Histoire de la Réunion et « grands hommes »
Pourquoi sont-ils si rarement cités en référence ? Dans le désordre, ce qui pourrait être le panthéon des « grands hommes » de la Réunion, extrait du Journal de Paul Hoarau (novembre 2020). Homme de média et de politique, ancien conseiller régional et fondateur du Comité du Progrès, Paul Hoarau est fortement impliqué dans la vie civile et la société réunionnaise depuis de longues années. Il est l’un des porteurs des « Fondamentaux pour La Réunion et de la Conférence des mille ».
Paul Hoarau : « Dans le désordre, au nombre des morts : Célimène, Eugène Dayot, François de Mahy, Nicole Robinet de la Serve, Joseph Hubert-Delisle, Edmond Albius, Timagène Ouat, Leconte de Lisle, Auguste Lacaussade, Frédéric Levavasseur, Madame et Charles Desbassyns, Henri Vavasseur, Roland Garros, Jules et Paul Hermann, Joseph Bédier, Luc Dupont et sa femme, Auguste de Villèle, Anatole et Emile Hugot, René et Roger Payet, Maxime Rivière, Joseph Mourouvin, Armand et Maxime Barau, Raymond Lawson, Issop Ravate, Frédéric Tsang-King-Tsang, Fred Isautier, Marcel Vauthier, Boris Gamaleya, Michel Latchoumanin, Pierre Lagourgue, Raymond Barre, Georges Fourcade, Maxime Laope, Luc Donat, Maximin Boyer, Sudel Fuma. Ils et elles ont exercé, dans des activités différentes, des influences certaines sur notre histoire à nous. Ils ont fait, ils ont chanté, ils ont écrit.
Et je ne cite que les natifs. Je ne parle pas de ces grands, nés ailleurs, dont certains sont devenus Réunionnais : le Père Ognard, Robert Chaudenson, Jean de Cambiaire, Jean Defos du Rau, etc. je ne parle pas des grands noms encore inconnus du monde malbar, zarab, kaf. Je ne parle pas de cette alchimie des habitants de l’île, colons européens, kafs esclaves, engagés et immigrés d’Asie qui ont métissé les peuples, forgé la langue créole, réalisé la manière réunionnaise. Et je suis loin d’avoir nommé tout le monde.
Ce qui aurait dû être le panthéon des grands noms d’un pays vivant (qu’on les aime ou non et de quelque bord qu’ils soient), est devenu la réserve d’oubli et de poussière d’un pays devenu musée. De temps en temps, les officiels de l’agora, des médias, des groupes de fidèles zélés, sortent de la réserve muséale, les témoignages de la mémoire de l’un ou de l’autre, pour des manifestions plus ou moins populaires, sans lendemain. De grands hommes ramenés au pays dorment solitaires et abandonnés dans leur tombes à Saint-Paul et à Hell-Bourg ! Dans quel état de délabrement se trouve la tombe de Lacaussade au cimetière de Hell-Bourg !…
- La tombe de l’illustre homme de lettres à Salazie est régulièrement recouverte par les mauvaises herbes
En tout état de cause, personne parmi les hommes et les femmes que j’ai cités ci-dessus n’est une référence ordinaire de nos penseurs et de nos acteurs actuels. En parcourant les Facebook que je reçois, les Américains, les Européens, le Asiatiques, des Africains sont largement cités, ce qui montre une certaine culture mondialiste, mais quasiment jamais nos compatriotes n’apparaissent comme références. Que penser de notre culture réunionnaise ? Comme pour bien d’autres besoins, notre nourriture intellectuelle est principalement importée.
Au nombre des hommes encore vivants, que sont devenus Alain Séraphine, Christian Barat, Georges-Marie Lépinay, Raoul Lucas, Jean Pierre Chabriat, Jack Gauthier, René Robert, Wilfrid Bertile, Alix Séry, Pierre Vidot, Mario Serviable, Paul Mazaka, les La Giroday, Isautier, Chatel, Dupuis, Elie Hoarau, Jean-Raymond Mondon, René Robert, Carpanin Marimoutou, Prosper Eve ? Que n’ont-ils pas apporté au pays, ces hommes et ces femmes affaiblis aujourd’hui par l’âge ou encore vigoureux ; Ils ont été utilisés, cantonnés dans des chapelles ou tout simplement oubliés ?
Quand je vois, chez moi, le volume des œuvres de Réunionnais et de Réunionnaises disparus ou encore vivants, quand je vois la pile des rapports commandés, produits, sans suite, je ne peux m’empêcher de crier au gaspillage, au gaspillage de notre patrimoine intellectuel ! La liste des auteurs, hommes et femmes, inaudibles et invisibles en dehors des cercles limités et cloisonnés d’initiés, d’amis, d’institutions, est imposante. Il y a une coupure entre les grands de chez nous, morts et vivants, et le peuple. Il faut à tout prix, renouer les liens que l’on a coupés : les liens de l’histoire et les liens avec le peuple.
Que l’on ne nous accuse pas – que nous ne nous accusions pas nous-mêmes – de repli identitaire. Quand vous vous entretenez avec Guy Pignolet, il vous parle de ses interlocuteurs américains, russes, chinois, japonais, etc. comme des familiers. Vous vous demandez s’il est encore Réunionnais. Eh bien ! Guy Pignolet vit à Piton-Sainte-Rose, chez nous, il a fait envoyer sur orbite terrestre un spoutnik fabriqué par les élèves d’un collège du Bas-de-la-Rivière-Saint-Denis, avec des Réunionnais, il a participé à la réalisation d’un engin qui a été, lui aussi, lancé sur orbite. Monsieur le Maire de Sainte-Rose devrait exposer la maquette de cet engin dans un espace public et ferait bien de reprendre et poursuivre le projet abandonné d’un Centre Culturel Spatial Réunionnais à Sainte-Rose qu’a conçu et proposé Guy Pignolet. Repli identitaire cette ouverture d’un Réunionnais sur le monde et l’espace ?…
Avant les mesures, l’esprit. Avons-nous encore envie de notre histoire ? Si oui, nous devons exprimer notre besoin d’histoire, massivement, ensemble et publiquement. »
Identité, unité, diversité
Paris, par la force des choses, impose un modèle uniforme français « métropolitain ». Cette uniformité, imposée dans l’esprit de l’assimilation, a montré ses limites, son inadaptation et, par conséquent, son incapacité à régler nos problèmes. Elle se caractérise surtout par le déni et la disparition pure et simple de l’identité, de la présence et de la responsabilité réunionnaises. Ce déni est l’explication de l’inadaptation et de l’incapacité des bases, des mesures et des références actuelles.
Malgré les dépenses engagées, malgré les dispositifs créés, malgré les interventions les plus élevées, quatre voyants importants restent au rouge : le taux de chômage, le pourcentage d’illettrés, la pauvreté et le manque de logements. Pendant ce temps, « les élites » désabusées désertent le pays ou bien continuent d’y demeurer dans l’amertume de la frustration et de la désillusion.
Un gaspillage énorme de nos intelligences et des finances publiques
Il faut remplacer l’uniformité française sur le modèle « métropolitain » et la disparition de l’identité, de la présence et de la responsabilité réunionnaises, par la diversité française des pays et des peuples français : les pays et les peuples français européens, les pays et les peuples français antillais, les pays et les peuples français indianocéaniens, les pays et les peuples français du Pacifique. De cette façon, nous sortons de la domination de la France sur son empire d’autrefois, et de l’uniformisation des pays d’outre-mer sur le modèle « métropolitain ». De cette façon, c’est la fin de la période coloniale française, la coexistence de peuples français différents, libres, égaux et fraternels au sein de la République.
Les bases nouvelles réunionnaises, ce sont « Les Fondamentaux pour l’île de La Réunion »...
Lire aussi : Les Fondamentaux pour La Réunion et la Conférence des mille / d’autres analyses de Paul Hoarau / le blog http://reelr974.eklablog.com / www.facebook.com/lejournaldepaulhoarau / Contact : paul.hoarau91@sfr.fr
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