que cela leur est possible, c'est-à-dire le plus souvent.
Il existe toutefois une exception, existait devrait-on dire, ce sont les comptes chèques postaux (CCP), avant l'avènement de la Banque Postale, laquelle bénéficie à présent du statut de banque.
Voici comment fonctionnaient les CCP, étant précisé que ceux-ci répondaient aux conditions 1) 2) et 3) ci-dessus, sauf qu'ils n'ont jamais prêté d'argent, vous allez voir pourquoi. L'Etat français a toujours disposé des fonds drainés par les CCP, principalement la monnaie scripturale, mais aussi les espèces dans la mesure où celles-ci étaient en excédent.
Tous les chèques et virements tirés sur une banque quelconque à l'ordre des CCP, étaient endossés à l'ordre du Trésor Public, crédités à son compte à la Banque de France, puis traités en compensation. Inversement, tous les chèques et virements tirés sur les CCP à l'ordre d'une banque quelconque, étaient traités en compensation puis débités au compte du Trésor à la Banque de France.
Si vous faites le bilan des opérations, vous vous apercevrez que le Trésor a disposé ainsi de tous les dépôts (d'épargne, principalement) de la clientèle des CCP. Si cette épargne est liquide, à la différence de celle qui est dans les parkings monétaires bancaires, c'est qu'elle a toujours été sur un compte extérieur aux CCP, celui du Trésor à la Banque de France qui s'en est servi tout naturellement. C'était le but de l'opération !
A fin 1996, le solde des comptes réciproques, d’une part au passif du bilan du Trésor Public au compte « Dépôts des services financiers de La Poste » et d’autre part à l’actif du bilan de La Poste au compte « Dépôts au Trésor », s’élevait à 176,8 milliards de francs. En 7 ans (89/96) il s’est accru de 13%. (source Banque de France - Bulletin Hors Série 1996). C'est, semble-t-il, la dernière publication. Il est fort probable qu'aujourd'hui, l'Etat (le Trésor) ait remboursé la dette qu'il avait envers La Poste.
Maintenant voyons pourquoi la monnaie qui se trouve en compte de dépôts à vue (disponibilités) ou à terme (épargne) en banque ne peut pas circuler, sauf sur ordre des titulaires de ces comptes.
En créditant le compte de son client d'un prêt qu'elle lui a consenti (1.000 unités monétaires, par exemple) la banque a constaté une créance à son actif. Vous remarquerez qu'elle ne peut pas disposer de la monnaie qu'elle vient de créer, car la contrepartie : la créance inscrite à l'actif de la banque, n'est pas de la monnaie. Cette somme ne peut quitter la banque que sur ordre de son client. Si celui-ci émet un chèque à l'ordre d'un fournisseur, il en résultera nécessairement (après compensation) une dette de cette banque envers une banque concurrente de même montant, dans l'hypothèse où le fournisseur n'a pas un compte à la même banque. Cette opération n'est jamais isolée, bien entendu, elle est comprise dans un ensemble de transactions, mais elle est "re-traçable". Notre banque devra à une consœur ce qu'elle devait à son client. La monnaie ne perd jamais sa contrepartie, jusqu'au remboursement partiel ou total de la créance détenue par la banque sur son client.
Dans tout le système bancaire, les disponibilités en comptes de DAV de tous les clients appartiennent à ces clients, pas aux banques. Puisque ces disponibilités ont pour contrepartie des créances et autres actifs (à l'origine de l'émission monétaire). Profitant de la complexité du système, le pouvoir monétaire nous trompe quand il prétend le contraire.
Enfin, quand les clients de la banque procèdent à des virements de leurs comptes de DAV à leurs comptes d'épargne, les créances et autres actifs de la banque ne sont plus la contrepartie des seuls DAV mais celle des DAV + les dépôts d'épargne à terme (DAT). C'est pourquoi, l'épargne bancaire est une épargne morte, placée dans des parkings monétaires sans utilité pour l'économie, contrairement à ce que l'on croit.
Si les banques ne peuvent pas disposer des fonds de leurs clients, c'est parce qu'ils n'ont pas de contrepartie en monnaie, dans une banque extérieure comme dans l'exemple des CCP. Si la Banque centrale imposait aux banques de faire passer chez elle toutes leurs transactions (encaissements et paiements), il en serait tout autrement. Mais ce n'est pas le cas.
C'est toute la différence entre le sujet et l'objet, pourrait-on dire : la banque tire sur elle-même, tandis que l'établissement financier tire sur sa banque.
En fait, les banques ont réussi à échapper au contrôle de la Banque centrale (et celle-ci ne va pas le clamer sur les toits !) quand elles émettent de la monnaie, et aussi profitant des lacunes de la réglementation, quand elles utilisent le système de la compensation à leurs fins propres (transactions pour propre compte), ce qui est inadmissible. L'affaire des subprimes est là pour nous le rappeler. Les seules limites à l'émission monétaire par les banques sont : la demande de monnaie et le ratio de solvabilité.
[1] Au milieu des années 80, en
France, les trésoriers de banque reçurent des instructions de leur
direction de ne plus tirer de chèques sur la Banque de France, mais sur
elles-mêmes (ce que confirme JM Gélain dans son ouvrage "La
comptabilité bancaire" page 173).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire